En cas de harcèlement dénoncé par un(e) salarié(e), l’enquête interne est-elle obligatoire ?

NON, la cour de cassation vient de juger que ce n’est pas une obligation. Il suffit que « l’employeur ait pris les mesures suffisantes de nature à préserver la santé et la sécurité de la salariée » (Cass. Soc. 12 juin 2024, n° 23-13.975)

Néanmoins, l’enquête interne est vivement recommandée car elle a vocation à aider l’employeur à vérifier la véracité des faits dénoncés, permettre de qualifier les faits au sens juridique du terme et déterminer si une action disciplinaire est nécessaire.

Elle permet également à l'employeur de recueillir des témoignages ou d'autres preuves, qui pourront ensuite être utilisés en justice et qui permettent de justifier la pertinence et la proportionnalité des mesures prises à l’égard des salariés concernés par les faits. (Cass. Soc. 29 juin 2022 n°21-11437)

L’enquête permet également à l’employeur de respecter son obligation de prévention des risques professionnels, en montrant que la Direction a pris la situation au sérieux (article L.4121-1 du Code du travail – Cass. Soc. 6 juillet 2022 n°21-13631)

En cas de contentieux, les employeurs qui n’ont pas mené d'enquête interne ou qui l’ont fait trop tard peuvent être considérés comme ayant manqué à leurs obligations, justifiant ainsi la rupture du contrat de travail à leurs torts exclusifs.

Qui doit prouver quoi ?

Selon l’article L. 1154-1 du code du travail, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse (l’employeur) de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

L’enquête interne se pratique sans réel cadre normatif

Le plus souvent, au regard des risques encourus, une enquête interne à l’entreprise est menée. Chaque employeur se débrouille souvent avec « les moyens du bord ». Il peut cependant s’appuyer sur :

- le guide du ministère du travail intitulé « Harcèlement sexuel et agissements sexistes au travail : prévenir, agir, sanctionner » (mars 2019)

- le guide du défenseur des droits : « Le harcèlement discriminatoire au travail »

- le règlement intérieur (Depuis le 1er janvier 2020, l'établissement d'un règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises ou établissements employant au moins 50 salariés pendant douze mois consécutifs),

- la charte éthique ou le code de bonnes conduites, le cas échéant lorsqu’ils existent.

Le rapport d’enquête doit il être transmis au salarié ?

NON, selon le guide ministériel, même si certaines juridictions peuvent considérer que c’est nécessaire (CA Paris, pôle 1 ch.5, 18 janvier 2024, n° 23/15208).

Le rapport pourra être transmis, ou non, à l’ensemble des parties prenantes (Cass. soc, 18 février 2014 n°12-17.557 (le salarié considéré comme auteur des faits n’ayant aucun droit à obtenir la communication de pièces justifiant les reproches qui lui sont faits, y compris au stade de l’entretien préalable)

Qui peut être désigné comme enquêteur ?

L’employeur peut désigner un ou des salariés de son entreprise ou recourir à des conseils externes (avocat, consultant, psychologue).

Dans tous les cas de figure il faut réagir vite et il faut respecter les principes de :

- confidentialité

- neutralité et impartialité

- loyauté

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