Le harcèlement moral dans la fonction publique hospitalière fait l’objet de contentieux devant les juridictions administratives.

Dans cet article, nous revenons sur la manière d’être protégé dans un tel cas. Il s’agit notamment de la  protection fonctionnelle qui est un droit accordé aux fonctionnaires pour les protéger contre les menaces, violences, injures, diffamations ou outrages dont ils peuvent être victimes dans l’exercice de leurs fonctions. Ce droit est particulièrement pertinent en cas de harcèlement moral.

Le droit à la protection fonctionnelle

L’article L134-5 du Code général de la fonction publique prévoit que :

« La collectivité publique est tenue de protéger l’agent public contre les atteintes volontaires à l’intégrité de sa personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu’une faute personnelle puisse lui être imputée.

Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté »

Le harcèlement moral

L'interdiction du harcèlement moral est prévue à l’article L133-2 du code général de la fonction publique :

« Aucun agent public ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

 

Le droit de ne pas être soumis à un harcèlement moral constitue pour un agent public une liberté fondamentale au sens des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative (Conseil d’État, Juge des référés, 15 mars 2024, 491904).

Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d’agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un tel harcèlement. Il incombe à l’administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu’ils sont constitutifs d’un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l’agent auquel il est reproché d’avoir exercé de tels agissements et de l’agent qui estime avoir été victime d’un harcèlement moral.( Conseil d’État, 5ème Chambre, 31 mai 2022, 436824).

Solliciter la protection fonctionnelle en cas de harcèlement

La protection fonctionnelle est un dispositif essentiel pour protéger les fonctionnaires hospitaliers contre le harcèlement moral. Elle offre une réponse juridique et administrative aux situations de maltraitance en milieu professionnel.

Si vous êtes victime de harcèlement moral, il est conseillé de formuler une demande de protection fonctionnelle afin que des mesures concrètes soient prises pour vous protéger. Il vous incombe de formaliser votre demande de protection fonctionnelle par écrit. Celle-ci doit être motivée et inclure toutes les précisions nécessaires concernant les faits pour lesquels vous sollicitez cette protection.

Votre employeur, le centre hospitalier par exemple, doit prendre les mesures permettant de faire cesser les faits de harcèlement.

Exemples de décisions où les fonctionnaires ont gagné 

➡️Condamnation d’un centre hospitalier à verser à une infirmière une indemnité de 8 000 euros et annulation des décisions refusant à l’infirmière le bénéfice de la protection fonctionnelle, ordonnant au centre hospitalier de lui verser 6 880 euros pour les frais d’avocat engagés (Tribunal administratif de Grenoble, 6ème Chambre, 7 mai 2024, 2007304).

➡️Condamnation d’un centre hospitalier qui avait refusé à une fonctionnaire hospitalière le bénéfice de la protection fonctionnelle. Les juges ont estimé que les agissements répétés de harcèlement moral dont elle avait été victime de la part de ses collègues et de sa hiérarchie étaient établis, ce qui engageait la responsabilité du centre hospitalier. Ils ont donc ordonné au centre hospitalier de lui accorder la protection fonctionnelle et de lui verser une indemnité de 10 000 euros (Tribunal administratif de Montpellier, 2ème Chambre, 19 juin 2023, 2100328)

➡️Condamnation du centre hospitalier d’Auxerre à verser à un praticien hospitalier une indemnisation de 25 000 euros en réparation du préjudice moral qu’il a subi. Les juges ont considéré que le centre hospitalier avait commis des fautes en l’écartant des gardes et astreintes du service de pédiatrie-néonatologie et en lui retirant son secrétariat et son assistante médicale. Les juges ont reconnu l’existence d’agissements constitutifs de harcèlement moral à l’égard de M. A (Tribunal administratif de Dijon, 2ème Chambre, 13 juin 2023, 2000224)

➡️Victoire en appel d’une infirmière-cadre supérieur de santé avec une indemnisation de 4 000 euros (Cour administrative d’appel de Toulouse, 2ème Chambre, 12 mars 2024, 22TL21012).