L’obligation de reclassement qui pèse sur l’employeur en cas de licenciement économique ou d’inaptitude d’un salarié a fait l’objet de multiples réformes ces dernières années. La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques avait apporté une première limitation à cette obligation préalable de reclassement en restreignant le champ de recherche des emplois disponibles à l’échelle du territoire national et en n'exigeant une recherche de poste à l'étranger que sur demande expresse du salarié.

Les ordonnances n°2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail et n°6 du 20 décembre 2017 n° 2017-1718 ont renforcé la loi de 2016. Désormais, la recherche de reclassement s'effectue « au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient, le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ».

 

  • L’objet de l’obligation de reclassement en cas de licenciement pour motif économique

 

Dans le cas d’un licenciement pour motif économique, l’obligation de reclassement est rattachable à la justification du licenciement. Si cette dernière n’est pas correctement exécutée, le licenciement est réputé sans cause réelle et sérieuse. Cette obligation trouve son origine dès 1992 dans l’arrêt Dame jardin  (C.cass, ch.soc., 1er avril 1992, n°89-43494).

Antérieurement aux ordonnances de 2017, la Cour de cassation dans un arrêt du 24 juin 2008 (C.cass, ch.soc., 24 juin 2008, n°06-45870, 06-45871) avait précisé l’objet de cette obligation. C’est ainsi qu’avant tout licenciement pour motif économique, l’employeur est tenu d’une part de rechercher toutes les possibilités de reclassement et d’autre part, de proposer ensuite au salarié dont le licenciement est envisagé, tous les emplois disponibles de la même catégorie ou à défaut, de catégorie inférieure. Cette obligation de reclassement contient une double dimension : rechercher et proposer. Cette obligation n’est pas une obligation de résultat mais une obligation de moyens préalable au licenciement.

 

  • L’objet de l’obligation de reclassement en cas d’inaptitude

 

Le reclassement pour inaptitude concerne les salariés devenus inaptes physiquement à la suite d’un accident ou d’une maladie et qui ne peuvent plus exercer les fonctions qui étaient les leurs, même après aménagement de leurs conditions de travail. Un simple aménagement des conditions de travail n’est donc pas un reclassement stricto-sensu.

 

Depuis la loi du 8 aout 2016, en cas d’inaptitude d’origine professionnelle ou non professionnelle et même lorsque le salarié ne souhaite pas reprendre son poste de travail, l’employeur est tenu de proposer au salarié déclaré inapte par le médecin du travail tout poste adapté à ses capacités. Le poste proposé doit être le plus similaire possible à celui qu’il occupait. Un examen unique par le médecin du travail suffit désormais en principe. Il n’y a que lorsque le médecin du travail mentionne expressément que le maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé après avoir accompli les diligences appropriées, ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi que l’employeur est exonéré de son obligation.

Il existe un recours, néanmoins complexe et difficile à mettre en œuvre pour les salariés placés dans cette situation, porté devant le Conseil de Prud'hommes statuant en référé pour constester les conclusions d'aptitude ou d'inaptitude du médecin du travail.

 

  • Un périmètre de reclassement resserré et une procédure simplifiée en cas de licenciement pour motif économique

 

Les ordonnances ont donc précisé et resserré le périmètre du reclassement tant en cas d’inaptitude que de licenciement pour motif économique.

Il y a d’abord une précision de la définition du groupe dit de reclassement qui n’était jusqu’alors pas mentionné dans le Code du travail. Désormais, « le reclassement de l’intéressé doit être recherché sur les emplois disponibles dans l’entreprise ou les entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieux d’exploitation assure la permutation de tout ou partie du personnel ». Deux points importants sont à souligner :

  • Auparavant, le périmètre de reclassement était autonome du groupe de sociétés. L'employeur pouvait être amené à étendre sa recherche en dehors d’un groupe de sociétés. La plupart du temps, ces deux notions se superposent mais pas toujours (exemple : les franchisés ne sont pas toujours possédés par le franchiseur). Les ordonnances ont aligné le groupe de reclassement sur le groupe de société. On ne peut rechercher un reclassement que dans le cadre d’un groupe de société. La notion de groupe inscrite dans le code du travail renvoie désormais à la définition donnée par le Code de commerce.

  • L’obligation de reclassement ne vaut que pour les emplois disponibles situés sur le territoire national. Désormais, il n’y a plus de reclassement à l’international.

Enfin, le décret n° 2017-1725 du 21 décembre 2017 relatif à la procédure de reclassement interne sur le territoire national en cas de licenciements pour motif économique a simplifié les modalités de diffusion des propositions de postes disponibles de reclassement aux salariés. L’employeur aura le choix entre adresser de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou alors diffuser par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés.

Avant ce décret, la Cour de cassation estimait que la simple mise à disposition d’une liste de postes disponibles n’était pas suffisante pour remplir à l’obligation à la charge de l’employeur.

Le législateur a donc initié un mouvement de simplification de l'obligation de reclassement de l'employeur, qui devra néansmois se montrer très viligeant et agir de bonne foi.