Pour qu'un jugement étranger d'adoption soit reconnu en France, il doit être suffisamment motivé (Cass. 1re civ., 11 déc. 2024, n° 23-15.672, FS-B + R).

La Cour de cassation a rappelé que le juge français doit pouvoir vérifier que les conditions essentielles à une adoption valide ont été respectées, notamment le consentement des parents biologiques.

L'absence de motivation suffisante peut entraîner le refus d'exequatur.

Une personne demande l'exequatur (la reconnaissance et l'exécution d'un jugement étranger) en France d'un jugement américain d'adoption.

Il souhaite ainsi que cette adoption soit reconnue comme valable en France et que l'enfant puisse bénéficier des mêmes droits qu'un enfant adopté en France.

Le demandeur saisit le juge de cassation après que la cour d'appel a rejeté sa demande aux motifs que :

  • Le jugement américain d'adoption ne contient pas suffisamment de détails sur les conditions dans lesquelles l'adoption a été prononcée. En particulier, il ne précise pas comment le consentement des parents biologiques a été obtenu ;
  • Le juge français a pour obligation de vérifier que le jugement étranger respecte l'ordre public international. En l'absence de motivation suffisante, le juge français ne pouvait pas s'assurer que l'adoption a été prononcée dans le respect des règles fondamentales ;
  • Les documents complémentaires fournis par le parent adoptant après le jugement américain ne sont pas considérés comme suffisants pour combler les lacunes de la décision américaine.

Les magistrats ont ainsi noté que, bien que la compétence du juge américain et l'absence de fraude n'aient pas été contestées, le jugement manquait de motivation.

En particulier, il ne mentionnait ni le consentement des parents ou des représentants légaux de l'enfant à l'adoption, dont l'identité n'était pas précisée, ni les conditions de prise en charge de l'enfant.

La cour a par ailleurs jugé que les attestations fournies, incorrectement qualifiées de certificat de coutume et rédigées par un avocat du cabinet chargé par le requérant des démarches judiciaires américaines pour l'adoption, après le jugement et à l'intention du juge français, étaient inopérantes.

Elle a constaté en outre que, bien que le parent adoptant ait été invité à fournir des éléments équivalents à cette motivation manquante, notamment la requête mentionnée dans le jugement, il n'a pas souhaité le faire.

La Cour de cassation valide l'arrêt des juges du fond.

Après avoir constaté qu'elle n'avait pas été en mesure d'exercer son contrôle, la cour d'appel a correctement conclu que le jugement était contraire à l'ordre public international français et ne pouvait donc pas être reconnu en France.

Dans son arrêt, le juge de cassation rappelle que pour accorder l'exequatur, le juge français doit vérifier 3 conditions en l'absence de convention internationale :

  • La compétence indirecte du juge étranger, basée sur le lien entre le litige et le juge saisi ;
  • La conformité du jugement à l'ordre public international, tant sur le fond que sur la procédure ;
  • L'absence de fraude. Le juge ne doit pas réexaminer le fond du jugement.

La Cour ajoute qu'un jugement étranger non motivé est contraire à l'ordre public international français, sauf si des documents équivalents à la motivation manquante sont fournis.

Il appartient au demandeur de fournir ces documents.

En matière d'adoption, le juge de l'exequatur doit pouvoir, grâce à la motivation de la décision ou aux documents équivalents fournis, connaître les circonstances de l'adoption et s'assurer que les parents ou représentants légaux de l'enfant ont consenti à l'adoption, tant sur le principe que sur ses effets.

(Source : Lexis360 du 19/12/2024)