En réponse à la lettre de mission du 29 janvier dernier par laquelle le Premier ministre avait demandé au Conseil d'État d'étudier « les solutions juridiques permettant de parvenir à une interdiction du port du voile intégral », qui soit « la plus large et la plus effective possible », dans la perspective du dépôt d'un projet de loi au Parlement, le Conseil d'État a remis une étude le 30 mars 2010.

L'étude vise, d'une part, à assurer la sécurité juridique de la mesure d'interdiction, tant au regard des normes constitutionnelles que du droit de l'Union européenne et de la Convention EDH et, d'autre part, à veiller à l'intelligibilité des dispositifs envisagés.

Il ressort de l'étude qu'aucun fondement juridique n'apparaît suffisamment solide pour justifier une interdiction générale et absolue du port du voile intégral en tant que tel et que l'effectivité d'une telle interdiction serait incertaine. Le Conseil a donc retenu la possibilité d'une interdiction de la dissimulation du visage, quelle que soit la tenue adoptée.

L'étude envisage deux dispositifs relatifs à l'obligation de découvrir son visage :

- le premier pour affirmer et étendre les possibilités d'interdiction de la dissimulation du visage prévoit que le préfet aurait un pouvoir de police spéciale à exercer en tout lieu ouvert au public, dès lors que la sauvegarde de l'ordre public l'exige et en fonction des circonstances locales (accès aux banques, aux bijouteries ou rencontres sportives ou conférences internationales) ;

- le second pour proscrire la dissimulation du visage distingue deux hypothèses :

* une obligation à caractère permanent pour l'entrée et la circulation dans certains lieux .

*une obligation circonstancielle lorsque la délivrance de certains biens ou services impose à l'individu de découvrir son visage (achat de produits dont la vente est prohibée en deçà d'un certain âge ou devant donner lieu, en raison des moyens de paiement employés, à une identification).

Concernant les sanctions, l'étude prévoit d'une part pour les personnes qui dissimuleraient leur visage en méconnaissance des interdictions édictées, à titre de peine principale, une injonction de médiation sociale organisée par un organisme agréé, ou, si le juge l'estime nécessaire, une amende.

D'autre part il est proposé d'instituer un délit pour le fait d'imposer à autrui par violence, menace, contrainte, abus de pouvoir ou abus d'autorité, de se dissimuler le visage en public, en raison de son appartenance à une catégorie de personnes, notamment à raison du sexe ; dans ce cas l'injonction de médiation sociale pourrait être proposée à titre de peine complémentaire.