Lorsqu’un salarié a été victime d'un accident du travail (AT), autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle (MP), son contrat de travail est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie (art. L.1226-7 al. 1 du code du travail).

Si l’employeur souhaite rompre le contrat de travail de ce salarié victime d’AT ou de MP au cours des périodes de suspension du contrat de travail, il ne peut rompre son contrat de travail que s'il justifie soit d'une faute grave du salarié, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie (art. L.1226-9 du code du travail).

 

Dans cette affaire du 20/11/2019, un salarié était souvent en absences injustifiées.

 

Son contrat de travail stipulait qu'en cas d'absence due à une maladie ou un accident, le salarié devait informer ou faire informer immédiatement son employeur et fournir dans un délai de 48 heures un avis d'arrêt de travail et des avis de prolongation éventuelle.

 

L’employeur lui avait notifié plusieurs avertissements pour absences injustifiées, le salarié n’ayant jamais contesté le bien-fondé de ces avertissements.

 

Le 22 mai 2014, nouvel avertissement, qui sera ensuite retiré après que le salarié eut adressé la justification de l'accident du travail, puisqu’en effet, le salarié fut placé en AT consécutivement à un accident du travail survenu le 21 mai 2014.

 

Puis, ce ne fut que le 12/09/2014 que l'employeur fut destinataire des avis de prolongations d'arrêts de travail courant à compter du 5 août 2014.

 

Entre-temps, le 03/09/2014, il fut licencié par son employeur pour absence injustifiée, plus précisément pour les motifs suivants, selon la lettre de licenciement :

 

« Malgré nos précédents courriers, vous êtes une nouvelle fois en absence injustifiée ce jour, car votre dernier arrêt de travail s'arrêtait au 5 août 2014. Votre attitude est négligente et préjudiciable, car cela fait plusieurs fois que vous ne vous présentez pas au travail sans motif et sans justificatif. Ceci est inadmissible et porte atteinte au bon fonctionnement de l'entreprise. Etant obligé de vous remplacer, nous vous signifions votre licenciement à réception de cette lettre ».

 

L’employeur justifiait-il d’une faute grave ?

 

Considérant que non, le salarié saisit la juridiction prud'homale de demandes au titre de la nullité de la rupture.

 

La cour d’appel rejeta ses demandes, aux motifs que la désinvolture du salarié parfaitement avisé par la clause contractuelle de l'importance qu'attachait son employeur à l'information et à la transmission des justificatifs d'absence, s'analysait comme un acte d'insubordination à travers la réitération volontaire d'un comportement sur lequel son attention avait été attirée à de nombreuses reprises, et qu'il savait préjudiciable à l'entreprise, que c'était donc à juste titre que l'employeur soutenait l'existence de la faute grave qui légitimait le licenciement prononcé pendant la période de suspension du contrat.

 

Sauf que pour la Cour de cassation, ce raisonnement était erroné : « alors qu'il résultait de son énonciation des termes de la lettre de licenciement que l'employeur ne reprochait pas au salarié une faute grave, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations.»

 

Plus clairement :

 

  • Si dans la lettre de licenciement il n’est pas expressément reproché la faute grave, alors il n’y a pas de faute grave ;
  • Il n’appartient pas aux juges du fond de rechercher cette qualification dans l’énoncé des termes de la lettre, et donc de se substituer à l’employeur ;
  • Donc, le licenciement du salarié prononcé pendant la période de suspension de son contrat de travail ne reposait pas sur une faute grave étrangère à l'accident du travail, et la cour d’appel ne pouvait le débouter des demandes formées de ce chef ;
  • On relèvera la sévérité de la Cour de cassation dans son raisonnement, puisque dans cette affaire, le salarié ne justifiant plus d’arrêts de travail entre le 05/08 et le 03/09, l’employeur en avait certainement déduit que le salarié n’était plus en périodes de suspension du contrat de travail.

 

 

Stéphane VACCA

Avocat au barreau de Paris

22, avenue de l'Observatoire - 75014 Paris

tél.:   +33.(0)9.67.39.51.62

fax.:  +33.(0)1.45.38.57.10

web: www.vacca-avocat.fr

blog: www.vacca-avocat-blog.com