Texte : articles L. 131-1 et s. et R. 131-11 et s. du code de l’éducation

 

Chaque année, de plus en plus de parents font le choix de l’instruction en famille. En novembre 2020, la France comptait un peu plus de 60 000 enfants instruits en famille [1].

 

La liberté d’instruction, ou liberté d’enseignement, a valeur constitutionnelle. Elle implique pour les parents de pouvoir choisir pour leurs enfants des méthodes d’instruction alternatives à celles proposées dans les établissements scolaires publics (établissements privés sous contrat, établissements privés hors contrat ou instruction en famille) [2] [3].

Cependant, la liberté d’enseignement s’exerce dans les limites du respect du droit de tout enfant de recevoir une instruction. En effet, le droit à l’instruction a aussi valeur constitutionnelle [4] et justifie un encadrement de l’instruction en famille [3].

 

Dans ce cadre, la loi du 24 août 2021 sur le séparatisme a profondément réformé l’instruction en famille. Dorénavant, par principe, l’instruction obligatoire est donnée dans des établissements publics ou privés. L’instruction en famille est devenue une dérogation qui doit être autorisée [5].

 

I. Le droit de l’enfant à l’instruction :

L’instruction est obligatoire pour tout enfant âgé de 3 à 16 ans.

Elle doit permettre à l’enfant d’acquérir un socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

L’instruction obligatoire peut être dispensée dans la famille, par les parents, par l’un des parents ou par toute personne de leur choix, sur autorisation préalable [6].

 

II. L’autorisation de l’instruction en famille :

Des parents, ou des personnes responsables de l’enfant, peuvent être autorisés à instruire leur enfant en famille par le directeur des services départementaux de l’éducation nationale (DASEN) compétent.

La demande est présentée entre le 1er mars et le 31 mai inclus précédant l’année scolaire. Une demande peut encore être formulée en-dehors de cette période dans certaines hypothèses strictement énumérées [7].

L’autorisation est accordée dans l’intérêt supérieur de l’enfant pour un des motifs suivants [6] :

  • L’Etat de santé de l’enfant ou sa situation d’handicap ;
  • La pratique d’une activité sportive ou artistique intensive ;
  • L’itinérance de la famille en France ;
  • L’éloignement géographique de tout établissement scolaire public ;
  • L’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif [8].

Par ailleurs, lorsque l’intégrité physique ou morale d’un enfant inscrit dans un établissement d’enseignement public ou privé est menacée, l’enfant peut recevoir son instruction en famille, après concertation avec le directeur de l’établissement qui émet un avis circonstancié, et ce, dès la demande d’autorisation [9].

La demande est accompagnée des pièces justificatives exigées par le code de l’éducation. Lorsque la demande est motivée par l’existence d’une situation propre à l’enfant, elle comprend notamment une présentation écrite du projet éducatif [7].

Le silence gardé par l’administration sur la demande d’autorisation pendant deux mois vaut autorisation [6].

L’éventuelle décision de refus d’autoriser l’instruction en famille doit faire l’objet d’un recours administratif préalable obligatoire dans un délai de 15 jours à compter de sa notification avant de saisir le Tribunal administratif compétent [5] [6].

 

III. Les contrôles de l’administration :

Les parents, ou les personnes responsables, de l’enfant recevant une instruction en famille acceptent de faire l’objet de contrôles.

 

Le contrôle de la mairie :

Dès la 1ère année, la mairie compétente enquête sur l’enfant afin de vérifier [6] :

  • La réalité du motif pour lequel l’instruction en famille a été demandée et autorisée ;
  • La compatibilité de l’instruction en famille avec l’état de santé de l’enfant et les conditions de vie de la famille.

Une attestation de suivi médical de l’enfant doit être fournie à l’occasion de ce contrôle.

Ce contrôle de la mairie est renouvelé tous les 2 ans.

 

Le contrôle pédagogique :

Les services de l’éducation nationale vérifie en outre [6] [10] :

  • La réalité de l’instruction donnée ;
  • L’acquisition progressive par l’enfant d’un socle commun de connaissances, de compétences et de culture ;
  • Si l’instruction dispensée dans un même domicile l’est pour les enfants d’une seule famille.

Ce contrôle a lieu au moins une fois par an à partir du 3ème mois suivant l’obtention de l’autorisation. Il peut être inopiné.

En cas de résultats insuffisants révélés par ce contrôle, un second contrôle est prévu. Si les résultats sont encore insuffisants à l’issu du second contrôle, l’enfant doit être inscrit dans un établissement d’enseignement public ou privé.

 

IV. Les sanctions :

Les parents, ou les personnes responsables de l’enfant, qui ne respectent pas ces règles s’exposent à des sanctions pénales [11].

 

V. Les aides financières :

Si l’enfant est inscrit au centre national d’enseignement à distance (CNED) en classe réglementée, les parents ont droit au versement de l’allocation de rentrée scolaire [12] et aux bourses de collège et de lycée [13].

Si l’enfant n’est pas inscrit au CNED en classe réglementée, les parents n’ont pas droit au versement de l’allocation de rentrée scolaire et aux bourses de collège et de lycée.

 

Dans le cadre d’un litige en lien avec l’instruction en famille d’un enfant, l’assistance d’un avocat peut s’avérer nécessaire afin de garantir le respect de la procédure et de veiller à la sauvegarde et à la défense des intérêts en présence, notamment des intérêts de l’enfant.

Maëlle Meurdra, Avocate au Barreau de Rennes, vous conseille, vous assiste et vous représente dans ce cadre.

 

Le 15 septembre 2022, par Maëlle Meurdra, Avocate au Barreau de Rennes

Tél. : 06 21 87 13 23

Mél. : cabinet@meurdra-avocat.fr

Site internet : meurdra-avocat.fr

 


[1] Etude d’impact sur le projet de loi confortant le respect des principes de la République, 8 décembre 2020, NOR : INTX2030083L/Bleue

[2] Décision n°77-87 DC du Conseil constitutionnel du 23 novembre 1977 ; Conseil d’Etat, 28 juillet 1999, Association d'éducation populaire Saint-Pie X, n°195300

[3] Décision n°2021-823 DC du Conseil constitutionnel du 13 août 2021 ; Conseil d’Etat, 2 avril 2021, Association Les Enfants d'Abord, n°435002, conclusions Marie-Gabrielle Merloz ; Conseil d’Etat, 19 juillet 2017, Association Les Enfants d'Abord, n°406150

A noter que, revenant sur une position du Conseil d’Etat qui considère que le principe de la liberté d’enseignement implique le droit pour les parents de choisir pour leurs enfants « des méthodes éducatives alternatives à celles proposées par le système scolaire public, y compris l’instruction au sein de la famille » (Conseil d’Etat, 19 juillet 2017, Association Les Enfants d'Abord, n°406150), le Conseil constitutionnel estime que l’instruction en famille n’est qu’une « modalité de mise en œuvre de l’instruction obligatoire » et non une composante du principe fondamental reconnu par les lois de la République de la liberté de l’enseignement (Décision n°2021-823 DC du Conseil constitutionnel du 13 août 2021).

[4] Treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946

[5] Articles 49 à 52 Loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République (dite « loi séparatisme » ou encore « loi sur le séparatisme ») 

La réforme est entrée en vigueur le 1er septembre 2022. Par dérogation, l’autorisation est accordée de plein droit pour les années scolaires 2022-2023 et 2023-2024 aux enfants régulièrement instruits en famille au cours de l’année scolaire 2021-2022 et pour lesquels les résultats du contrôle pédagogique ont été suffisants.

[6] Articles L. 131-1 et s., notamment l’article L. 131-5, du code de l’éducation

[7] Articles R. 131-11 et s. du code de l’éducation

[8] Dans cette hypothèse, les personnes responsables de l’enfant doivent justifier de la capacité de la personne en charge d’instruire l’enfant à assurer l’instruction en famille.

[9] L’enfant victime de harcèlement scolaire peut, en principe, bénéficier de ce dispositif conservatoire.

[10] Article R. 131-12 et s. du code de l’éducation

[11] Articles L. 131-11 et R. 131-17 et s. du code de l’éducation

[12] Articles L. 543-1 et R. 543-3 du code de sécurité sociale

[13] Articles D. 531-3 et D. 531-17 du code de l’éducation