Les emprunteurs font grief à la banque d’avoir manqué à son devoir d’information et de conseil et invoquent le caractère abusif de la clause de change.

Les emprunteurs sont opposés à la banque qui leur a consenti un prêt immobilier en francs suisses.

Ils font grief à la banque d’avoir manqué à son devoir d’information et de conseil et invoquent le caractère abusif de la clause de change.

Les deux parties ont formé un pourvoi contre l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Colmar le 9 mars 2022. Les moyens avancés par les emprunteurs nous intéressent ici tout particulièrement.

I.                Sur le moment de connaissance du manquement de la banque : Quid du point de départ de la prescription ?

La Cour d’appel de Colmar a déclaré irrecevable comme prescrite l’action des emprunteurs et rejette en conséquence leur demande de dommages-intérêts.

Pour juger l’action prescrite, la Cour d’appel a retenu que les emprunteurs n’ont pas établi qu’ils ont pu légitimement ignorer le risque de préjudice au moment de la souscription des contrats et que la dégradation de la parité entre l’euro et le franc suisse sur le remboursement des échéances s’est manifestée dès l’année 2008.

La Cour de cassation est d’un tout autre avis, et vient par conséquent protéger les emprunteurs par sa réponse.

La Cour de cassation a quant à elle retenu que :

« L’action en responsabilité de l’emprunteur à l’encontre du prêteur au titre d’un manquement à son devoir d’information portant sur le fonctionnement concret de clauses d’un prêt libellé en devise étrangère et remboursable en euros et ayant pour effet de faire peser le risque de change sur l’emprunteur se prescrit par cinq ans à compter de la date à laquelle celui-ci a eu connaissance effective de l’existence et des conséquences éventuelles d’un tel manquement. »

En d’autres termes, la Cour de cassation retient la déchéance du terme du prêt, soit la fin du prêt, comme moment de connaissance effective des conséquences du manquement de la banque. Ce raisonnement est profitable aux emprunteurs.

II.                  Sur le caractère abusif de la clause de change

Pour écarter la demande tendant à voir réputer non écrite la clause stipulant que l’emprunteur assume les conséquences de l’évolution du taux de change, la Cour d’appel a retenu qu’elle était « rédigée de manière claire et compréhensible, dès lors que les conséquences sur les modalités de remboursement du prêt en raison de la variation du taux de change pouvaient être appréhendées par tout emprunteur raisonnablement attentif ».

Elle avance également que le risque était mentionné dans l’acte de prêt et dans l’avenant, et que les emprunteurs ayant signé une attestation selon laquelle ils acceptaient d’accepter ces risques.

Néanmoins, une fois de plus, la Cour de cassation n’est pas d’accord avec la Cour d’appel et se range du côté des emprunteurs en alourdissant les devoirs de la banque dans la rédaction de ces clauses.

Ainsi, la Cour de cassation va encore plus loin de sorte que la banque doit avoir fourni aux emprunteurs « des informations suffisantes et exactes leur permettant de comprendre le fonctionnement concret du mécanisme financier en cause et d’évaluer ainsi le risque des conséquences économiques négatives, potentiellement significatives d’une telle clause sur leurs obligations financières. »