Dans sa décision du 27 novembre 2025, le Conseil d'Etat valide l'interprétation de la Cour administrative d'Appel de Bordeaux quant à l'application des directives anticipées :
Si les médecins peuvent y déroger quand elles sont manifestement inappropriées ou non conformes à la situation, ils doivent les respecter quand le patient, en conscience, en demande l'application, peu importe leurs conséquences.
Le fait pour les médecins de " placer {le patient} sous sédation pour l'empêcher de s'opposer à cet acte médical" présente un caractère fautif.
- La validation de la possibilité d'écarter les directives anticipées.
"Les directives anticipées s'imposent au médecin pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement, sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation et lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale." (article L1111-11du code de la santé publique)
En l'espèce, la patiente devait subir une intervention ordinaire ne présentant pas de risque particulier. Aucune information préalable ne lui est donnée sur le risque rare et grave de perforation de l'artère iliaque. La patiente fait part de son refus de transfusion sanguine homologue par oral et par écrit à l'équipe hospitalière.
Lors de l'intervention, la perforation de l'artère iliaque survient et nécessite deux transfusions sanguines homologues, la transfusion autologue prévue s'avérant insuffisante.
Ces transfusions sanguines sont validées par le Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat considère que la patiente n'ayant pas été informée du risque de perforation de l'artère iliaque et de ses conséquences, les directives anticipées qu'elle avait écrites et exposées n'avaient pas été pensées et rédigées en connaissance de cause. Devant l'urgence de la situation, les médecins étaient fondés à considérer que les directives anticipées étaient " manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient".
- Le refus de manoeuvres médicales en vue d'écarter l'application des directives anticipées.
"Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées expriment la volonté de la personne relative à sa fin de vie en ce qui concerne les conditions de la poursuite, de la limitation, de l'arrêt ou du refus de traitement ou d'acte médicaux. (...) Les directives anticipées s'imposent au médecin pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement,(...)" (article L1111-11du code de la santé publique)
Il n'en va pas de même lorsque, suite à une dégradation progressive de l'état de santé de la patiente et l'échec d'autres traitements alternatifs, la patiente exprime et réitère le refus de recevoir une transfusion sanguine homologue.
La patiente est consciente, informée de sa situation, de ses risques et des conséquences de l'absence de transfusion. Dans cette situation, les directives anticipées de la patiente s'imposent à l'équipe hospitalière, quand bien même leur respect entrainerait le décès de la patiente.
Le fait pour l'équipe médicale de placer volontairement la patiente hors d'état d'exprimer sa volonté (de la sédater), afin de pouvoir procéder à une transfusion sanguine constitue une faute.
En effet, les critères permettant d'écarter l'application des directives anticipées ne sont pas réunis, les directives anticipées devaient donc s'appliquer, quand bien même la patiente devait décéder.
En conclusion, les questions que doit se poser l'équipe médicale avant d'écarter l'application des directives anticipées sont de deux types :
1. Les questions portant sur la connaissance du patient de la situation lors de la rédaction des directives anticipées :
- le patient était il informé de sa situation quand il a rédigé ses directives anticipées ?
- la situation actuelle a t elle fait l'objet d'une information ?
2. Les questions sur la nature de l'acte médical dérogatoire aux directives anticipées :
- la situation est elle urgente ?
- l'acte médical est il indispensable ?
- l'acte médical est il proportionné à la situation ?
Pour retrouver la décision du Conseil d'Etat c'est ici https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2025-11-27/469793
Pour lire le commentaire de l'arret de la Cour Administrative d'appel de Bordeaux c'est là https://consultation.avocat.fr/blog/virginie-aldias-loubier/article-45685-consentement-du-patient-refus-de-soins-et-derogation-ou-pas-caa-bordeaux-19-10-2022.html

Pas de contribution, soyez le premier