Situation des requérants et intervention d'un arrêté de fermeture adopté par le Maire

Une SCI a acquis en février 2020 un chalet précédemment exploité en gîte. Elle loue en appartement meublés de tourisme deux appartements situés au premier étage pouvent acceuillir respectivement six et huit personnes. Une SARL distincte exploite au deuxième étage cinq chambres d'hôtes et au troisième étage des espaces communs (cuisine, salle à manger, salon). 

La commission de sécurité et émis un avis défavorable à la poursuite de l'activité, ce qui a conduit le Maire à adopter un arrêté de fermeture au public le 26 janvier 2021.

La SCI et la SARL demandent l'annulation de cet arrêté au Tribunal Administratif. A cette occasion, le Tribunal adminsitratif de Grenoble est conduit à statuer sur les liens entre les activités de la SCI et de la SARL pour déterminer si le bâtiment dans son ensemble forme un unique établissement recevant du public de 5ème catégorie. 

 

Elements retenus par les juges pour caractériser un ensemble homogène soumis à la réglementation ERP

Pour juger que l'ensemble constitue un établissement unique (un ensemble homogène au sens de la législation sur les ERP), les juges retiennent plusieurs éléments :

  • La SCI et la SARL sont liées par contrat, en l'espèce la SCI a confié à la SARL un mandat de gestion pour commercialiser les meublés de tourisme de la SCI a été confié à la SARL ;
  • Si certains espaces communs dans les étages sont à usage exclusifs des lots de la SARL, il existe des espaces communs extérieurs notamment un SPA et d'un local de chaufferie ;
  • Le caractère indépendant des services entre les locaux de la SCI et de la SARL n'est pas démontré, puisqu'au contraire l'accueil commun doit être utilisé par tous et il n'est pas démontré que les locataires de la SCI ne bénéficient pas des services proposés par la SARL.

"12. En l'espèce, la capacité maximale du chalet du Rassel est de vingt-neuf personnes, supérieure à l'effectif de quinze personnes. Les requérantes soutiennent cependant qu'il ne s'agit pas d'un établissement unique, mais d'une part de deux appartements meublés de tourisme, d'autre part de cinq chambres d'hôtes, exploités par des personnes morales distinctes.

13. Il ressort des pièces du dossier que la SARL Rêve d'Alpages qui exploite les chambres d'hôte a reçu mandat de la SCI Dr A pour commercialiser la location des deux meublés de tourisme.

14. Si la commune soutient que le troisième étage, comprenant une cuisine, une salle à manger et un salon, est constitutif d'équipements communs aux deux activités, les requérantes produisent un procès-verbal de constat d'huissier du 11 août 2020 selon lequel ces équipements sont réservés aux occupants des chambres d'hôtes, les étages du chalet dédiés à l'activité de location de meublés de tourisme ne disposant d'aucune connexion directe avec cet espace ni avec l'étage dédié aux chambres d'hôtes. Toutefois, il ressort du rapport de visite de la commission de sécurité d'arrondissement d'Albertville que le chalet est équipé d'un spa et d'un local de chaufferie disposant tous deux d'un accès extérieur, ce qui caractérise l'existence d'équipements communs au sens des dispositions précitées.

15. Les requérantes soutiennent que les occupants des chambres d'hôtes bénéficient de services exclusifs d'accueil et de réception, de fourniture du linge de maison, de blanchisserie et de ménage, ainsi que de préparation et service de petits-déjeuners et de dîners. Cependant, elles n'allèguent pas avoir mis en place une procédure ou installé un dispositif tel que des boîtes à clés permettant aux locataires des appartements meublés de ne pas utiliser le service d'accueil et de réception, au moins à leur arrivée et avant leur départ. Les requérantes ne produisent aucun élément de nature à établir que ces locataires ne pourraient en aucun cas bénéficier, à titre payant, des autres services ou de certains d'entre eux, notamment la fourniture de linge de maison et le ménage, généralement proposés aux occupants des meublés de tourisme. Dans ces conditions, les meublés de tourisme et les chambres d'hôtes du chalet du Rassel doivent être regardés comme présentant un même niveau de confort et disposant d'un minimum d'équipement et de services communs. Ce bâtiment constitue ainsi un ensemble homogène au sens de l'article O1 du règlement de sécurité dans lequel l'effectif accueilli est supérieur à quinze et relève dès lors de la réglementation des établissements recevant du public.

16. Il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'avis émis par la commission de sécurité d'arrondissement d'Albertville serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation et que le maire de Sainte-Foy-Tarentaise aurait commis une erreur d'appréciation en qualifiant le chalet du Rassel d'établissement recevant du public classé en 5ième catégorie, susceptible d'accueillir plus de quinze personnes, et en le soumettant ainsi aux règles de sécurités prévues par les dispositions précitées.

17. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 26 janvier 2021 doivent être rejetées." (Tribunal administratif de Grenoble, 16 juillet 2024, n° 2101165).

 

Risques sur le montage d'un projet avec appartements meublés de tourisme

La SCI et la SARL vont donc devoir entreprendre des travaux lourds pour se mettre aux normes de sécurité applicables (5ème catégorie avec capacité de plus de 15 personnes), limiter fortement la capacité d'accueil ou modifier considérablement les modalités d'exploitation pour résoudre la difficulté et permettre la levée de l'arrêté ordonnant la fermeture au public. La rentabilité initialement attendue sera vraisemblablement atteinte.

Il est donc essentiel de faire réaliser une étude réglementaire préalable concernant l'application de la réglementation d'urbanisme, du tourisme et concernant les établissements recevant du public en amont du projet.

 

Le cabinet est à votre écoute :

  • Pour vous assister dans l'analyse et la mise en oeuvre de la règlementation nationale et locale d'urbanisme et de la construction, notamment concernant les établissements recevant du public ;
  • Pour vous aider à prévenir, mesurer et éviter les risques induits dans le cadre de votre projet ;
  • Pour vous accompagner dans la régularisation, et le cas échéant, en cas de litige lié aux mesures adoptées par l'administration locale ;
  • Plus globalement, sécuriser juridiquement votre projet en identifiant, évaluant et prévenant les risques juridiques.

Goulven Le Ny, avocat au Barreau de Nantes

goulven.leny@avocat.fr - 06 59 96 93 12 - glenyavocat.bzh