Par un arrêt du 10 septembre 2025, la Cour d'appel de Paris s'est prononcée sur la résiliation judiciaire du contrat de travail d'un salarié ayant subi une rétrogradation unilatérale et des agissements de harcèlement moral. Cette décision s'inscrit dans un contentieux relatif aux limites du pouvoir de direction de l'employeur et à la protection de la santé mentale des salariés.
Un salarié avait été engagé le 2 novembre 2010 en qualité d'attaché commercial grands comptes. Après plusieurs promotions, il occupait depuis le 1er juillet 2018 le poste de directeur régional des ventes. À compter de la rentrée 2019, son employeur a recruté un remplaçant et l'a progressivement démis de ses fonctions pour lui attribuer un poste subalterne de Key Account Manager. Le salarié n'a jamais signé l'avenant proposé le 15 juillet 2019. Placé en arrêt maladie le 12 novembre 2019 pour troubles anxio-dépressifs, il a été déclaré inapte le 6 janvier 2020 avec mention de l'impossibilité de tout reclassement. L'employeur l'a licencié pour inaptitude le 20 février 2020.
Entre-temps, le salarié avait saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 8 janvier 2020 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat. Par jugement du 4 novembre 2021, le conseil a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, déboutant le salarié de sa demande de résiliation judiciaire et de nullité. L'employeur a interjeté appel.
Devant la cour, le salarié sollicitait la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, produisant les effets d'un licenciement nul pour harcèlement moral. L'employeur contestait tout manquement et faisait valoir que le salarié avait lui-même souhaité évoluer vers un poste sans responsabilités managériales.
La question posée à la cour était de déterminer si les agissements de l'employeur consistant en une rétrogradation imposée sans l'accord du salarié et des méthodes managériales caractérisant un harcèlement moral justifiaient le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur.
La cour prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et dit qu'elle produit les effets d'un licenciement nul. Elle retient que la modification unilatérale des fonctions et responsabilités du salarié constituait une modification du contrat de travail nécessitant son accord, lequel n'a jamais été donné. Elle caractérise l'existence d'un harcèlement moral au regard de la rétrogradation humiliante, du turn-over important, des expériences négatives vécues par plusieurs salariés, des propos brutaux tenus par une responsable et de la dégradation de l'état de santé du salarié.
La résiliation judiciaire sanctionnant une modification unilatérale du contrat de travail mérite examen (I), tout comme la caractérisation du harcèlement moral fondant la nullité de la rupture (II).
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