Séduits par la promesse de taux d’intérêt suisses que la banque vantait comme avantageux, de nombreux emprunteurs frontaliers ont souscrit, au cours des dernières années, des prêts libellés en francs suisses pour financer un bien immobilier situé en France.
Mais derrière cette apparente opportunité (d'ailleur contestable) se cachait un risque majeur : celui du change. Les banques ont souvent fait miroiter une stabilité et un coût de financement réduits, sans que ces avantages ne se vérifient dans la durée.
Les formes concrètes d’exposition au risque de change pour le frontalier
Le risque de change est une réalité souvent sous-estimée par les emprunteurs frontaliers ayant contracté un prêt immobilier libellé en francs suisses (CHF) pour financer un bien situé en France. Si, à l’origine, l’opération pouvait sembler avantageuse en raison des taux d’intérêt suisses historiquement bas, la réalité s’est souvent révélée bien différente : ces conditions attractives étaient théoriques et trompeuses, car les fluctuations du taux de change euro/CHF ont, dans bien des cas, anéanti les bénéfices attendus.
Changement de situation professionnelle
Lorsqu’un salarié frontalier est licencié ou muté hors de Suisse, il perd ses revenus en francs suisses tout en conservant une dette dans cette devise. Dès lors, le remboursement du prêt devient plus coûteux : il faut convertir ses revenus désormais perçus en euros en francs suisses, souvent à un taux défavorable. Cette conversion obligatoire fait peser une charge financière accrue sur le foyer, d’autant plus en période d’affaiblissement de l’euro. Le convertisseur monétaire devient alors un véritable goulet d’étranglement, exposant l’emprunteur à une perte de pouvoir d’achat immédiate.
Vente ou transmission du bien financé
Autre situation fréquente : la cession du bien immobilier. Le logement, situé en France, sera vendu en euros. Cependant, le crédit restant dû demeure libellé en francs suisses ; pour solder le prêt, il faut donc reconvertir le produit de la vente. Si la parité euro/CHF s’est détériorée depuis la signature du contrat, la somme obtenue en euros ne suffira pas à rembourser l’intégralité du capital restant dû, entraînant une perte de change et réduisant, voire annulant, toute plus-value potentielle. Ce risque se matérialise concrètement au moment où l’emprunteur souhaite sortir du crédit.
Location du bien et déséquilibre structurel
Nombre de biens financés en francs suisses sont mis en location en France. Les loyers sont naturellement perçus en euros tandis que les mensualités du prêt restent exigibles en francs suisses. Ce désalignement monétaire expose le propriétaire à une double contrainte : il doit convertir ses loyers pour honorer les échéances, tout en subissant les variations défavorables du taux de change. En cas de baisse de l’euro, la rentabilité locative réelle s’effondre ; le gain prévu à la signature peut se transformer en perte, voire en situation de déficit chronique. Les charges liées au bien – fiscalité, entretien, assurance, gestion – étant également en euros, le risque de change devient un facteur structurel d’appauvrissement.
Les recours possibles pour les emprunteurs
Face à ces déséquilibres, les emprunteurs ne sont pas dépourvus de recours.
Avec l’assistance d’un avocat, il est désormais possible de saisir les tribunaux afin de contester la validité du prêt ou d’obtenir réparation du préjudice subi.
La jurisprudence de la Cour de cassation du 9 juillet 2025 constitue à cet égard un tournant majeur :
Cette décision ouvre la voie à l’annulation de certains contrats de prêt permettant ainsi aux emprunteurs lésés de retrouver un équilibre financier et juridique plus juste.
Pas de contribution, soyez le premier