L'appréhension de nouvelles pratiques et nouveaux usagers par le droit de l'urbanisme n'est pas chose facile. Après la location courte durée de type AirBNB, les "dark-stores", c'est désormais au co-living que les juges doivent s'intéresser.

Dans cette affaire, le Maire de la commune avait refusé la délivrance d'un permis de construire modificatif portant sur la création de 9 logements en lieu et place de 3 logement, compte-tenu de ce que, d'après lui, les règles du plan local d'urbanisme relatives aux places de stationnement n'étaient pas respectés.

Le pétionnaire conteste cette décision du Maire devant le Tribunal Administratif, qui lui donne raison. Le Maire saisi la Cour administrative d'appel, qui va au contraire confirmer la position du Maire. La Cour se livre à une appréciation factuelle et concrète de la distribution des logements pour déterminer si une chambre de co-living constitue un logement a proprement parler :

"5. Il ressort des pièces du dossier que les maisons mitoyennes construites par la SNC Atroom au 36 et 36 bis rue Despagnet sont destinées à la colocation ou " coliving ", avec conclusion d'un bail distinct pour chaque locataire. Les services de la mairie se sont rendus sur place les 31 juillet et 26 août 2019 et ont notamment constaté que la plupart des chambres étaient équipées de salle d'eau et de toilettes individuelles et que leurs portes disposaient chacune d'une serrure et d'un œilleton. Par ailleurs, les annonces pour la location de ces chambres sur le site internet " moncoliving.fr ", indiquent que certaines d'entre elles, outre une salle d'eau et des toilettes individuelles, bénéficient d'un " meuble bar-cuisson avec réfrigérateur et freezer " ou même d'un lave-linge. Les photographies visibles sur ce site montrent en effet que la plupart des chambres sont équipées d'un micro-ondes ou encore d'une plaque chauffante amovible pour la cuisson. Ces éléments sont d'ailleurs confirmés par le procès-verbal de constat du 12 décembre 2019 et du 23 décembre 2019, dont les photographies permettent de constater que les différentes chambres disposent d'un coin cuisine, ainsi que de salles d'eau individuelles. S'il ressort également des pièces du dossier que les parties communes des maisons, à savoir la grande cuisine équipée, la pièce de vie, la buanderie au premier étage, la cuisine équipée au deuxième étage et le jardin, sont accessibles à tous les colocataires, et en dépit de ce que chacune des maisons comporte un compteur d'eau et d'électricités communs, les caractéristiques de ces chambres permettent de conclure que leurs locataires bénéficient, s'ils le souhaitent, d'une totale autonomie et ne dépendent pas des services proposés dans les parties communes des bâtiments. Dans ces conditions, au regard de l'objet des dispositions du plan local d'urbanisme citées ci-dessus relatives aux modalités de calcul des places de stationnement, les " chambres " créées par la SNC Atroom dans les deux constructions doivent être regardées comme constituant autant de logements. Dans ces conditions, le maire de Bordeaux n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que la SNC Atroom avait modifié le nombre de logements autorisés par le permis de construire du 27 septembre 2017 sans autorisation, et par conséquent méconnu l'article 1.4.1 du règlement du plan local d'urbanisme de Bordeaux métropole, le projet de l'intimée prévoyant seulement la création de trois places de stationnement" (CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 06/07/2023, 22BX01135).

Cette décision d'espèce n'est pas sans conséquence pour les porteurs de projet, qui doivent désormais mesurer les aléas d'appréciation induits par les spécificités du co-living et la variabilité d'analyse qui pourra être contestée au cas par cas, tant que la jurisprudence n'est pas plus développée et stabilisée.

Le cabinet est à votre écoute :

  • Pour vous aider à prévenir, mesurer et éviter les risques induits dans le cadre de votre projet ;
  • Pour vous accompagner dans la régularisation, et le cas échéant, en cas de litige lié aux mesures adoptées par l'administration locale ;
  • Plus globalement, sécuriser juridiquement votre projet en identifiant, évaluant et prévenant les risques juridiques.

Goulven Le Ny, avocat au Barreau de Nantes

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