Les demandes reconventionnelles sont recevables en appel

 

Cour de cassation - Chambre civile 1

  • N° de pourvoi : 22-12.071
  • ECLI:FR:CCASS:2023:C100674
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Cassation partielle

Audience publique du mercredi 13 décembre 2023

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, du 28 juillet 2021

Président

Mme Champalaune (président)

Avocat(s)

Me Bardoul

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

IJ



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 décembre 2023




Cassation partielle


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 674 F-D

Pourvoi n° A 22-12.071

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [V].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 26 janvier 2022.






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 DÉCEMBRE 2023

Mme [W] [V], épouse [K], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 22-12.071 contre l'arrêt rendu le 28 juillet 2021 par la cour d'appel de Grenoble (chambre des affaires familiales), dans le litige l'opposant à M. [B] [K], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, plusieurs moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Agostini, conseiller, les observations de Me Bardoul, avocat de Mme [V], l'avis de Mme Caron-Deglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 octobre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Agostini, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 28 juillet 2021), un jugement du 11 septembre 2019 a prononcé le divorce de Mme [V] et de M. [K] et a statué sur ses conséquences.

Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le même moyen, pris en sa seconde branche, sauf en ce qu'il est dirigé contre la disposition de l'arrêt déclarant irrecevable la demande de Mme [V] tendant au maintien de l'usage du nom marital, le troisième moyen, pris en sa deuxième branche et le même moyen, pris en ses première et troisième branches, sauf en ce qu'il est dirigé contre la disposition de l'arrêt déclarant irrecevable la demande de Mme [V] tendant à l'organisation du droit de visite et d'hébergement du père et sur le quatrième moyen, sauf en ce qu'il est dirigé contre la disposition de l'arrêt déclarant irrecevable la demande de Mme [V] fixant le montant de la contribution du père à l'entretien et l'éducation des enfants

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui sont irrecevables ou ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, en ce qu'il est dirigé contre la disposition de l'arrêt déclarant irrecevable la demande de Mme [V] tendant au maintien de l'usage du nom marital

Enoncé du moyen

3. Mme [V] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable pour la première fois sa demande tendant au maintien de l'usage du nom marital, alors « que la cour d'appel est tenue d'examiner d'office, au regard de chacune des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile, si une demande est nouvelle ; qu'en se bornant à rechercher si la demande de Mme [V] tendant à la conservation du nom marital pouvait être retenue comme étant l'accessoire de la demande en divorce sans rechercher si cette demande ne correspondait pas aux autres exceptions prévues par les articles 564 à 567 du code de procédure civile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdits articles. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 564 à 567 du code de procédure civile :

4. Il résulte de ces textes que la cour d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité, devant elle, de prétentions nouvelles ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard de chacune des exceptions qui y sont prévues.

5. Pour déclarer irrecevable comme nouvelle la demande de Mme [Z] tendant au maintien du nom marital, l'arrêt retient qu'il est impossible de prétendre qu'il s'agit d'une demande accessoire à la demande principale en divorce, dès lors que celle-ci a été définitivement jugée, l'appel étant limité aux conséquences du divorce, et qu'il s'agit en conséquence d'une demande nouvelle en appel, prohibée par l'article 564 du code de procédure civile.

6. En se déterminant ainsi, sans rechercher, même d'office, si cette demande ne constituait pas une autre des exceptions prévues par ces textes, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche en ce qu'il est dirigé contre la disposition de l'arrêt déclarant irrecevable la demande de Mme [V] tendant à l'organisation du droit de visite et d'hébergement du père et sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, en ce qu'il est dirigé contre la disposition de l'arrêt déclarant irrecevable la demande de Mme [V] fixant le montant de la contribution du père à l'entretien et l'éducation des enfants, réunis

Enoncé des moyens

7. Par son troisième moyen, Mme [V] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable pour la première fois en appel sa demande relative au droit de visite et d'hébergement du père, alors « que constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire ; que les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel ; que la cour d'appel a constaté que le juge de première instance avait statué sur les modalités de l'exercice de son droit de visite et d'hébergement par le père, que ce dernier sollicitait la confirmation du jugement sur ce point quand Mme [V] formait des demandes tendant à réformer les modalités du droit de visite et d'hébergement en fixant un délai de prévenance et en obligeant la père à exercer ses droits dans la première heure pour les weekends et dans la première journée pour les vacances ; que de telles demandes tendaient ainsi à obtenir un avantage autre que le rejet des demandes de M. [K] tendant à obtenir des modalités différentes d'exercice du droit de visite et d'hébergement ; qu'en retenant que les demandes de Mme [V] relatives aux modalités de l'exercice de son droit de visite et d'hébergement par le père ne constituaient pas des demandes reconventionnelles au motif que M. [K] ne demandait que la confirmation du jugement déféré et le rejet des demandes de Mme [V], la cour d'appel a violé l'article 567 du code de procédure civile. »

8. Par son quatrième moyen, Mme [V] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable pour la première fois en appel sa demande relative à la contribution du père à l'entretien et à l'éducation des enfants, alors « que constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire ; que la cour d'appel a constaté que le juge de première instance avait statué sur la contribution financière du père à l'entretien et à l'éducation des enfants dont il a fixé le quantum, que M. [K] sollicitait la confirmation du jugement sur ce point quand Mme [V] formait des demandes tendant à augmenter le montant de la contribution du père ; que de telles demandes tendaient ainsi à obtenir un avantage autre que le rejet des demandes de M. [K] afin d'obtenir une contribution plus élevée ; qu'en retenant que les demandes de Mme [V] relatives à la contribution du père à l'entretien et à l'éducation des enfants ne constituaient pas des demandes reconventionnelles au motif que M. [K] ne demandait que la confirmation du jugement déféré et le rejet des demandes de Mme [V], la cour d'appel a violé l'article 567 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 567 du code de procédure civile :

9. Selon ce texte, les demandes reconventionnelles sont recevables en appel.

10. Pour déclarer irrecevables les demandes présentées pour la première fois en appel par Mme [V] organisant le droit de visite et d'hébergement du père et fixant le montant de la contribution de celui-ci à l'entretien et l'éducation des enfants, l'arrêt retient qu'il ne s'agit pas de demandes reconventionnelles car M. [K] demandait la confirmation du jugement déféré et le rejet des demandes de Mme [V].

11. En statuant ainsi, alors que les demandes dont elle était saisie, qui tendaient à aménager les modalités du droit de visite et d'hébergement du père et augmenter le montant de la participation de celui-ci à l'entretien et l'éducation des enfants, revêtaient un caractère reconventionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables pour la première fois en appel les demandes de Mme [V], relatives au maintien de l'usage du nom marital, à l'organisation du droit de visite et d'hébergement du père et au montant de la contribution financière de celui-ci à l'entretien et à l'éducation des enfants et condamne Mme [Z] aux dépens, l'arrêt rendu le 28 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble autrement composée ;

Condamne M. [K] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C100674

Publié par ALBERT CASTON à 12:12  

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