Depuis le 12 mars 2020, la France est entrée dans une situation exceptionnelle dès lors que le Gouvernement a imposé, pour lutter contre la pandémie du coronavirus, la fermeture de toutes les activités économiques non essentielles ainsi que des restrictions à la liberté de déplacement, avec pour conséquence la fermeture de nombreuses entreprises de production et de services ou bien la suspension d'activités économiques lorsque le télétravail n'est pas possible.

Pour les salariés en contrat à durée indéterminée ou bien en contrat à durée déterminée, l'employeur pourra activer le dispositif de recours au chômage partiel.

Pour les salariés en situation d'intérim, la situation se révèle plus complexe, de nombreuses agences d'intérim souhaitant, si la mission ne peut se poursuivre pendant la période d'état d'urgence sanitaire, mettre un terme au contrat de mission en proposant aux salariés intérimaires soit la rupture d'un commun accord du contrat d'intérim soit la rupture de ce contrat à l'initiative du salarié, sous la menace parfois d'indiquer au salarié qu'il ne pourra en cas de refus, bénéficier des indemnités de fin de contrat.

Dans les deux hypothèses, il est recommandé au salarié d'intérim de refuser ces propositions.

 

  1. les règles du contrat de travail temporaire

Le contrat de travail temporaire combine deux contrats :

- le contrat de mission qui lie le salarié à l'entreprise de travail temporaire,

- le contrat de mise à disposition qui lie l'entreprise de travail temporaire à l'entreprise utilisatrice.

Il ressort des dispositions de l'article L 1251-30 du code du travail que le terme convenu dans le contrat de mission oblige les parties au contrat de mise à disposition.

En conséquence, le contrat de mission ne peut donc être rompu avant la date de fin de la mission indiquée.

 

2. L'impact de la suspension du contrat de mise à disposition sur le contrat de mission

L'article L 1251-29 du code du travail est clair : "La suspension du contrat de missionn du salarié ne fait pas obstacle à l'échéance de ce contrat".

Le contrat de mission peut être suspendu dans les mêmes conditions qu'un contrat de travail à durée indéterminée, soit pour maladie, accident du travail, maternité, etc.

Si dans le contexte actuel, l'entreprise utilisatrice a suspendu le contrat de mise à disposition, le salarié intérimaire ne peut poursuivre sa mission.

Son contrat de travail temporaire est alors suspendu et il a droit au paiement de sa rémunération. Dans la situtation actuelle, il appartient à l'entreprise de travail temporaire de mettre en oeuvre le dispositif relatif au chômage partiel.

En revanche, si le contrat de mise à disposition n'est pas suspendu mais si le salarié estime que sa sécurité n'est pas assurée, peut-il exercer un droit de retrait ?

L'article L 4131-1 du code du travail dispose que "Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d'une telle situation. L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection".

Ce texte est applicable au salarié de travail temporaire et il lui appartient de faire valoir ce droit de retrait auprès de l'entreprise de travail temporaire qui est son employeur.

Le salarié n'a pas à demander l'autorisation ou l'accord de l'employeur pour qu'il quittte son poste. La seule obligation faite au salarié est d'informer immédiatement l'employeur de la situation qu'il juge dangereuse pour lui.

Aucune sanction ni aucune retenue de rémunération ne peut s'appliquer à l'égard d'un salarié qui use de son droit de retrait.

 

3. La rupture anticipée du contrat de travail temporaire

Il est prévu par le code du travail la rupture anticipée du contrat de mission soit à l'initiative de l'entreprise de travail temporaire soit à l'initiative du salarié.

En revanche, il n'est pas prévu la possibilité d'une rupture d'un commun accord de ce contrat.

  • la rupture anticipée à l'iniative de l'entreprise de travail temporaire

L'article L 1251-26 du code du travail impose à l'entreprise de travail temporaie qui rompt le contrat de mission du salarié avant le terme prévu doit lui proposer, sauf faute grave de ce dernier ou cas de force majeure, un nouveau contrat de mission prenant effet dans un délai maximum de 3 jours ouvrables.

Ainsi, l'entreprise de travail temporaire est liée par le terme prévue au contrat de mission et elle doit donc fournir une prestation de travail au salarié temporaire jusqu'au terme de la mission initialement prévue.

2 exceptions sont prévues, la faute grave du salarié et le cas de force majeure.

La crise sanitaire actuelle liée à la pandémie du coronavirus pourrait-elle s'analyser en un cas de force majeure ?

Il convient de rappeler la définition de la force majeure laquelle est un évènement imprévisible, irrésistible (insurmontable) et extérieur (échappant au contrôle des personnes concernées).

La crise sanitaire actuelle réunit certes 2 des critères sur les 3 de la définition, à savoir le caractère imprévisible et extérieur. En revanche le critère de l'irrésistibilité pourra être sujet à discussion. Dans l'éventualité où la crise sanitaire actuelle pourrait être assimilée à un cas de force majeure, l'article 1218 du code civil dispose que "Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat".

Aussi, si la situation est temporaire, les conditions de la force majeure ne sont pas réunies.

Enfin, l'entreprise de travail temporaire ne peut se référer à une rupture du contrat de mise à disposition pour rompre avant le terme le contrat de mission.

L'article L 1251-27 du code du travail pose comme principe que la rupture du contrat de mise à disposition ne constitue pas un cas de force majeure.

Aussi, dans la situation actuelle :

- l'entreprise de travail temporaire ne peut rompre avant le terme le contrat de mission et ce, que le contrat de mise à disposition soit suspendu ou rompu,

- si l'entreprise de travail temporaire estime que la situation actuelle est constitutive d'un cas de force majeure, il lui appartient de rompre le contrat de mission temporaire avec obligation d'établir un nouveau contrat de mission et d'assurer une rémunération équivalente mais elle ne peut exiger du salarié qu'il prenne l'initiative de la rupture.

 

  • la rupture anticipée à l'initiative du salarié

Le salarié temporaire mis à disposition peut-il rompre avant le terme prévu le contrat de mission ?

Le code du travail prévoit un seul motif de rupture anticipée du contrat de mission d'intérim à l'initiative du salarié : la conclusion par lui d'un contrat de travail à durée indéterminée.

Si le salarié de travail temporaire devait rompre son contrat d'intérim par anticipation pour un autre motif que la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée, il commet une faute engageant sa responsabilité à l'égard de l'entreprise de travail temporaire.

Pour retrouver les articles cités : https://www.legifrance.gouv.fr/