La mise en demeure en copropriété, un acte pas si anodin !

La mise en demeure est la première démarche amiable adressée par le créancier à son débiteur.

Sans formalisme particulier, cet acte n’est pourtant pas sans conséquences et notamment en matière de charges de copropriété au regard de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.

Rappelons que cet article prévoit qu’à défaut de paiement à sa date d'exigibilité d'une provision due au titre de l'article 14-1 (les provisions sur charges votées au titre du budget prévisionnel de l’exercice entier), et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues en application du même article 14-1 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles.

Le syndicat des copropriétaires pourra alors saisir le président du tribunal judiciaire qui statuera selon la procédure accélérée au fond.

Sur le principe, double avantage de cette disposition prévue à l’article 19-2 :

 

  • Toutes les provisions de l’exercice deviennent exigibles par anticipation
  • Une procédure judiciaire plus rapide

Oui, mais…

Encore faut-il que la mise en demeure soit mise en œuvre conformément aux textes.

Tel est l’éclairage apporté par la cour d’appel de Versailles dans l’arrêt du 5 décembre 2024 RG n° 24/01965.

Il a été jugé que la mise en demeure restée infructueuse permettant d'introduire une procédure accélérée au fond doit viser une provision exigible à la date de son envoi, et non l'intégralité de l'arriéré du compte du copropriétaire qui relève lui d'une procédure classique.

Or, dans cette affaire, la lettre de mise en demeure enjoignait au débiteur d'avoir à régler, sous délai de trente jours, la somme totale due au titre de l’arriéré de charges.

C’est bien là toute la subtilité de la procédure de l’article 19-2 : oui, la procédure accélérée au fond permet de réclamer au copropriétaire débiteur les provisions dues au titre de l'article 14-1, ainsi que les sommes restant dues lors des exercices précédents, à condition que la mise en demeure au sens de l’article 19-2 vise expressément la provision exigible due.

En cas de doute sur la rédaction de la lettre de mise en demeure 19-2, il faut s’interroger sur la pertinence de la stratégie à adopter :

  • engager quand même une procédure accélérée au fond (visiblement non !),
  • refaire une lettre de mise en demeure (oui, à condition que cela n’induise pas une confusion dans l’esprit du copropriétaire sur les sommes dues)
  • ou engager une procédure de droit commun classique (finalement, le moins risqué semble-t-il).

Une mise en demeure n’est assurément pas si simple que cela en copropriété…

Cour d'appel de Versailles 5 décembre 2024 RG n° 24/01965

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Nawal BELLATRECHE-TITOUCHE

Avocate spécialiste en droit immobilier

Formatrice en droit immobilier

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