La surdité professionnelle constitue un contentieux récurrent devant les juridictions sociales, mettant en tension les exigences probatoires du tableau 42 des maladies professionnelles avec la protection du secret médical. La cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans un arrêt rendu le 11 septembre 2025, apporte une contribution significative à cette problématique en tranchant un litige opposant un employeur à une caisse primaire d'assurance maladie.

Un salarié employé en qualité de technicien opérateur fabrication depuis 1992 au sein d'une société de fabrication de métaux a présenté, le 7 juin 2016, une demande de reconnaissance de maladie professionnelle pour une surdité de perception sensorielle bilatérale. Le certificat médical initial faisait mention d'une hypoacousie d'allure professionnelle relevant du tableau 42. La caisse primaire, après instruction du dossier et information de l'employeur, a notifié le 3 novembre 2016 sa décision de prise en charge au titre de ce tableau. Il ressortait par ailleurs des éléments médicaux que le salarié présentait une otite chronique droite avec antécédent de tympanoplastie.

L'employeur a contesté cette décision devant la commission de recours amiable, laquelle a rejeté son recours le 9 mai 2017. Saisie successivement du recours contre la décision implicite puis explicite de rejet, la juridiction de première instance, devenue pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, a débouté la société de ses prétentions par jugement du 23 mars 2023. L'employeur a interjeté appel de cette décision le 12 avril 2023, soutenant que les conditions médicales du tableau 42 n'étaient pas remplies, que l'exposition au bruit lésionnel n'était pas établie et que l'état antérieur du salarié excluait l'origine professionnelle de la pathologie. La caisse a conclu à la confirmation du jugement.

La question posée à la cour d'appel d'Aix-en-Provence était de déterminer si la décision de prise en charge d'une hypoacousie au titre du tableau 42 des maladies professionnelles est opposable à l'employeur lorsque celui-ci conteste la réunion des conditions médicales et professionnelles de ce tableau, nonobstant l'impossibilité de produire l'audiogramme couvert par le secret médical.

La cour infirme le jugement et déclare inopposable à l'employeur la décision de prise en charge du 3 novembre 2016. Elle retient que si l'audiogramme ne peut figurer au dossier en raison du secret médical, la caisse doit néanmoins rapporter la preuve que les conditions du tableau sont réunies. Or la fiche médico-administrative, mentionnant seulement l'existence d'une audiométrie sans préciser la concordance entre les tests tonaux et vocaux ni l'impédancemétrie pratiquée, ne permet pas de vérifier le respect des conditions médicales exigées.

 

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