Le bail est un élément essentiel à l’activité de – presque – toutes les entreprises.
C’est pourquoi la préservation de celui-ci est indispensable à leur survie, en particulier en cette période de crise sanitaire dont il est d’ores et déjà annoncé qu’elle se prolongera en une crise économique d’une ampleur sans précédent depuis la dernière guerre mondiale.
Conscient de ce qui précède, le gouvernement a prévu un mécanisme de « protection » du bail en cas d’impossibilité pour les locataires de payer les loyers pendant la période de crise sanitaire.
Nous ne reviendrons pas sur ce mécanisme, qui a fait l’objet de très nombreux articles et commentaires.
En revanche, les critères pour bénéficier de ce dispositif, beaucoup plus restrictifs que ce qui avait été annoncé au départ par le gouvernement, excluent de celui-ci de très nombreuses TPE-PME.
Quelles solutions alors pour ces entreprises ?
De nombreux auteurs ont envisagé d’invoquer la force majeure ou la théorie de l’imprévision.
À notre sens, il s’agit d’un pari juridique risqué dès lors qu’à ce jour, pour la Cour de Cassation :
- d’une part les obligations de sommes d’argent - donc à paiement – ne peuvent relever de la force majeure;
- d’autre part une épidémie, aussi nouvelle qu’inattendue soit-elle, ne constitue pas un cas de force majeure (ainsi qu'elle l'a déjà jugé pour le H1N1 ou le Chikungunya).
Quant à la théorie de l’imprévision, il faudrait de véritables contorsions juridiques – certes toujours possibles, le droit et son application par les tribunaux réservant parfois de grandes surprises – pour trouver à l’appliquer.
Ainsi la prudence commande de considérer qu’il ne sera pas possible de s’en prévaloir.
Que reste-t-il alors à cet entrepreneur privé d’activité depuis plusieurs semaines, qui n’a pas encaissé les revenus afférents, et n’a donc pu matériellement s’acquitter de son loyer ?
La négociation avec son bailleur, répondent d’autres auteurs.
Certes, cela est toujours possible, mais ce n’est pas le cas le plus fréquent.
Les bailleurs ont souvent, eux aussi, des obligations financières (prêt, complément de retraite…) qui ne leur permettent pas d’accorder de suspension de loyers.
Mais il est encore deux procédures qui, si elles peuvent faire peur dans une première approche, procurent une véritable bouffée d’oxygène à l’entreprise, non seulement concernant le bail, mais également s’agissant de ses autres dettes.
Il s’agit du redressement judiciaire et de la sauvegarde.
En effet, en application de l’article L622-21 du code de commerce : « Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers (…) tendant (…) 2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent »
Ainsi, l’entreprise en procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ne peut voir son bail être résilié pour défaut de paiement de loyers antérieurs au jour du jugement d’ouverture de la procédure collective (Cass civ 3ème 18 septembre 2012 n°11-19571 ; Cass com 15 novembre 2016 n°14-25767).
Ce jugement paralyse même le jeu de la clause résolutoire, y compris si une décision du juge des référés a été rendue, tant que cette dernière n’est pas passée en force chose jugée, c’est-à-dire si une voie de recours a été exercée à son encontre ou peut encore l’être (Cass com 15 févr. 2011 n° 10-12747).
Tel n’est pas le cas en présence d’une mesure de conciliation ou d’un mandat ad hoc, qui n’ont pas d’effet suspensif sur les clauses résolutoires pour défaut de paiement de sommes d’argent.
Pour rappel, la procédure de sauvegarde est ouverte à tout débiteur qui « sans être en cessation des paiements, justifie de difficultés qu'il n'est pas en mesure de surmonter » (article L620-1 du code de commerce).
Le redressement judiciaire, quant à lui, s’applique aux entreprises qui sont en état de cessation des paiements, c’est-à-dire dans l’impossibilité de faire face à leur passif exigible avec leur actif disponible (trésorerie et réserves de crédit).
Son bénéfice doit être sollicité dans le délai de 45 jours à compter de la constatation de cet état (sous réserve des dispositions particulières à la période d’état d’urgence sanitaire).
Ces deux procédures permettent en outre au débiteur de présenter un plan d’apurement de ses dettes antérieures sur 10 ans maximum, sans intérêts autres que ceux des prêts de plus d’un an en cours.
En conséquence, en présence d’une activité susceptible de reprendre après la fin de la période de confinement, le recours à une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire afin de préserver le bail, à défaut d’autre solution, ne doit pas être négligé.
Les avocats du cabinet OCTAAV se tiennent à votre disposition pour vous accompagner en ce sens, et aider ainsi votre entreprise à surmonter cette période de crise.
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