Le bailleur peut délivrer, pour lui-même, ou pour son conjoint, ou son partenaire lié par un PACS, ou encore un de ses enfants majeurs, un congé-reprise pour exploiter (article L 411-58 du code rural et de la pêche maritime).

Une fois son congé validé (toutes conditions étant satisfaites), le bénéficiaire de la reprise peut être amené à patienter encore lorsque le preneur est :

  • soit à moins de 5 ans de l’âge auquel il peut prétendre à la retraite agricole,
  • soit à moins de 5 ans de l’âge lui permettant de bénéficier de la retraite à taux plein,

En effet, dans cette situation, le fermier peut s’opposer à la reprise et le bail est alors prorogé (de plein droit) pour une durée égale à celle qui doit lui permettre d’atteindre l’âge correspondant.

Si le bailleur souhaite reprendre le bien loué à la fin de la période de prorogation, le texte ajoute qu'il doit, de nouveau, délivrer un congé dans les conditions de l’article L 411-47. Ce second congé doit donc être délivré pour la fin de la période de prorogation.

Il convient de rappeler que l'article L 411-47 impose que tout congé (y compris, bien entendu, le second congé) doit être délivré au moins 18 mois avant sa date d'effet.

Ce qui peut aboutir à des situations ubuesques. Ainsi, si à la date d'effet du congé-reprise, le preneur se trouve à moins de 18 mois (de l'âge auquel il peut bénéficier de la retraite agricole, ou de la retraite à taux plein, le cas échéant) et si ce dernier s'oppose à la reprise (immédiate), le bailleur est alors dans l'impossibilité de délivrer le second congé, le délai légal ne pouvant être respecté. De sorte que, dans ce cas de figure, le bail se renouvelle pour une durée de 9 ans, malgré la validité du congé-reprise.

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité le 15 décembre 2021, le Conseil constitutionnel a décidé le 11 mars 2022 que cette disposition portait au droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi (garantir la continuité des exploitations agricoles en s'assurant qu'à l'issue de la période de prorogation, le bailleur souhaite toujours reprendre son bien en vue de l'exploiter et remplit les conditions pour le faire). Décision n° 2021-978.

Tirant les conséquences de cette déclaration d'inconstitutionnalité, le Conseil abroge l'alinéa 3 de l'article L 411-58, mais reporte cette abrogation à la date au 31 décembre 2022.

Ce report de la date d'abrogation ne s'applique toutefois pas lorsque le bailleur se trouve dans la situation particulière évoquée plus haut (durée de prorogation du bail inférieure à 18 mois).

Une décision bienvenue qui apportera une plus grande sécurité juridique aux relations entre bailleurs et preneurs.