Aux termes de l’article L2131-11 du code général des collectivités territoriales :

« Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires. En application du II de l'article L. 1111-6, les représentants des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités territoriales mentionnés au I du même article L. 1111-6 ne sont pas comptabilisés, pour le calcul du quorum, parmi les membres en exercice du conseil municipal. »

 

Un conseiller municipal est dit « intéressé » quand son intérêt personnel est distinct de l’intérêt général des habitants de la commune (CE, 12 octobre 2016, I..., n° 387308-391743, au Rec).

Plus précisément, Alexandre Lallet, rapporteur public, dans ses conclusions sous la décision Commune de Voegtlinshoffen (CE, 26 octobre 2012, n° 351234), estimait qu’un intérêt personnel existe lorsqu’il est suffisamment spécifique au conseiller municipal mis en cause au regard des intérêts des habitants de la commune.

 

Ainsi, est intéressé à l’affaire, le conseiller municipal qui prend part au vote d’une délibération accordant une subvention à l’association dont il est président ou encore le maire lors du vote de la même délibération alors qu’est présente dans cette association la mère de son fils (TA Mayotte, 23 juin 2016, n° 1400541).

Les dispositions de l’article L2131-11 du CGCT ne sont, en revanche, pas méconnues dans le cas où deux conseillers municipaux présentant des liens de parenté avec deux attributaires de parcelles ont quitté la salle au moment de l’attribution des biens et n’ont pas participé au vote de la délibération (CAA Lyon, 4e ch., 12 nov. 2020, n° 19LY00697).

 

Notons que la seule présence du conseiller municipal ne suffit pas à exercer une influence effective sur la décision du conseil municipal (TA Grenoble, 31 déc. 2013, n° 1204861), de même que le conseiller municipal peut exercer une influence tout en se retirant du débat et en ne participant pas au vote.

 

Et pour cause, l’influence peut se manifester à plusieurs moments :

  • lors de la phase préparatoire
  • lors de l’adoption même de la délibération.

 

Ainsi, un élu qui aurait participé aux réunions de la commission municipale restreinte ad hoc et à plusieurs délibérations relatives à ce sujet pourrait être considéré comme avoir exercé une influence effective bien qu’il se soit retiré lors du débat et du vote de ladite délibération litigieuse :

« 6. Considérant qu’après avoir relevé que M. C a contribué à l’élaboration de la carte communale en participant à des réunions de la commission municipale restreinte créée pour l’élaboration du projet et a participé à plusieurs délibérations du conseil municipal relatives à ce projet, la cour, qui s’est bornée pour juger que M. C n’a pas influencé le conseil municipal pour des motifs d’intérêt personnel, à relever, d’une part que ce dernier s’est retiré lors du débat et du vote concernant l’extension du périmètre de protection autour de son exploitation agricole et, d’autre part, que la parcelle classée en zone constructible faisait partie d’un ensemble de parcelles situées le long d’une même voie dans une zone déjà construite, sans rechercher si l’intéressé a participé à la préparation de la disposition litigieuse et exercé sur celle-ci une influence effective, a commis une erreur de droit ; » (Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 21 novembre 2012, n°334726)

 

Une décision de la CAA de Marseille résume le cadre juridique posé par les dispositions de l’article L2131-11 du code général des collectivités territoriales :

« Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l’adoption d’une délibération d’un conseiller municipal intéressé à l’affaire qui fait l’objet de cette délibération, c’est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l’illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l’adoption d’une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d’une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d’exercer une influence sur la délibération. » (CAA Marseille, 5e ch., 10 mars 2021, n° 19MA02396)

 

Pour ne pas paralyser les conseils municipaux, le juge administratif se montre pragmatique. Dans les cas où le conseiller municipal est susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision, le juge s’attache à déterminer si l’influence a été effective.

A cet égard, il peut notamment prendre en compte, en cas de contentieux, les résultats du vote de la délibération pour déterminer si la participation au vote de l’élu qui pourrait être considéré comme intéressé a réellement exercé une influence sur la décision :

« Toutefois, à supposer même que l’intérêt de ces dernières ne se confonde pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette seule participation ait permis l’adoption de la délibération, acquise avec 26 voix favorables sur 27 suffrages exprimés. Elle n’est dès lors pas de nature à en entrainer l’illégalité. » (CAA Marseille, 5e ch., 10 mars 2021, n° 19MA02396).


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