Portée d'une délégation de paiement
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 20 décembre 2018
N° de pourvoi: 17-23.213 Non publié au bulletin Cassation
M. Chauvin (président), président
SCP de Nervo et Poupet, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1275 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Rennes, 30 mars et 15 juin 2017), que la société civile immobilière les Bruyères (la SCI), qui a entrepris la construction d'un immeuble, a confié à la société l'Arcade plus la réalisation de plusieurs lots ; que la société l'Arcade plus a commandé des matériaux à la société DMO Point P (société Point P) ; que, se prévalant d'une délégation de paiement, la société Point P a assigné la SCI, depuis mise en liquidation judiciaire ;
Attendu que, pour fixer au passif de la liquidation judiciaire de la SCI, la créance de la société Point P à une certaine somme, l'arrêt retient que la délégation de paiement, régie par les articles 1275 et suivants du code civil dans leur version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, instaure une obligation nouvelle, personnelle et autonome entre le délégué et le délégataire aux termes de laquelle le premier s'engage à régler le second sans pouvoir lui opposer aucune exception ni aucun moyen de défense tiré des relations entre le délégant et le délégataire, à moins que la délégation n'en dispose autrement, que les actes versés aux débats ne comportent aucune clause de renonciation par la société Point P à ce principe de l'inopposabilité des exceptions et prévoient le paiement des factures afférentes au chantier, en lien avec le devis annexé, sans aucun formalisme, que la SCI, qui s'est engagée à payer sa créance, ne peut donc pas en discuter l'existence ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les factures, dont le paiement était sollicité, concernaient les prestations prévues au devis annexé à l'acte de délégation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus les 30 mars 2017 et 15 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne la société DMO Point P aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société DMO Point P à payer à la SCP Amauger Texier, ès qualités, la somme de 3 000 euros ;
Pas de contribution, soyez le premier