Pour les juristes qui s’aventureraient ici, le titre de ce billet semblera un enfonçage de portes ouvertes, mais les ennuis récents rencontrés par un de mes contacts sur Twitter(1) m’ont donné l’idée de ce billet.
Il y a quelque temps, Monsieur X. a déménagé. Tout s’est bien passé avec son bailleur, avec les déménageurs, les nouveaux voisins et Monsieur X. est heureux. Lors de son départ, Monsieur X. a contacté par téléphone l’un de ses fournisseurs d’énergie pour l’informer de son départ et donc, pensait-il, de la fin de son abonnement puisqu’il ne va plus habiter là. Pas de problème lui a-t-on dit.
Quelle ne fut donc pas sa surprise de recevoir, plusieurs mois après (il avait sans doute fait suivre son courrier, ou le prestataire l’a retrouvé via son nouvel abonnement) des factures et demandes de paiement concernant l’abonnement de son précédent logement.
Monsieur X. tente bien de démontrer au fournisseur que la consommation facturée ne peut lui être imputable puisqu’il a quitté l’appartement, le fournisseur lui rétorque qu’il ne trouve pas trace de sa résiliation et que, l’abonnement étant toujours à son nom, il doit payer.
Quand je lis ça, je me dis que l’enseignement secondaire devrait inclure des bases de droit, car voyez-vous, le droit est partout et le méconnaître c’est s’exposer à bien des déboires dans sa vie quotidienne (les mauvaises langues me répondront que ça fait vivre les avocats, certes, mais croyez moi, je préfère largement les baux commerciaux au droit de la consommation).
J’ignore ce qui n’a pas fonctionné dans le cas de Monsieur X., sans doute un problème de saisie informatique ou une mauvaise compréhension de la part de son interlocuteur lors de son appel, mais il en résulte que le contrat n’a pas été résilié et que les factures son dues par Monsieur X. (Aïe !).
Donc, voici ce que Monsieur X. aurait dû faire : envoyer au prestataire une résiliation par lettre recommandée avec avis de réception. C’est tout mais c’est juste indispensable, même si le prestataire vous dit que c’est inutile puisque vous avez téléphoné…
En effet, un abonnement à l’eau, au gaz ou à l’électricité, s’il est conclu pour un point de fourniture, est surtout conclu avec un abonné (vous, comme Monsieur X.) dont le nom figure sur le contrat.
Il s’agit d’un type de contrat que le droit qualifie de (i) « synallagmatique », (ii) « à exécution successive » et (iii) « à durée indéterminée » ; je vais vous épargner les explications de tous ces termes, retenez juste que ce contrat ne prendra fin que si l’une des parties le décide et en informe l’autre.
Le plus souvent, c’est une décision prise par l’abonné qui déménage (ou, quand c’est possible, change de fournisseur) : lorsque le prestataire coupe le fluide pour défaut de paiement, si le paiement a lieu ensuite, le service est rétabli et le contrat se poursuit.
Mais décider de résilier et en informer le cocontractant ne suffit pas, il faut en conserver une preuve écrite(2), c'est pourquoi la résiliation par téléphone est un leurre. (La souscription ou la modification de contrat par téléphone –les opérateurs de téléphonie mobile sont des champions du genre- pose aussi des problèmes mais c’est un autre sujet).
Certes, l’envoi et la réception d’une lettre recommandée avec avis de réception peuvent poser aussi quelques soucis, mais en l’occurrence, il faut absolument utiliser ce moyen à titre de preuve (recourir à un acte d’huissier paraîtrait un poil excessif).
J’ajouterai qu’il faut résilier par lettre recommandée avec avis de réception TOUS vos contrats de prestations (eau, gaz, électricité, téléphone fixe) liés à l’appartement que vous quittez dès lors qu’ils étaient à votre nom, même s’il reste un ou des occupants tels que ex-conjoint (ex-pacsé, concubin ou autre) ou ex-colocataire, car sinon ceux-ci pourraient bien profiter desdites prestations à vos frais puisque le prestataire ne les connait pas.
La seule exception, à ma connaissance, concerne les contrats pour les « box » internet : les opérateurs ont prévu des procédures pour poursuivre l’abonnement à la nouvelle adresse (sous réserve que vous le souhaitiez et que cela soit techniquement possible), il faut les contacter environ 15 jours avant le déménagement et dans ce cas, vous pouvez tout faire par internet et téléphone puisque le contrat ne sera pas rompu.
A noter que le (remarquable)(3) site officiel de l’Administration française http://www.service-public.fr/ détaille ici http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F14128.xhtml les diverses démarches pré et post déménagement et même ici http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/R11193.xhtml un moyen d’informer certains services et prestataires de votre changement d’adresse.
(1) Si vous n’avez pas de compte Twitter, à mon avis, vous vous privez de bon échanges, mais c’est vous qui voyez.
(2) En application de l’article 1353 (anciennement 1315) du Code civil :
« Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. »
(3) Je râle souvent contre les diverses administrations donc, lorsqu’un service est bien il faut le reconnaitre.
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