En l’espèce, une société a été mise en redressement puis en liquidation judiciaire, successivement en avril 2016 et octobre 2017.
En mai 2016, une banque a déclaré sa créance, tant en capital restant dû qu’en intérêts calculés selon un taux effectif global qui a été contesté.
Le juge-commissaire a admis les créances pour leur montant en capital restant dû et, pour le surplus, dit que la société liquidée soulevait une contestation sérieuse et a invité cette dernière à saisir le tribunal territorialement compétent de ses demandes formées contre la banque, et ce dans le délai d’un mois suivant réception de la notification de l’ordonnance, à peine de forclusion.
Environ un mois plus tard, le liquidateur de la société a assigné la banque en déchéance du droit aux intérêts contractuels et en responsabilité pour inexécution de son obligation de mise en garde.
La banque soutenait que le liquidateur n’était pas recevable à introduire cette action.
La Cour de Cassation ne suit pas ce raisonnement et précise que « s'il résulte des articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce que l'instance introduite devant la juridiction compétente pour trancher, sur l'invitation du juge-commissaire, une contestation sérieuse dont une créance déclarée est l'objet s'inscrit dans la procédure de vérification du passif à laquelle le débiteur lui-même est personnellement partie, au titre d'un droit propre, de sorte qu'il peut être désigné pour saisir la juridiction compétente, toute autre partie à cette procédure, tel le liquidateur en sa qualité de représentant de l'intérêt collectif des créanciers, est toutefois recevable à saisir cette juridiction et c'est seulement en l'absence de saisine de celle-ci par l'une des parties à l'instance en contestation de créance que la forclusion prévue par le second texte précité peut être encourue par la partie désignée. »
Autrement dit, la société liquidée, pour laquelle la règle du dessaisissement ne s’appliquait pas en l’espèce, aurait pu intenter une action dans le délai posé par le juge-commissaire, sous peine de forclusion.
Cependant, le liquidateur est également recevable à agir dans ce cadre, en sa qualité de représentant de l’intérêt collectif des créanciers, étant précisé qu’il ne dispose alors d’aucun délai contraignant pour le faire.
Dans ces conditions, il est préférable de laisser la direction du procès au liquidateur plutôt que de laisser la société placée en procédure collective s’en charger car ce dernier ne sera pas soumis au délai de forclusion.
Par ailleurs, lorsque le liquidateur engage l’action, il nous semble que les frais irrépétibles seront analysés comme des créances postérieures utiles, au sens de l’article L622-17 du code de commerce et seront donc, soit payées à leur échéance, soit par privilège.
Cass. com., 2 mars 2022, n° 20-21.712
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