1. SUR L’OPPOSABILITE DES CONDITIONS DE LA VENTE PROJETEE 

Les conditions dont est assortie une vente sont inopposables au titulaire du droit de préemption si elles n’ont pas été mentionnées dans la DIA qui seule les lie (Cass 3e civ., 30 mai 1996, n°94-14678).

Ainsi, aux termes d’un arrêt en date du 10 mars 1993, la Cour de cassation a considéré que la mairie ne pouvait s’engager au-delà des conditions financières figurant dans la DIA qui lui avait été notifiée et qui ne contenait aucune indication sur la rémunération de l’agence (Cass, 3e civ., 10 mars 1993, n°90-19578).

Par une réponse ministérielle en date du 10 août 2004 n°45803, le ministre de l’équipement, des transports, de l’aménagement du territoire, du tourisme et de la mer a rappelé que la rémunération des intermédiaires doit figurer dans la DIA pour être opposable au titulaire du droit de préemption.

Ainsi, si le mandataire rédige une DIA en mentionnant par erreur que sa rémunération sera à la charge du vendeur tandis que le contrat de mandat prévoit qu'elle sera à la charge du préempteur, alors le préempteur n'est pas tenu de la verser puisque lié par la DIA. 

Néanmoins, en de telles circonstances, le mandataire engage sa repsonsabilité et la jurisprudence a pu juger que : 

  • L'ouverture du droit à rémunération ne fait pas obstacle au pouvoir du juge de réduire, voire de supprimer cette rémunération, en considération des fautes commises par l'intermédiaire (Cass 1e civ., 14 janvier 2016, n°14-26474), 
  • L'agent immobilier doit veiller à indiquer dans le mandat laquelle des parties aura la charge de payer sa commission. A défaut, il ne pourra réclamer son paiement (Cass. 1ere civ., 8 mars 2012, n°11-10871), 
  • Si le notaire n'indique pas sur la DIA le débiteur et le montant de la commission, la commune n'en est pas tenue et le notaire peut engager sa responsabilité (Cass. 3e civ, 26 septembre 2007, n°06-17337).

2. CARACTERE DES MENTIONS

  • Le mandat

S’agissant du mandat, l’article 1988 alinéa 2 du Code civil dispose que : « S'il s'agit d'aliéner ou hypothéquer, ou de quelque autre acte de propriété, le mandat doit être exprès ».

En effet, il convient de vérifier si le mandataire est réellement habilité par le propriétaire à déposer une DIA, sinon l’acquisition encoure l’annulation (TGI Lyon, 8 février 1991, Sarga c/ Courly, req. n°9249/90).

De la même manière, aux termes d’un arrêt en date du 29 septembre 1999, le tribunal administratif de LYON a considéré que la DIA était irrégulière au motif qu’à la date de celle-ci, la vendeuse était placée sous curatelle de sorte qu’elle ne pouvait, sans accord du curateur donner mandat au notaire chargé de la vente d’établir la DIA. Il en résulte que le notaire signataire de la DIA ne justifiait pas d’une habilitation (TA LYON, 2e chb, 29 septembre 1999, n°99-1897).

Ainsi, il semble que le préempteur ait la possibilité de rejeter une DIA en raison de l’absence de mandat joint à celle-ci.  

Si néanmoins le vendeur parvient à démontrer que la DIA était complète et que la réponse du préempteur visait en réalité à gagner du temps (soit parce que celui-ci n'avait pas les fonds au moment T soit parce que celui-ci n'avait pas encore obtenu l'avis du domaine) alors la DIA fait courir le délai fixé au bénéficiaire du droit de préemption pour notifier sa réponse.

Aux termes d’une espèce soumise au Conseil d’état, pour soutenir que la réception de la DIA n'aurait pas fait courir le délai de deux mois pendant lequel le titulaire du droit de préemption pouvait légalement exercer ce droit, le ministre de l'équipement allègue que cette déclaration n'aurait pas été complète faute d'être accompagnée du plan de situation et du plan de masse des parcelles, et que, le directeur départemental de l'équipement ayant demandé au notaire de lui adresser ces documents, ledit délai n'aurait commencé à courir qu'à compter du lendemain de l'envoi du récépissé par lequel le préfet accusait réception de la déclaration complétée par ces documents.

Néanmoins, le Conseil d’état a considéré que les textes ne prévoyant pas que la DIA devait être accompagnée de ces documents, l'administration n'était pas en droit d'en exiger la production de sorte que le délai a commencé à courir dès la réception de la première DIA, peu important que le préfet ait fait une demande de pièces complémentaires (CE 30 avril 1975, n°95179).

De la même manière le Conseil d’Etat a considéré que la notification d’une nouvelle DIA n’est pas de nature à prolonger le délai fixé au bénéficiaire du droit de préemption pour notifier sa réponse (CE 24 juillet 2009, n°316158).

Il convient alors d'être extrèmement vigilent et au besoin de vous faire conseiller par un professionnel car il se peut, dans certaines hypothèses, que le préempteur soit forclos au moment de sa décision de préemption.

  • L’absence de signature et de cachet du mandataire

Selon la jurisprudence, une DIA non signée ne peut pas être considérée comme une saisine valable de l’administration (TA Strasbourg, 26 juin 1990, Mme Irène Ekani, req. n°90656).

3. INCIDENCE D'UNE DIA IRREGULIERE SUR LA LEGALITE DE LA DECISION DE PREEMPTION

Aux termes d’une jurisprudence constante, le Conseil d’état juge que la circonstance que la DIA serait incomplète ou entachée d'une erreur substantielle portant sur la consistance du bien objet de la vente, son prix ou les conditions de son aliénation est, par elle-même, et hors le cas de fraude, sans incidence sur la légalité de la décision de préemption prise à la suite de cette déclaration (CE 12 février 2014, n°361741 ; CE 1er juin 2018, n°415976 ; CAA BORDEAUX, 5 novembre 2015, n°14BX00364).

Cela signifie que la décision de préemption n’est pas forcément illégale du fait de l’irrégularité de la DIA.

La jurisprudence considère que peuvent avoir intérêt à agir contre une décision de préemption :

  • le vendeur (CAA PARIS, 7 décembre 1993, n°93PA00272) et ce même si le transfert de popriété du bien préempté au profit du titulaire du droit de préemption était déjà intervenu (CE, 21 mai 2008, n°296156),
  • l’acquéreur évincé (CE, 27 avril 1994, n°121.660),
  • le locataire (CE, 6 octobre 1999, n°185577), 
  • il y a également tout lieu de penser que toute personne qui démontre un préjudice direct et certain pourra agir.  

En revanche, il n’a pas été reconnu d’intérêt à agir :

  • au notaire, mandaté par le vendeur pour notifier la DIA (CAA Versailles, 21 septembre 2006, n°05VE00122),
  • au voisin (CE, 22 février 1995, n°136.900),
  • à l’agent immobilier (sauf à démontrer un préjudice direct et certain). 

Néanmoins, le juge judiciaire, même en présence d’une décision de préemption légale, peut constater la nullité de la vente si les erreurs contenues dans la DIA affectent le consentement des parties.

Il résulte de tout ce qui précède qu'une DIA irrégulière ou incomplète peut notamment avoir des conséquences sur : 

  • la respondabilité du mandataire qui a rédigé la DIA, 
  • la forclusion du préempteur si celui-ci a préempté tardivement, pensant à tort que la 1ère DIA était irrégulière et/ou incomplète, 
  • la validité de la vente.