Dans une première analyse, nous avons étudié les apports principaux de la loi ELAN en droit locatif. Il convient maintenant d’analyser les apports de cette loi en droit de la copropriété et corrélativement en droit de la construction et de l’urbanisme.

1.     Le délai de prescription

Avant l’introduction de la loi ELAN, l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 prévoyait en substance trois délais :

–         un délai général de prescription de 10 ans ;

–         un délai de deux mois pour notifier le procès-verbal d’assemblée générale à compter de la réunion de l’assemblée générale ;

–         un délai de deux mois pour contester une décision d’assemblée générale à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée générale ;

Désormais, sous l’emprise de la loi ELAN les deux premiers délais sont modifiés, l’article 42 prévoyant :

–         un délai général de prescription de 5 ans ;

–         un délai d’un mois pour notifier le procès-verbal d’assemblée générale à compter de la réunion d’assemblée générale ;

Le délai de deux mois pour contester une décision d’assemblée générale à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée générale demeure, lui, inchangé.

2.     La création d’une procédure de recouvrement de charges facilitée

En matière de recouvrement de charges, le syndicat des copropriétaires doit en principe intenter une procédure au fond pour obtenir la condamnation du copropriétaire défaillant au règlement de ses charges de copropriété, sauf à intenter une action devant le juge des référés lorsqu’il n’y a pas de contestations sérieuses.

Aussi, les procédures peuvent se multiplier lorsque le propriétaire ne règle ses charges que sous la contrainte.

La loi du 14 décembre 2000 avait créé pour aider le syndicat des copropriétaires un article 19-2 prévoyant qu’en l’absence de réponse à une mise en demeure adressée au copropriétaire dans un délai de 30 jours, l’intégralité des sommes exigibles aux termes du budget provisionnel devenaient immédiatement exigibles.

Toutefois, cette procédure ne permettant pas d’obtenir le règlement des sommes dues au titre de l’arriéré de charges antérieur à l’année en cours, elle a très peu été utilisé par les syndicats des copropriétaires lui préférant la procédure classique pour recouvrer le tout.

La loi ELAN vient élargir l’article 19-2 et permet désormais au syndicat des copropriétaires d’intenter une action devant le juge des référés (ou plus exactement statuant comme en matière de référé) 30 jours après une mise en demeure restée infructueuse pour recouvrer à la fois les charges antérieures et les charges prévisionnelles de l’année en cours si le copropriétaire ne règle pas un seul appel de fonds.

Les procédures en matière de référé vont désormais nécessairement s’intensifier avec cet article permettant au syndicat des copropriétaires de recouvrer ses sommes plus rapidement.

3.     La participation des copropriétaires aux assemblées générales

La loi ELAN souhaite faciliter et moderniser la participation des copropriétaires aux réunions d’assemblée générale.

Ainsi, elle prévoit que les copropriétaires et le syndic peuvent tous deux participer par visioconférence ou tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification.

Elle prévoit également que le copropriétaire peut voter par anticipation, avant la tenue de l’assemblée générale donc, par voie de formulaire.

Une telle disposition a été introduite à des fins de célérité et de facilitation de l’adoption des résolutions en assemblée générale.

Il n’empêche que d’un autre point de vue, ladite disposition fait fi des débats devant se tenir en assemblée générale et servant normalement à éclairer le consentement des copropriétaires sur l’adoption de la résolution en question.

En outre, si le formulaire n’indique pas précisément le sens du vote ou le caractère abstentionniste de celui-ci, il est considéré comme un vote défavorable, créant ainsi le risque de voir une résolution souhaitée par les copropriétaires rejetée en raison de la négligence de certains copropriétaires lorsqu’ils auront rempli leur formulaire.

Pire encore, si la résolution évolue substantiellement durant l’assemblée générale, le vote même favorable sera systématiquement considéré comme défavorable.

Ce qui rend donc les votes par anticipation peu fiables d’autant plus que le législateur ne définit pas ce qu’est une évolution substantielle.

4.     De nouvelles sanctions à l’encontre d’un syndic non-diligent

L’article de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le syndic est tenu de communiquer au Conseil syndical tous les documents intéressant le syndicat des copropriétaires.

En cas de non-communication de documents dans le délai d’un mois à compter de la demande du Conseil syndical, le syndic encourra des pénalités par jour de retard dont les modalités sont fixées par décret.

5.     Les modifications concernant le vote en assemblée générale

La loi ELAN est venue apporter quelques modifications concernant le vote de certains types de résolutions.

Ainsi, tous les votes relatifs à des travaux d’économie d’énergie sont désormais votés à la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, alors qu’une distinction était opéré avant, certains l’étant à la majorité de l’article 24 et d’autres de l’article 25.

En ce qui concerne les pouvoirs en blanc, c’est-à-dire les procurations ne faisant pas état d’un mandataire désigné, qui pouvaient être donnés au syndic, ceux-ci ne sont désormais plus possible afin d’éviter que le syndic n’ait la mainmise sur le syndicat des copropriétaires.

En revanche de telles procurations pourront toujours être remises au président de séance qui pourra les distribuer après son élection.

Une même personne peut désormais recevoir plus de trois délégations si le total des voix dont il dispose, en ce compris la sienne et celles de ses mandants, est inférieur à 10 % du total des voix du syndicat des copropriétaires, pour 5 % avant la loi ELAN.

La loi ELAN permet d’ailleurs au mandataire de lui-même déléguer son vote et celui de ses mandants à un autre mandataire à condition que ce dernier respecte toujours le seuil des 10 %.

Enfin, la loi ELAN prévoit que chacun des époux copropriétaire peut recevoir personnellement des délégations, les deux époux ne pouvant toutefois atteindre 20 % du total des voix du syndicat des copropriétaires.

6.     La propriété des colonnes électriques

Alors que pouvait parfois régner un flou sur l’appartenance des colonnes électriques situées dans les copropriétés, celles-ci étant tantôt considérées par la jurisprudence comme faisant partie du réseau public de distribution, tantôt comme la propriété du syndicat des copropriétaires, la loi ELAN est venu une fois pour toute régler ce débat.

Désormais l’article L.346-2 du code de l’énergie dispose que les colonnes électriques sont pour celles mises en services après la publication de la loi toujours la propriété de la personne publique et pour celles mises en services avant l’entrée en vigueur de la loi également la propriété de la personne publique une fois un délai de deux ans écoulés après la promulgation de la loi, donc d’ici le 25 novembre 2020.

Entre temps le syndicat des copropriétaires peut toujours notifier au gestionnaire du réseau public de distribution, ENEDIS, s’il le souhaite le transfert de la propriété des colonnes électriques.

Cela permet ainsi au syndicat des copropriétaires de s’économiser des coûts important relatifs à l’entretien de ces colonnes.

7.     Les apports de la loi ELAN en matière de droit de la construction et de l’urbanisme

Nous serons ici très succincts sur ces apports qui pourraient nourrir de plus amples développements mais qui s’éloignent du droit immobilier pour se rapprocher d’avantage du droit public de l’urbanisme et de l’environnement.  

L’un des objectifs principaux de la loi ELAN est de faciliter les règles d’urbanisme afin d’accélérer les procédures de construction de logement.

A ce titre, la loi vise à limiter le nombre de recours abusifs à l’encontre des permis de construire en restreignant la notion d’intérêt à agir.

Les nuisances sonores ne pourront ainsi plus être évoquées, la notion de travaux ayant été supprimé de l’article L.600-1-2 du code de l’urbanisme.

La loi prévoit également que le juge administratif doit statuer dans un délai de 10 mois.

Elle fixe aussi comme objectif pour 2022 que les demandes de permis de construire puissent s’effectuer en ligne pour les communes dépassant 3500 habitants.

Enfin, dernier fait notable qui mérite ici d’être évoqué, la loi assouplie les conditions de transformation des bureaux vides en logement afin d’éviter que ces locaux restent inutilement vacants, fautes de pouvoir être transformés en habitations.