En février 2016, un propriétaire loue son appartement situé dans le 4e arrondissement de Paris à un locataire. Le bail comporte une clause interdisant au locataire de céder ou sous-louer l'appartement, sauf accord écrit du bailleur.

Malgré cette clause, le locataire sous-loue l'appartement en location saisonnière, via la plateforme Airbnb, à l'insu du bailleur, entre 2016 et 2017. Il perçoit au total la somme de 51.939,61 €.

Lorsqu'il apprend l'existence d'une sous-location, le bailleur assigne en justice le locataire et la société Airbnb.

La décision rendue le 5 juin 2020 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris est intéressante à plusieurs titres.

Tout d'abord, le juge condamne le locataire à restituer les loyers perçus, en application des articles 546 à 548 du code civil selon lesquels la propriété immobilière donne droit sur tout ce qu'elle produit et les fruits civils appartiennent au propriétaire par accession.

Cette solution n'est toutefois pas nouvelle : elle a été retenue par la cour d'appel de Paris dans plusieurs décisions rendues depuis 2018 (Cour d’appel de Paris, Pôle 4 – Chambre 4 – 5 juin 2018 RG n°16/10684 ; Cour d’appel de Paris, Pôle 4 – Chambre 3, 13 septembre 2019 RG n° 17/04038).

Par ailleurs, le juge considère que la société Airbnb est responsable, en sa qualité d'éditeur de contenus, des abus commis par ses utilisateurs.

Le juge rejette la théorie d'Airbnb selon laquelle elle ne serait qu'un simple hébergeur de contenus dont la responsabilité ne peut être engagée, car la plateforme exerce un rôle actif dans la mise en relation des hôtes et des voyageurs et sur les contenus déposés sur sa plateforme :

  • En donnant des directives à ses hôtes ("être réactif, accepter les demandes de réservation, éviter les annulations, maintenir une bonne évaluation globale et fournir des équipements de base" à défaut de quoi Airbnb se réserve le droit de retirer l'annonce ou fixer des pénalités),
  • En se réservant le droit de retirer tout contenu qui ne respecterait pas les règles, les conditions générales du site, les valeurs de communauté ou sa politique relative aux commentaires ou pour toute autre raison, à son entière discrétion.
  • En se réservant le droit de suspendre ou désactiver définitivement un compte en cas de manquements répétés ou particulièrement graves.
  • A contrario, en attribuant le qualificatif de "superhost" aux comptes respectant les critères prédéfinis par Airbnb, ce qui a pour conséquence de mettre ces comptes en avant.
  • En interdisant à ses utilisateurs d'accepter une réservation en dehors de la plateforme.

Or, en sa qualité d'éditeur de contenus, la société Airbnb est tenue de vérifier si l'hôte dispose ou non du droit de proposer le bien à la location.

À défaut de vérification, elle engage sa responsabilité civile et doit réparer le préjudice subi par le propriétaire.

La société Airbnb est donc condamnée, solidairement avec le locataire, à payer la somme de 51.939,61 €, au titre des sous-loyers encaissés et 1.558,20 € au titre des commissions perçues.

Cette condamnation solidaire d'Airbnb est favorable aux propriétaires car elle leur garantit d'être dédommagés même en cas d'insolvabilité des locataires.