NON : dans un arrêt en date du 29 novembre 2023, le Conseil d’Etat considère que lorsqu’en revanche le fonctionnaire territorial, soit à l’expiration de la période pendant laquelle il a été placé en détachement, soit au cours de sa période de réintégration en surnombre, refuse un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d’origine, il est placé en position de disponibilité d’office et ne peut alors prétendre, au bénéfice de l’allocation d’assurance instituée par l’article L. 5422-1 du code du travail dès lors qu’il ne peut être regardé comme ayant été involontairement privé d’emploi, à moins qu’il ne justifie son refus par un motif légitime.


Il résulte de l’article 67 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, désormais repris à l’article L. 513-24 du code général de la fonction publique (CGFP), et de l’article 10 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 que la réintégration d’un fonctionnaire territorial est de droit à l’issue d’une période de détachement, ou à son terme initialement prévu s’il y a mis fin de manière anticipée sans que sa réintégration soit intervenue à cette date, et qu’il doit se voir proposer la première vacance ou création d’emploi dans un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d’origine.

Lorsqu’aucun emploi n’est vacant, il appartient à sa collectivité d’origine de le maintenir en surnombre pendant une durée d’un an dans les conditions prévues à l’article 97 de la loi du 26 janvier 1984, désormais repris aux articles L. 542-4 et L. 542-5 du CGFP, c’est-à-dire en lui proposant en priorité tout emploi créé ou vacant en son sein correspondant à son grade, en étudiant la possibilité en son sein de le détacher ou de l’intégrer directement sur un emploi équivalent d’un autre cadre d’emplois et en examinant, en même temps que le font également la délégation régionale ou interdépartementale du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et le centre de gestion, les possibilités de reclassement.

A l’expiration de cette durée d’un an, au cours de laquelle l’agent conserve une rémunération correspondant à son indice, l’agent est pris en charge, toujours dans les conditions prévues à l’article 97 de la même loi, désormais repris aux articles L. 542-6 et suivants du CGFP, selon le cas, par le CNFPT ou par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité ou l’établissement qui l’employait antérieurement à son détachement, qui exerce à son égard toutes les prérogatives reconnues à l’autorité investie du pouvoir de nomination.

Pendant cette période de prise en charge, il reçoit une rémunération et se voit proposer tout emploi vacant correspondant à son grade.

L’agent qui relève, dans les conditions ainsi rappelées, d’une prise en charge, soit par sa collectivité ou son établissement d’origine, soit par le centre de gestion ou le CNFPT, ne saurait prétendre au bénéfice de l’allocation d’assurance instituée par l’article L. 5422-1 du code du travail.

Lorsqu’en revanche le fonctionnaire territorial, soit à l’expiration de la période pendant laquelle il a été placé en détachement, soit au cours de sa période de réintégration en surnombre, refuse un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d’origine, il est placé en position de disponibilité d’office et ne peut alors prétendre, au bénéfice de l’allocation d’assurance instituée par l’article L. 5422-1 du code du travail dès lors qu’il ne peut être regardé comme ayant été involontairement privé d’emploi, à moins qu’il ne justifie son refus par un motif légitime.

Agent d’un centre communal d’action sociale (CCAS) placé en détachement ayant, à l’expiration de la période initialement prévue, refusé plusieurs emplois correspondant à son grade qui étaient vacants au sein de la commune dont dépendait le CCAS.

S’il est vrai que le CCAS est, en vertu de l’article L. 123 6 du code de l’action sociale et des familles (CASF), un établissement public, distinct de la commune, il résulte de ces dispositions et des autres dispositions de ce code qui le régissent, notamment les articles L. 123-4, L. 123-8 et R. 123-23, qu’il est obligatoirement créé dans toute commune d’au moins 1 500 habitants, la commune pouvant en exercer directement les attributions dans les communes plus petites, que son conseil d’administration est présidé par le maire, qui en nomme certains membres ainsi que le directeur, et que certaines de ses délibérations sont soumises à l’avis ou à l’avis conforme du conseil municipal.

Dans ces conditions particulières, la proposition faite, à un agent d’un CCAS, pour l’application de l’article 67 de la loi du 26 janvier 1984, d’un emploi correspondant à son grade relevant de la commune doit être regardée comme permettant d’assurer à l’intéressé le respect de son droit à se voir proposer un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d’origine.

SOURCE : Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 29/11/2023, 470421

JURISPRUDENCE :

S’agissant d’un agent ayant sollicité sa réintégration de droit à l'issue d'une mise en disponibilité pour convenances personnelles, dont la demande a été rejetée pour absence de poste vacant et qui n'a reçu aucune proposition de reclassement de la part du CNFPT ou du centre de gestion, CE, 28 juillet 2004, Office public d'aménagement et de construction Sarthe habitat, n° 243387, T. pp. 748-901 :

«  Il résulte des dispositions combinées des articles L. 351-1, L. 351-3 et L. 351-12 du code du travail, d'une part, et des articles 73 et 97 de la loi du 26 janvier 1984, d'autre part, que les agents non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires de collectivités territoriales et les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ont droit aux allocations d'assurance chômage dès lors qu'aptes au travail, ils peuvent être regardés comme ayant été involontairement privés d'emploi et à la recherche d'un emploi. Un agent titulaire des services territoriaux d'un office public d'aménagement et de construction ayant sollicité sa réintégration, qui était de droit, à l'issue d'une période de mise en disponibilité pour convenances personnelles, dont la demande a été rejetée faute de poste vacant et qui n'a reçu, du centre national de la fonction publique territoriale ou du centre de gestion locale, aucune proposition en vue de son reclassement dans un emploi vacant correspondant à son grade, doit être regardé comme ayant été non seulement involontairement privé d'emploi mais aussi à la recherche d'un emploi, au sens de l'article L. 351-1 du code du travail. »

S’agissant d’un refus de renouvellement de contrat à durée déterminée, CE, 2 avril 2021, Mme Calvache, n° 428312, T. pp. 750-955 :

« Pour l'application des articles L. 5421-1 et L. 5424-1 du code du travail, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de déterminer si les circonstances dans lesquelles un contrat de travail à durée déterminée (CDD) n'a pas été renouvelé permettent de l'assimiler à une perte involontaire d'emploi. A ce titre, et ainsi que le prévoit désormais le décret n° 2020-741 du 16 juin 2020, l'agent qui refuse le renouvellement de son contrat de travail ne peut être regardé comme involontairement privé d'emploi, à moins que ce refus soit fondé sur un motif légitime, qui peut être lié notamment à des considérations d'ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle et sans justification par l'employeur. Agent n'ayant pas demandé le renouvellement de son contrat pour des considérations d'ordre personnel, tenant à sa séparation d'avec son conjoint, à son déménagement et aux nécessités de la garde de ses enfants. Dans les circonstances de l'espèce, ces considérations constituent un motif légitime pour ne pas demander le renouvellement de son CDD d'une durée de trois mois. »

S’agissant d’une démission, CE, 1 octobre 2001, Commune de Bouc-Bel-Air, n° 215499, p. 451 :

« Il résulte des dispositions de l'article L. 351-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 21 mars 1984, de l'article L. 351-8 du même code et de l'article L.351-12, dans sa rédaction résultant de la loi du 30 juillet 1987, que le régime des allocations auxquelles ont droit les agents des collectivités locales involontairement privés d'emploi est défini par les stipulations de l'accord prévu à l'article L. 351-8, dès lors qu'un tel accord est intervenu et a été agréé et qu'il n'est pas incompatible avec les règles qui gouvernent les agents publics. Par arrêté du 1er janvier 1994, le ministre de l'emploi a agréé la convention du 1er janvier 1994 relative à l'assurance chômage et le règlement annexé à cette convention. En vertu dudit règlement, les salariés qui ont démissionné pour un motif reconnu légitime par la commission paritaire de l'ASSEDIC sont assimilés aux travailleurs involontairement privés d'emploi et bénéficiant des prestations de l'assurance chômage. Par délibération du 11 janvier 1994, la commission paritaire nationale a décidé que devait être regardé comme ayant démissionné pour un motif légitime le salarié qui rompt son contrat de travail et dont le départ s'explique par un prochain mariage dès lors que moins de deux mois s'écoulent entre la date de fin d'emploi et la date du mariage. Toutefois, s'agissant de la démission d'un agent public, il appartient à l'autorité administrative compétente d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les motifs de cette démission permettent d'assimiler celle-ci à une perte involontaire d'emploi (1). Démission de ses fonctions de rédacteur territorial d'une commune présentée par la requérante afin de rejoindre, en vue de son prochain mariage, son compagnon qui résidait dans une autre région. Dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce changement de résidence ait été motivé par des raisons autres que les convenances personnelles des deux futurs époux, l'intéressée ne pouvait être regardée comme involontairement privée d'emploi et légalement prétendre au bénéfice des allocations d'assurance chômage. »

S’agissant d’un refus de conclure un CDI, CE, 8 novembre 2019, Ministre de l'éducation nationale c/ Mme Leodice, n° 408514, T. pp. 802-961-105 :

« L'agent mentionné à l'article L. 5424-1 du code du travail, qui refuse la transformation de son contrat à durée déterminée (CDD) en contrat à durée indéterminée (CDI), ne peut être regardé comme involontairement privé d'emploi, à moins que ce refus ne soit fondé sur un motif légitime. Un tel motif peut être lié notamment à des considérations d'ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle par l'employeur sans justification. Professeur contractuel de l'enseignement secondaire, dont le CDD prévoyait l'affectation dans un unique établissement, s'étant vue proposer un CDI qui stipule qu'elle exercerait ses fonctions dans le ressort de l'académie de Grenoble et que son affectation serait déterminée et modifiée par le recteur compte tenu des besoins du service. Le tribunal administratif n'a pas inexactement qualifié les faits en jugeant que cette extension du périmètre au sein duquel l'intéressée était susceptible d'être, à l'avenir, appelée à exercer ses fonctions constituait une modification substantielle de son contrat. Toutefois, le tribunal administratif a inexactement qualifié les faits de l'espèce en estimant que la modification du contrat de l'intéressée n'était pas justifiée par le recteur de l'académie de Grenoble et en en déduisant que le refus de l'intéressée reposait sur un motif légitime permettant de la regarder comme involontairement privée d'emploi, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que cette modification était nécessaire compte tenu des conditions d'emploi des professeurs sous CDI, lesquels ont vocation à enseigner dans l'ensemble des établissements du ressort de l'académie en fonction des besoins du service.  Dès lors, le refus de l'intéressée de conclure le CDI qui lui a été proposé ne peut être regardé comme reposant sur un motif légitime, bien que son refus ait été motivé par la modification substantielle de son contrat, celle-ci étant, en l'espèce, justifiée par les besoins du service. En conséquence, elle ne peut être regardée comme involontairement privée d'emploi et ne saurait, par suite, prétendre au bénéfice de l'allocation d'assurance pour perte d'emploi. Les appréciations portées, d'une part, sur le caractère substantiel de la modification d'un contrat de travail, d'autre part, sur caractère justifié de cette modification, caractères qui constituent les conditions pour que le refus de transformation du contrat à durée déterminée d'un agent public en contrat à durée indéterminée, en application de l'article 8 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, soit regardé comme fondé sur un motif légitime et que cet agent puisse dès lors être regardé comme involontairement privé de d'emploi au sens de l'article L. 5422-1 du code du travail, font l'objet d'un contrôle de qualification juridique des faits de la part du juge de cassation. »