Le secteur du BTP constitue la majeure partie des salariés affectés par l’amiante. En effet, cette pathologie grave de la plèvre constitue le principal "cancer de l'amiante", "qui survient environ 40 ans après le début de l'exposition", nous informe l'Organisme professionnel de prévention du BTP (OPPBTP) l'amiante est par ailleurs soupçonné de favoriser le déclenchement de cancers digestifs.

Le Fonds d’Indemnisation des victimes de l’amiante, créé en 2001, est un établissement public administratif doté de la personnalité juridique et administré par un conseil d’administration. Il est placé sous la tutelle des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. Sa mission est d’assurer la réparation intégrale des préjudices subis par les victimes d’une pathologie en lien avec l’amiante et leurs ayants droit, en leur évitant une procédure contentieuse parfois longue et compliquée.

Le présent article établit le cadre juridique du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, ci-après dénommé le FIVA. Ce dernier a pour objectif de fournir une compensation financière aux personnes, ayant subi des préjudices dus à l’exposition à l’amiante dans le cadre de leur activité professionnelle ou en tant que tiers.

Maître Johan Zenou expert en droit de la sécurité sociale à Paris aborde successivement les bénéficiaires du FIVA (1), les conditions d’indemnisation (2), les postes de préjudices indemnisables (3), l’offre d’indemnisation par le FIVA (4) et enfin la procédure d’indemnisation du FIVA (5).

I. Sur les bénéficiaires du FIVA

Les bénéficiaires du FIVA sont les individus qui ont été exposés à l’amiante et qui ont subi des dommages physiques, moraux ou économiques en raison de cette exposition. 

Les bénéficiaires sont de trois (3) ordres :

  • La victime « professionnelle » reconnue : elle a été exposée à l’amiante dans le cadre de son travail. Sa maladie a été reconnue d’origine professionnelle par un organisme de sécurité sociale ;
  • La victime professionnelle non reconnue : une victime peut avoir été exposée dans le cadre professionnel sans pour autant bénéficier d’une prise en charge au titre de la maladie professionnelle.

 

Attention si la maladie (mésothéliomes malins et plaques pleurales) figure sur une liste de maladie établie pas un arrêté du 5 mai 2002, alors l’inscription de cette maladie sur la liste vaut « justification de l’exposition à l’amiante ». Cela veut dire que la victime est donc dispensée de fournir un document de nature à établir le lien entre la maladie développée et l’origine professionnelle de cette maladie. La victime devra simplement fournir un certificat médical sur le fait qu’elle développe ladite maladie. Il s’agit de favoriser la reconnaissance de la pathologie et par la même son indemnisation. Cette présomption est une présomption simple qui peut être renversée par une preuve contraire (Décret du 23 octobre 2000, article 54-III, alinéa 4).

  • La victime « environnementale » : elle a été exposée à l’amiante en dehors du cadre professionnel, par exemple exposée sur son lieu de résidence, son environnement ou par le contact avec des vêtements contaminés.

 

Pour cette catégorie, la victime dite « environnementale » doit en principe rapporter la preuve par elle-même de la maladie, dont elle est atteinte et celle du lien de causalité avec une exposition à l’amiante. Ainsi on peut en déduire qu’aucune présomption n’est admise pour les victimes non prises en charge, au titre d’une maladie professionnelle occasionnée par l’amiante (Voir en sens l’arrêt rendu par la Cour de cassation 2ème chambre civile, 14 décembre 2017 n°16-25.666).

Dans cette hypothèse, il appartient à la commission d’examen des circonstances de l’exposition à l’amiante (CECEA) d’établir ou non un lien entre la pathologie et une éventuelle exposition en France.

  • Le ou les ayants droit d’une victime décédée des suites de sa maladie liée à l’amiante : le conjoint, les enfants majeurs et mineurs, les petits enfants s’ils sont nés avant le décès de la victime, les frères et sœurs, les parents et certains proches sous conditions.

 

II. Conditions d’indemnisation

 

Tout d’abord, il convient de rappeler que la loi du 23 décembre 2000 « accorde la réparation intégrale de leur préjudice aux personnes ayant obtenu la reconnaissance d’une maladie professionnelle occasionnée par l’amiante ou qui ont été exposées à l’amiante en France » (Voir la loi n°2000-1257 du 23 décembre 2000, article 53).

Pour bénéficier de l’indemnisation du FIVA, les demandeurs doivent prouver qu’ils ont été exposés à l’amiante et qu’ils ont subi des préjudices directement liés à cette exposition. La procédure d’indemnisation devant le FIVA est gratuite. Pour être indemnisé, il est nécessaire de déposer une demande auprès du FIVA et de fournir tous les éléments notamment médicaux permettant de justifier d’une exposition à l’amiante et d’une atteinte à son état de santé en lien avec cette exposition.

Le FIVA peut être saisi directement par le demandeur (victime ou ayant droit). Ce dernier peut se faire assister ou représenter par une association de victimes, un avocat, une organisation syndicale ou un mandataire ad hoc. La première étape de la demande d’indemnisation est la constitution du dossier. Pour cela, un formulaire de demande d’indemnisation doit être complété, signé et transmis au FIVA. Des formulaires existent en cas d’aggravation de l’état de santé et, en cas de décès de la victime, pour les ayants droit. 

Si la maladie n’a pas été reconnue d’origine professionnelle par un organisme de sécurité sociale, il faut également compléter un questionnaire concernant les circonstances de l’exposition à l’amiante et produire un certificat médical attestant d’une maladie en lien avec l’amiante.

A noter : Depuis 2011, l’action en indemnisation devant le FIVA se prescrit par dix (10) ans à compter de la date du premier certificat médical, établissant le lien entre la maladie ou le décès et l’exposition à l’amiante (ou constatant l’aggravation de la maladie constatée antérieurement) (Loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, article 53, III bis issu de la loi finance de la sécurité sociale pour 2011).

 

2.1 Sur les postes de préjudices indemnisables

Le FIVA assure une réparation intégrale du préjudice subi par les personnes exposées à l’amiante.

Ainsi, sont indemnisés :

  • Les préjudices patrimoniaux (ou économiques) : il s’agit de l’indemnisation du déficit fonctionnel permanent (DFP) qui correspond à l’incapacité partielle permanente (IPP), liée aux séquelles permanentes causées par la maladie sur la base d’un barème propre au FIVA et spécifique aux pathologies de l’amiante. Un second barème donne ensuite le montant de la rente FIVA en fonction du taux d’IPP retenu. Le préjudice professionnel (perte de gains) et de tous les frais qui résultant de la pathologie restant à la charge de la victime (frais de soins, autres frais supplémentaires tels que tierce personne, aménagement du véhicule et du logement…)
  • Les préjudices extrapatrimoniaux (ou personnels) : indemnisation de l’incapacité fonctionnelle (ce taux d’incapacité est apprécié suivant un barème médical), du préjudice moral et physique, préjudice d’agrément, préjudice esthétique.

 

2.2 L’offre d’indemnisation par le FIVA

L’indemnisation du FIVA est une réparation intégrale cela veut dire que l’indemnisation totale de la victime ou des ayants droit est constituée par l’addition :

 

  • Des prestations versées par la CPAM au titre de remboursement des frais de soin, des prestations versées au titre de l’indemnisation de l’incapacité permanente partielle en capital ou même en rente, des victimes lorsque la pathologie est reconnue d’origine professionnelle ou de la rente versée aux ayants droit en cas de décès de la victime,
  • De l’indemnisation proposée par l’offre du FIVA reprenant l’indemnisation de « poste par poste » de préjudice.

 

Bon à savoir : L'indemnisation parallèle de la sécurité sociale ne doit pas conduire à une double indemnisation de la victime. En effet, par application du principe de la réparation intégrale, la victime d'un dommage ne peut obtenir deux indemnisations distinctes pour le même préjudice.

Cependant, l’indemnisation de la FIVA ne présente pas un caractère subsidiaire, ainsi la victime n’est pas tenue de solliciter au préalable le versement d’une prestation sociale, en ce sens voir l’arrêt rendu par la 2ème chambre civile de la Cour de cassation du 9 mars 2023, n°21-20.565.

En résumé, l’offre présentée par le FIVA peut être de deux ordres :

  • Soit la réparation forfaitaire de la sécurité sociale est supérieure à la réparation intégrale telle que proposée par le FIVA, alors que ce dernier ne propose aucune indemnisation au titre de la réparation des préjudice patrimoniaux.
  • Soit au contraire, le montant de la réparation forfaitaire de la sécurité sociale (rente, IPP…) est inférieur à l’offre d’indemnisation du FIVA, alors ce dernier peut proposer un complément d’indemnisation résultant de la différence entre l’indemnisation de la CPAM et celle de l’offre du FIVA.

 

2.3 La procédure d’indemnisation du FIVA

La victime ou ses ayants droit reçoivent une offre d’indemnisation du FIVA dans les six mois à compter de la réception de leur demande d’indemnisation. A noter que l’absence de réponse dans le délai vaut rejet de la demande. L’offre d’indemnisation du FIVA reçue par la victime ou le cas échéant ses ayants droit, peut être refusée comme jugée insatisfaisante. Dans cette hypothèse, le fonds se trouve « délié de l’offre, devenue caduque » et peut proposer une offre révisée. Lorsque le FIVA présente une offre d’indemnisation jugée insuffisante par le demandeur, il lui appartient de saisir la Cour d’appel dans un délai de 2 mois (en ce sens voir le décret n°2001-963 du 23 octobre 2001 (article 22, 27 et 28).

Lorsque la victime accepte la première offre du fonds, ou même une offre révisée, l’acceptation vaut « désistement des actions juridictionnelles en indemnisation en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle future en réparation du même préjudice ». (Voir Loi n°2000-1257, article 53, IV, alinéa 3).

Ainsi l’acceptation s’analyse en une transaction conformément à l’article 2044 du Code civil ce qui rend toute nouvelle demande devant le FIVA irrecevable (Voir Cass civ, 20 décembre 2007, n°07-12.473).

Vous vous trouvez confronté(e) à une demande d’indemnisation auprès du FIVA ? Vous ne savez pas comment faire valoir vos droits ? Ou enfin l’indemnisation proposée par le FIVA ne correspond pas à une indemnisation que vous jugez correcte ? Le Cabinet ZENOU, expert en indemnisation devant le FIVA à Paris 20ème est présent à vos côtés pour vous aider à obtenir la meilleure des indemnisations possibles devant la Cour d’appel.