Un contrôle fiscal et une rectification du bénéfice fiscal peuvent avoir des conséquences en matière de calcul de la participation des salariés.

Mais quelles sont les relations entre la matière sociale et la matière fiscale dans cette situation?

 

1. Rappel sur la participation des salariés

 

a. Rappel de la notion

Obligatoire pour les entreprises ayant un effectif supérieur ou égal à 50 salariés, la participation permet d’associer les salariés aux résultats qu’ils ont contribué à générer.

Sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions, le régime fiscal et social de la participation est favorable aux salariés.

D’un point de vue juridique et comptable, lorsque l’entreprise respecte les conditions, elle doit doter une réserve spéciale de participation.

 

b. Rappel du calcul de la réserve spéciale de participation

Sous réserve d’une formule dérogatoire plus favorable aux salariés, la formule légale de la participation prévue à l’article L. 3324-1 du code du travail est la suivante :

RSP = ½ x [B – (5 % CP)] x (S / VA)

Dans laquelle :

B : Bénéfice fiscal net

CP : Capitaux propres 

S : Salaires

VA : Valeur ajoutée de l’entreprise

Il ressort de la formule légale que la réserve spéciale de participation doit être dotée si l’entreprise réalise un bénéfice et si ce bénéfice est supérieur à 5 % des capitaux propres.

S’agissant du bénéfice net, il s’entend du bénéfice fiscal, imposable à l’impôt sur les sociétés au taux de droit commun de 25 % ou au taux réduit de 15 % pour les PME, après imputation des reports déficitaires.

 

2. Conséquences d’un contrôle fiscal

a. Conséquences sur le calcul de la participation des salariés

La notion de « bénéfice fiscal net » étant une variable du calcul de la participation des salariés, toute modification de « bénéfice fiscal net » dans le cadre d’une vérification de comptabilité ou d’un contrôle sur pièces est susceptible d’avoir des conséquences sur le calcul de la réserve spéciale de participation y compris lorsque les rectifications apportées concernent la remise en cause de l’imputation de déficits antérieurs.

De plus, un contrôle fiscal peut également avoir des conséquences sur le poste « capitaux propres » ou « valeur ajoutée ».

Les conséquences d’un contrôle fiscal en matière de participation des salariés sont prévues à l’article L. 3326-1-1 du Code du travail.

Cet article dispose en effet que :

« Lorsque la déclaration des résultats d'un exercice est rectifiée par l'administration ou par le juge de l'impôt, que les rectifications donnent lieu ou non à l'application de majorations, à des poursuites pénales ou à une convention judiciaire d'intérêt public, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice fait l'objet d'un nouveau calcul tenant compte des rectifications apportées ;

Le montant de la réserve spéciale de participation est modifié en conséquence […] ».

 

b. Date du nouveau calcul de la participation des salariés

Le législateur prévoit que le montant de la réserve spéciale de participation est modifié « au cours de l'exercice pendant lequel les rectifications opérées par l'administration ou par le juge de l'impôt sont devenues définitives ou ont été formellement acceptées par l'entreprise ».

S’agissant de la notion de rectifications devenues définitives, la doctrine administrative précise qu’en cas de contestation de la rectification par l’entreprise, les rectifications sont définitives après épuisement des voies de droit. Elle ajoute qu’il en est ainsi lorsque les délais de réclamation, de recours ou d'appel ont expiré ou lorsque la juridiction d'appel s'est prononcée sur le bien-fondé des impositions supplémentaires (BOI-BIC-PTP-10-10-30 §§ 60 et s.).

 

c. Distinction en cas de rectification à la hausse ou à la baisse du résultat fiscal

En cas de rectification fiscale du bénéfice à la hausse, le complément de participation correspond à la différence entre le montant de la participation des salariés recalculé et la participation originellement attribuée étant précisé que ce complément est susceptible d’être majoré du forfait social.

Le complément de participation est assorti d’un taux d’intérêt de retard correspondant au taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées (« TMOP » - 3,37 % pour le second semestre de l'année 2023) sauf taux spécifique prévu dans l’accord de participation.

Le calcul de l’intérêt de retard court à partir du premier jour du sixième mois de l'exercice qui suit celui au titre duquel les rectifications ont été opérées et est arrêté au jour de l’inscription du complément au compte de la réserve spéciale de participation.

Le complément de participation devra être comptabilisé en charges (compte 691) l’année où la réserve spéciale de participation est corrigée à la hausse.

Fiscalement, le complément de participation est immédiatement déductible compte tenu de la modification immédiate de la réserve spéciale de participation.

S’agissant du taux du forfait social applicable à la participation, et sauf exonération, c’est le taux en vigueur au cours de l’exercice au cours duquel le redressement est devenu définitif qui devrait s’appliquer.

En cas de rectification fiscale du bénéfice à la baisse, la jurisprudence a retenu que les dispositions de l’article D. 3324-40 du Code du travail (désormais L. 3326-1-1) s’appliquait (Cass. soc. 1er juillet 1998 n° 96-16.471).

Cette hypothèse, qui s’avère assez peu fréquente en réalité, est susceptible de poser un certain nombre de difficultés pratiques et de « problèmes sociaux ». Une analyse détaillée et au cas par cas doit être menée.

Fiscalement, la réduction de la réserve de participation est immédiatement imposable.

 

d. Conséquences sur les bénéficiaires

Selon une jurisprudence constante, seuls les salariés présents dans l’entreprise lors de l’exercice au cours duquel les rectifications sont devenues définitives ou ont été formellement acceptées par l’entreprise peuvent bénéficier de la réserve spéciale de participation (notamment : Cass. soc. 10 mars 1998, n°96-16.473 et Cass. soc. 22 juin 2016, n°14-28.175).

Ainsi, les salariés présents au cours de l’exercice rectifié mais qui auraient quitté l’entreprise ne peuvent pas bénéficier de la réserve spéciale de participation.

Remarque : en cas de régularisation spontanée du bénéfice fiscal à la hausse et de la modification corrélative de la réserve spéciale de participation, la régularisation devrait bénéficier aux salariés présents dans l’entreprise au cours de l’exercice dont les résultats sont modifiés même s’ils ont quitté l’entreprise depuis (Cass. soc., 5 juin 2001, n°99-14.037). Cette situation peut s’avérer très complexe à gérer en pratique (nombreux salariés, nombreux CDD, Turnover important, régularisation tardive etc.).

 

Yan Flauder

Avocat spécialisé en droit fiscal