Depuis que le Youtubeur Mertel se vantait de frauder les allocations, la fraude n’a jamais été aussi élevée que ces dernières années sur les réseaux sociaux. La montée en puissance des réseaux sociaux offre une plateforme inédite pour des activités illicites, comme en témoigne la récente tendance sur SNAPCHAT : la vente de faux certificats de travail. Cette pratique soulève des questions importantes sur la sécurité sociale et la responsabilité des plateformes numérique.

La fraude n’a jamais autant été l’objet de préoccupations et au centre de discussions pour éradiquer ce fléau. C’est la raison pour laquelle le gouvernement a annoncé un plan de lutte national contre la fraude aux aides sociales. Depuis quelques années se développe la pratique des faux arrêts maladie vendus sur internet. Cette fraude, rendue possible par l'usurpation de l'identité de certains médecins, entraine un préjudice non négligeable pour la sécurité sociale. Ce n’est pas moins de 5,5 millions d’euros qui ont été détourné de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM). Il est donc primordial de lutter contre ce nouveau fléau qui ne fait qu’augmenter ces dernières années !

Et pour cause, on peut trouver un faux arrêt maladie pour moins de 20 euros sur les réseaux sociaux. Cependant cette pratique n’est pas sans risque, tant pour l’auteur de la fraude (le faussaire) que pour l’assuré qui profite de cet arrêt. Pour rappel, l’arrêt maladie se caractérise par une absence motivée par la nécessité d’un arrêt d’un ou plusieurs jours de toute activité professionnelle, constatée par un médecin et déclaré à la Sécurité sociale. Ce dispositif social permet au salarié arrêté, de bénéficier d’une indemnité après l’observation d’un délai de carence selon les cas.

Pour des raisons diverses, cet outil social est menacé. Des récentes statistiques du ministère de l’économie démontrent une hausse exponentielle de son utilisation : 

En 2022, 8,8 millions d'arrêts de travail pour maladie ont été prescrits en France.

L’an dernier, les arrêts maladie ont progressé de 8%, engendrant un coût de 16 milliards. Globalement, c’est une augmentation de plus de 40 % sur une décennie et la tendance n’est pas à l’inflexion de la courbe. Aurélien ROUSSEAU, ministre de la santé a prévenu : « Ce n’est plus soutenable ! », d’autant plus que dans ce chiffre global, 15% correspond à de faux arrêts maladie pour un montant de 5,5 milliards d’euros au préjudice de la Sécurité sociale.

Qu’est ce qu’un faux arrêt maladie ? Quelles en sont les conséquences pour l’auteur ? Que peut faire l’employeur face à cette problématique ? Maître johan ZENOU, spécialiste du droit du travail à Paris vous informe.

I. Qu'est ce qu'un faux arrêt maladie ?

Est considéré comme faux arrêt maladie, le document qui à contrario du vrai, n’est pas délivré par un médecin et/ou ne reflète le réel état de santé du patient. 

Ainsi, on distingue donc deux types de faux arrêt maladie : 

  • Ceux relevant de la falsification du document administratif
  • Ceux produit par des professionnels de santé encore appelés arrêt maladie de complaisance

La distinction entre les deux tient toute son importance eu égard à l’auteur et aux conséquences qui en découleraient.

 

II. Quelles en sont les conséquences pour le ou les auteurs ?

S’agissant du premier type de faux arrêts maladie, il met en cause un salarié pour ne parler que de ce cas, qui falsifie le document administratif. Sans grande surprise, la fabrication et/ou l’utilisation d’un arrêt maladie contrefait est un délit puni par la loi. Il s'agit du délit de faux et usage de faux prévu et réprimé à l'article 441-2 du Code pénal. 

L'article 441-2 du Code pénal dispose que : « Le faux commis dans un document délivré par une administration publique aux fins de constater un droit, une identité ou une qualité ou d'accorder une autorisation est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende […] ». La falsification se caractérise par l’altération de la vérité causant un préjudice à autrui, quelle que soit la méthode utilisée. L'usage de faux consiste à employer un document falsifié dans le but de bénéficier des avantages que l'original aurait accordé. 

Dans la même veine, le professionnel de santé dont le nom est mentionné sur le document peut porter plainte pour usurpation d’identité. Le Code pénal, en son article 226-4-1 dispose que : « Le fait d'usurper l'identité d'un tiers ou de faire usage d'une ou plusieurs données de toute nature permettant de l'identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d'autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende ». 

Au surplus, l’article 441-10 du même code énonce que : « Les personnes physiques coupables des crimes et délits prévus au présent chapitre encourent également les peines suivantes :

1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille suivant les modalités prévues par l'article 131-26 ;

(…) ».

De façon claire, le salarié coupable du présent délit peut se voir :

  • Interdire la prise de certaines fonctions publiques ;
  • Interdire l'exercice de droits civiques, civils et de famille ;
  • Interdire le droit à la direction, l’administration, la gestion ou le contrôle d'une entreprise industrielle ou commerciale.

 

La sanction pénale n’est pas la seule à pouvoir être mise en mouvement. En utilisant un faux arrêt maladie, le salarié se rend coupable d’une faute professionnelle. Cette dernière justifierait une sanction disciplinaire ; un licenciement sans préavis ou indemnité car son maintien dans l'entreprise ne serait plus possible. En outre, l’employeur peut ester en justice le salarié s’il a bénéficié d'indemnités, et lui en réclamer le remboursement en plus des réparations d'un éventuel dommage.

Dans le même sens, la Sécurité sociale pourrait réclamer le remboursement des sommes perçues indument. La CPAM peut même émettre une pénalité administrative selon l’article L.162-1-14 du Code de la Sécurité sociale. S’agissant des arrêts maladie de complaisance, les médecins sont complices des faussaires. Comme déjà expliqué, le principe est que le document doit être sincère vis-à-vis de l'état de santé du patient. 

Or, dans ce type de faux arrêt, le médecin est complaisant avec le salarié en lui accordant des jours de repos dont il n’a pas droit, au préjudice de la sécurité sociale et de l’entreprise. A ce titre, il se rend coupable du délit de falsification de document administratif et s’expose aux sanctions pénales prévues à l’article 441-2 du Code pénal.

Le Code de santé interdit également aux professionnels de santé de délivrer de faux actes. L’article R.4127-28 du Code de la santé publique prévoit en effet que : « La délivrance d'un rapport tendancieux ou d'un certificat de complaisance est interdite. »

C’est donc fort logiquement que le médecin coupable, peut être entendu par l’ordre des médecins et se voir sanctionné par un avertissement, un blâme, voire la radiation du tableau de l'ordre des médecins. Plus grave encore, si le faussaire n’est pas médecin, il peut se retrouver accuser d’exercice illégal de la médecine selon l’article L4161-1 du Code de la santé publique et l’article R.4127-30 du Code de la santé publique.

III. Que peut faire l'employeur face à un faux arrêt maladie ?

 

La production d’un arrêt maladie en principe emporte présomption de la réalité de la pathologie. Toutefois, si l’employeur a des doutes sur la véracité des conclusions du médecin auteur de l’acte, il peut, à ses frais, organiser une contre-visite médicale au domicile de son salarié dans l’hypothèse où il lui verserait un complément de salaire et bien entendu, le salarié n’a pas le droit de s’y opposer.

En cas constatation d’un faux arrêt maladie, l’employeur peut tout aussi bien mettre en cause le professionnel de santé, ayant délivré l’acte tant devant la juridiction pénale que l’instance ordinale. Attention, une des piste du gouvernement pour lutter contre la fraude, l'article 27 prévoit de « renforcer les modalités de contrôle tant des prescripteurs que des assurés pour, in fine, éviter tout arrêt de travail qui ne serait pas, ou plus, médicalement justifié ». Ainsi une des mesure qui fait grincer des dents les employeurs serait selon le texte que « le versement des indemnités journalières pourra être suspendu automatiquement à compter du rapport du médecin contrôleur délégué par l'employeur et concluant au caractère injustifié de l'arrêt, tout en laissant aux assurés concernés un recours devant le service médical ».

Il est possible à un employeur de vérifier de la véracité de l’arrêt maladie, d’un salarié en effectuant un contrôle médical au domicile pour constater la légitimité de l’arrêt par un médecin contrôleur diligenté par l’employeur. Dès lors si le salarié ne se trouve pas chez lui, pendant ses heures d’interdiction de sorties ou refuse d’ouvrir la porte au médecin contrôleur, l’employeur est en droit de suspendre le paiement du complément versé par la prévoyance.

Cela pose beaucoup de questions, et notamment le sacro-saint respect de l’indépendance du médecin qui est rémunéré rappelons le directement par l’employeur. Qui est plus, il est demandé aux employeurs de dénoncer à la sécurité sociale un salarié, dont il aurait une suspicion sur le bien-fondé de l’arrêt maladie ! Ce n’est pas le rôle de l’employeur de dénoncer leurs salariés à la sécurité sociale. Il appartiendra alors au médecin contrôleur de fournir un rapport médical au médecin conseil de la CPAM sur l’assuré, l’employeur ne pouvant pas avoir accès à ce rapport en raison du secret médical…

Vous êtes confronté à un salarié qui vous a communiqué un arrêt de travail dont vous ignorez la véracité, n'hésitez pas à faire appel au Cabinet ZENOU expert en droit en du travail situé dans le 20ème arrondissement de Paris pour vous aider à vous assurer de l'authenticité de cet arrêt de travail, et si besoin le cas échéant initier les procédures contentieuses à l'égard de celui-ci.