Le Tribunal Correctionnel a reproché à la BNP sa parfaite connaissance des risques inhérents au prêt en franc suisse avant même qu'il ne soit proposé aux consommateurs entre 2008 et 2009.

Le 26 février 2020 le Tribunal Correctionnel de Paris a condamné la BNP pour pratiques commerciales trompeuses et recel de pratiques commerciales trompeuses. 

La banque a, entre 2008 et 2009, commercialisé des prêts en franc suisse à taux variable révisables tous les 3 ou 5 ans avec des mensualités identiques mais dont la durée pouvait varier en fonction du taux de change appliqué. 

En effet, les mensualités étaient remboursées en euros alors que le capital emprunté était en franc suisse. 

Dès lors, les emprunteurs se voyaient appliquer un taux de change afin de convertir leurs mensualités payées en euro en franc suisse, le risque du taux de change étant intégralement supporté par l’emprunteur. 

Toutefois, un décrochage entre le franc suisse et l’euro est intervenu durant le prêt ayant pour conséquence d’augmenter la durée de leur prêt de maximum 5 ans. 

Si l’allongement de la durée du prêt de 5 ans ne suffisait pas, les contrats de crédit prévoyaient un déplafonnement des mensualités. 

Les emprunteurs ne remboursaient donc pratiquement plus la part amortissable de leur crédit puisqu’ils remboursaient essentiellement la différence créée par le taux de change entre le franc suisse et l’euro. 

Ne maitrisant plus leur crédit, les emprunteurs ont saisi le Tribunal Correctionnel de Paris.

La rédaction ambigüe du contrat et l'omission des risques étaient, selon le Tribunal Correctionnel, une action volontaire de la part de la BNP puisqu’elle était non seulement parfaitement au fait des risques inhérents à ce prêt mais était également tout à fait avisée de la conjoncture économique qui aggravait les risques du prêt Helvet Immo. 

La BNP souhaitait au départ commercialiser le prêt aux primo-accédants sans distinction, puis elle a décidé de ne commercialiser le prêt qu’auprès de clients souhaitant réaliser un investissement locatif, considérant ainsi que ce type de clients étaient des consommateurs avertis et que la banque risquait moins de poursuites pour n’avoir pas informé des risques d’augmentation du capital restant dû. 

Elle était donc déjà consciente des problèmes que pouvaient poser ce prêt. 

En outre, la banque était parfaitement avisée de la possibilité d’un décrochage entre le franc suisse et l’euro grâce aux crash tests qu’elle avait réalisés avant la commercialisation de ce prêt et qu'elle a pris soin de ne pas dévoiler aux clients. 

Elle savait donc parfaitement que le consommateur allait supporter deux risques, non seulement le taux de change, mais également la possible augmentation des intérêts. 

Ces deux facteurs avaient la possibilité d’augmenter le capital restant dû et donc d'allonger la durée du prêt ainsi que d’augmenter les mensualités. 

Par ailleurs, le décrochage entre le franc suisse et l’euro était non seulement possible mais il était surtout prévisible, selon une étude de l’OCDE parue en 2007 soit avant la commercialisation du prêt. 

Le Tribunal Correctionnel considère par conséquent que la banque savait quelles seraient les conséquences de la crise sur l’évolution du taux de change mais elle a tout de même choisi de commercialiser un produit particulièrement risqué et volontairement trompeur. 

Bien que les informations concernant la volatilité du franc suisse et la crise financière étaient accessibles au public, le Tribunal a cependant précisé que les données financières n’étaient pas compréhensibles par le consommateur moyen. 

De plus, la banque a volontairement retiré de la distribution le tryptique avant la commercialisation du produit qui mentionnait les risques du prêt avant qu’il ne parvienne au consommateur, la banque a donc volontairement omis d’informer sa clientèle en dissimulant les informations nécessaires à la compréhension du prêt Helvet Immo.