Exception d'inexécution relative à l'absence de levée de réserve

 

Cour de cassation - Chambre civile 3

  • N° de pourvoi : 22-22.800
  • ECLI:FR:CCASS:2025:C300324
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Rejet

Audience publique du jeudi 26 juin 2025

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, du 15 septembre 2022

Président

Mme Teiller (président)

Avocat(s)

SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CC



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 26 juin 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 324 F-D

Pourvoi n° N 22-22.800




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 JUIN 2025

Mme [D] [I], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 22-22.800 contre l'arrêt rendu le 15 septembre 2022 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant à la société FL [Localité 3], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bironneau, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [I], de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société FL [Localité 3], après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Bironneau, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,





la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 septembre 2022), Mme [I] a conclu avec la société FL [Localité 3] un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans.

2. Mme [I] ayant refusé de procéder aux opérations de réception et de régler le solde des travaux, la société FL [Localité 3] l'a assignée en paiement du solde de ses factures.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [I] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société FL [Localité 3] la somme de 33 148,60 euros au titre du solde des travaux, alors :

« 1°/ que le juge ne doit pas méconnaître les termes du litige ; qu'en l'espèce, la cour a confirmé le jugement qui avait condamné Mme [I] à payer à la société FL [Localité 3] la somme de 33 148,60 euros au titre du solde des travaux en retenant qu'elle demandait "dans le dispositif de ses conclusions de voir débouter la société FL [Localité 3] de sa demande de condamnation des intérêtscontractuels à 1 % ainsi que de leur capitalisation" et "fait plaider qu'au cas où la cour fixerait une date de réception judiciaire antérieure à son arrêt elle serait fondée à opposer l'exception d'inexécution", avant d'ajouter qu'"il ne sera donc statué, par application de l'article 954 du code de procédure civile, que sur les intérêts et leur capitalisation et non sur le paiement du solde des travaux" ; qu'en se déterminant de la sorte quand, dans le dispositif de ses conclusions, Mme [I] avait demandé à la cour de réformer le jugement en ce qu'il l'avait condamnée à payer à la société FL [Localité 3] la somme de 33 148,60 euros avec intérêts au taux de 1 % par mois à compter du 15 août 2016 au titre du solde des travaux restant dû, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°/ que le solde du prix des travaux n'est dû qu'à compter de la levée des réserves ; qu'en l'espèce, la cour a confirmé le jugement qui a condamné Mme [I] à payer le solde des travaux, tout en constatant que les réserves n'avaient pas été levées ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation ;

3°/ que l'obligation de résultat de l'entrepreneur persiste, pour les désordres ayant fait l'objet de réserves à la réception, jusqu'à la levée de ces réserves, de sorte qu'en l'absence de levée, le maître d'ouvrage est fondé à lui opposer l'exception d'inexécution ; qu'en l'espèce, la cour a jugé que la réception étant intervenue, Mme [I] ne pouvait opposer l'exception d'inexécution que pour la retenue de garantie ; qu'en se déterminant ainsi, tout en ayant constaté que la réception était assortie de réserves qui n'avaient pas été levées, de sorte que Mme [I] était fondée à opposer l'exception d'inexécution pour s'opposer au règlement des sommes restant dues et non pas seulement du montant de la retenue de garantie, elle a violé l'article 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article 954 du code de procédure civile, dans les procédures avec représentation obligatoire, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquelles chacune de ces prétentions est fondée, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

6. Ayant relevé que, dans le dispositif de ses conclusions, Mme [I] se bornait à demander à la cour d'appel de réformer la décision entreprise, sans formuler aucune prétention relative à la demande de la société FL [Localité 3] en paiement du solde des travaux restant dû, c'est par une exacte application du texte précité et sans modifier l'objet du litige que la cour d'appel a retenu qu'elle n'était saisie d'aucune prétention de Mme [I] quant au paiement du solde des travaux.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

8. Mme [I] fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société FL [Localité 3] les intérêts de 1 % à compter du 15 août 2016, sur la somme de 26 274,88 euros, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, alors :

« 1°/ que la cassation de l'arrêt en ce qu'il a confirmé le jugement qui a condamné Mme [I] à payer la somme de 33 148,60 euros au titre du solde des travaux entraînera par voie de conséquence sa censure en ce qu'il l'a également condamnée à payer des intérêts calculés sur une somme correspondant au montant du solde des travaux, déduction faite de la retenue de garantie, par application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°/ que l'obligation de résultat de l'entrepreneur persiste, pour les désordres ayant fait l'objet de réserves à la réception, jusqu'à la levée de celles-ci, de sorte que tant que les réserves ne sont pas levées, le maître d'ouvrage est fondé à lui opposer l'exception d'inexécution ; qu'en l'espèce, la cour a jugé que la réception étant intervenue, Mme [I] ne pouvait opposer l'exception d'inexécution que pour la retenue de garantie et en a déduit qu'elle devait payer des intérêts au taux de 1 % à compter du 15 août 2016 calculé sur le montant du solde du marché, après déduction de la retenue de garantie ; qu'en se déterminant ainsi, quand elle constatait que la réception était assortie de réserves qui n'avaient pas été levées, de sorte que Mme [I] étant fondée à opposer l'exception d'inexécution pour s'opposer au règlement des sommes restant dues et des intérêts afférents, et non pas seulement du montant de la retenue de garantie, la cour a violé l'article 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

9. Ayant retenu que, dans le dispositif de ses conclusions, Mme [I] se bornait à demander à la cour d'appel de réformer la décision entreprise, sans formuler aucune prétention relative à la demande de la société FL [Localité 3] en paiement du solde des travaux restant dû, la cour d'appel en a exactement déduit que Mme [I] n'était fondée à opposer l'exception d'inexécution relative à l'absence de levée de la réserve pour les travaux de confortement du talus qu'à hauteur du montant de la retenue de garantie.

10. Le moyen, sans portée en ce qui concerne le grief d'une annulation par voie de conséquence, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [I] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-six juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par M. Boyer, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mme Teiller, président empêché, le conseiller rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300324

Publié par ALBERT CASTON à 10:47  

Envoyer par e-mail BlogThis! Partager sur X Partager sur Facebook Partager sur Pinterest

Libellés : réception réserves