L'arrêt rendu par la Cour d'appel de Rouen le 11 septembre 2025 apporte un éclairage significatif sur l'étendue de l'obligation de reclassement pesant sur l'employeur en liquidation judiciaire. La décision rappelle que cette obligation ne saurait être éludée par la seule invocation de la procédure collective.
Une salariée engagée le 4 février 2008 en qualité d'agent administratif a vu son employeur placé en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Chartres le 21 juillet 2022, avec poursuite d'activité autorisée. Un plan de cession a été arrêté le 21 octobre 2022 au profit d'une société à constituer, prévoyant la reprise de 32 contrats de travail sur les 40 en cours. La salariée, dont le poste n'était pas repris, a été licenciée pour motif économique le 19 novembre 2022. Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Louviers le 7 juin 2023. Par jugement du 18 avril 2024, la juridiction prud'homale l'a déboutée de sa demande principale tendant à voir reconnaître son licenciement sans cause réelle et sérieuse, lui accordant uniquement des dommages et intérêts pour méconnaissance des critères d'ordre des licenciements. La salariée a interjeté appel le 21 mai 2024.
L'appelante soutenait à titre principal que son licenciement était intervenu verbalement dès juillet 2022, lors de la communication du projet de reprise identifiant les postes non maintenus. À titre subsidiaire, elle invoquait le manquement de l'employeur à son obligation de recherche de reclassement au sein du groupe auquel appartenait la société. La question posée à la Cour était double. Il s'agissait de déterminer si la communication d'un projet de reprise mentionnant les emplois non repris caractérise un licenciement verbal. Il convenait également de vérifier si l'employeur en liquidation judiciaire peut s'abstenir de toute recherche de reclassement au sein des autres sociétés du groupe.
La Cour d'appel de Rouen écarte le moyen tiré du licenciement verbal mais accueille celui fondé sur le défaut de reclassement. Elle juge que « l'employeur ne justifie pas avoir recherché toutes les possibilités de reclassement ou encore que ce reclassement ait été impossible », ce qui prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.
Cet arrêt mérite analyse tant au regard du rejet du moyen tiré du licenciement verbal (I) que de la consécration d'une obligation de reclassement effective au sein du groupe (II).
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