Aujourd’hui, obtenir un rendez-vous en Préfecture est devenu mission impossible. Avant la mise en place des rendez-vous en ligne, il était courant d’observer de longue file d’attente devant les Préfectures. Aujourd’hui, il n’y a plus personne. La raison est simple : ces files d’attente sont numériques. Désormais, la plupart des Préfectures ou des sous-préfectures imposent aux usagers une prise de rendez-vous en ligne. En pratique, les associations et les usagers ont pu constater qu’il n’y avait aucune plage horaire disponible, et ce malgré de nombreuses tentatives. Ces difficultés, devenues invisibles pour tous, demeurent très concrètes pour les étrangers qui y sont confrontés. Face à cette situation, il est possible de saisir le Juge afin d’obtenir un rendez-vous. La première étape consiste à rassembler des éléments de preuves. Ce qui permettra d’exercer un recours devant le Tribunal administratif.

 

  1. Rassembler les preuves

Force est de constater qu’il est très difficile d’obtenir un rendez-vous en Préfecture. Il peut parfois s’écouler 4 à 6 mois avant d’obtenir un rendez-vous. En désespoir de cause, certains usagers envoient un courriel ou un courrier au service des étrangers de la Préfecture. Dans cette situation, il peut être opportun de saisir le Juge. Pour ce faire, il faut constituer un dossier solide avec les preuves des démarches effectuées.

  • Pour les prises de rendez-vous en ligne : il convient d’effectuer des captures d’écran de la réponse du site de la Préfecture indiquant qu’il n’y a pas de plage de rendez-vous disponible. Cette capture d’écran doit impérativement mentionner la date et l’heure de la connexion.
  • Pour les prises de rendez-vous par courriel ou par courrier : Il faut conserver une copie de tous les courriels ou courriers envoyés à la Préfecture. Il est également recommandé de conserver les avis de réception.

Certaines associations, telles que le GISTI, formulent des recommandations. Pour une première demande de titre de séjour, il est recommandé d’avoir assemblé des preuves pendant au moins deux ou trois mois en raison de deux ou trois démarches par semaine. Pour une demande de renouvellement de titre de séjour, la période de collecte de preuve pourrait être réduite à un voir deux mois.

Quoi qu’il en soit, un point est incontestable : la nécessité de pouvoir justifier des démarches effectuées en vue d’obtenir un rendez-vous.

 

  1. Les recours possibles

Avant d’exercer un recours devant le Tribunal, l’usager peut solliciter une médiation auprès d’un délégué local du Défenseur des droits. Si cette démarche n’aboutit pas, il peut être opportun d’exercer un recours devant le Tribunal administratif. A ce stade de la procédure, il est recommandé de faire assister par un Avocat.

 

Il existe plusieurs types de recours contentieux. L’accent sera mis sur la procédure de référé « mesures utiles ». L’article L.521-3 du Code de justice administrative dispose : « En cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative. »[1]

Lorsque l’usager n’a pas pu obtenir un rendez-vous, il peut demander au juge des référés, saisi sur le fondement de l’article L 521-3 du code de justice administrative, d’enjoindre au Préfet de lui communiquer, dans un délai qu’il fixe, une date de rendez-vous. En fonction de la situation de l’usager, le Juge peut préciser le délai maximal dans lequel ledit rendez-vous doit avoir lieu.

Récemment, le Conseil d’État s’est prononcé sur la problématique des rendez-vous en ligne. Dans une décision du 10 juin 2020[2], le Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles le Juge peut ordonner la fixation d’un rendez-vous. De facto, deux conditions doivent être satisfaites :

  • L’étranger doit apporter la preuve qu’il n’a pu obtenir de rendez-vous par internet.
  • L’étranger doit apporter la preuve qu’il a réalisé plusieurs tentatives sur plus d’une semaine.

En définitive, face à ces difficultés, les solutions existent. Face à l’impossibilité d’obtenir un rendez-vous, le Défenseur des droits a été saisi de plusieurs réclamations. Le 10 juillet 2020, le Défenseur des droits a adressé plusieurs recommandations au Ministre de l’intérieur[3]. À ce jour, aucune modification n’est intervenue.

 

 


[1] Articles L. 521-1 à L. 523-1 du Code de justice administrative

[2] Conseil d’État, 7 et 2ème Ch. Réunies, 10 juin 2020, n° 435594.

[3] Décision du Défenseur des droits, 10 juillet 2020, n° 2020-142.