Un arrêt rendu le 4 septembre 2025 par la chambre sociale de la cour d'appel de Rouen vient préciser les contours du droit à reclassification d'un salarié affecté temporairement à des fonctions supérieures, tout en rappelant les exigences probatoires strictes du travail dissimulé.
Un salarié avait été embauché en qualité de responsable des ventes, statut employé coefficient 165, à compter du 28 août 2020. Son employeur lui avait proposé de remplacer la responsable d'un autre magasin durant le congé maternité de cette dernière, du 8 février au 8 octobre 2021. Des lettres de mission furent établies mais jamais signées par le salarié, qui reprochait l'absence de précision sur la qualification, le salaire et les frais de déplacement. Le salarié fut licencié pour faute grave le 1er février 2022. Il saisit le conseil de prud'hommes de Louviers le 6 février 2023 en réclamant un rappel de salaire fondé sur une requalification au coefficient 190.
Le conseil de prud'hommes, par jugement du 13 juin 2024, fit droit à la demande de rappel de salaire, reconnut que le salarié aurait dû bénéficier du coefficient 190 et condamna l'employeur au titre du travail dissimulé ainsi qu'à des dommages et intérêts pour préjudice professionnel. L'employeur interjeta appel le 26 juin 2024, contestant tant la classification retenue que l'existence d'une dissimulation intentionnelle.
Le salarié soutenait avoir exercé les fonctions réelles de responsable de magasin dans un établissement employant une dizaine de salariés, ce qui justifiait selon lui l'application du coefficient 190. L'employeur rétorquait avoir versé une compensation financière au titre du remplacement et contestait que le salarié remplît les conditions conventionnelles requises, notamment la détention du certificat de qualification professionnelle.
La question centrale était double : d'une part, déterminer si un salarié affecté temporairement à des fonctions supérieures peut prétendre à la classification correspondante prévue par la convention collective ; d'autre part, apprécier si l'attribution d'une prime de remplacement en lieu et place du salaire conventionnel caractérise un travail dissimulé.
La cour d'appel de Rouen infirme partiellement le jugement. Elle accorde un rappel de salaire limité à 900 euros, correspondant à la différence avec le coefficient 185, mais rejette la demande fondée sur le coefficient 190 faute pour le salarié de justifier du diplôme requis. Elle écarte également la qualification de travail dissimulé en l'absence de caractérisation de l'élément intentionnel.
La reclassification temporaire du salarié, bien qu'admise, se trouve encadrée par les conditions conventionnelles strictes (I). L'échec de la démonstration du travail dissimulé illustre la rigueur probatoire exigée en la matière (II).
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