Vente immobilière et principe de réparation intégrale

 

Cour de cassation - Chambre civile 3

  • N° de pourvoi : 23-16.299
  • ECLI:FR:CCASS:2025:C300260
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Cassation partielle sans renvoi

Audience publique du mercredi 28 mai 2025

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, du 27 avril 2023

Président

M. Boyer (conseiller doyen faisant fonction de président)

Avocat(s)

SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, SCP Françoise Fabiani - François Pinatel

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 28 mai 2025




Cassation partielle
sans renvoi


M. BOYER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 260 F-D

Pourvoi n° S 23-16.299




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025

1°/ M. [E] [M],

2°/ Mme [B] [V], épouse [M],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° S 23-16.299 contre l'arrêt rendu le 27 avril 2023 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile A), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [D] [P],

2°/ à Mme [R] [I],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Françoise Fabiani-François Pinatel, avocat de M. et Mme [M], de la SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de M. [P] et de Mme [I], après débats en l'audience publique du 1er avril 2025 où étaient présents M. Boyer, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire rapporteur, Mme Abgrall, conseiller faisant fonction de doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 27 avril 2023), par acte du 18 septembre 2017, M. et Mme [M] (les vendeurs) ont vendu à M. [P] et Mme [I] (les acquéreurs) une maison.

2. Se plaignant de problèmes d'évacuation des eaux usées, les acquéreurs ont, après expertise, assigné les vendeurs en réparation de leurs préjudices sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses cinq premières branches

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

4. Les vendeurs font grief à l'arrêt de les condamner à payer aux acquéreurs diverses sommes sur le fondement de la garantie des vices cachés et de rejeter leur demande de nullité du rapport d'expertise et de désignation d'un nouvel expert, alors « que les dommages et intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu'en fixant le préjudice de jouissance à la somme de 32 130 euros, soit 472,50 euros x 68 mois, après avoir retenu que la période à indemniser allait de mars 2018 à octobre 2022, soit 56 mois, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1645 du code civil et le principe de la réparation intégrale du préjudice :

5. Il résulte de ce texte et de ce principe que les dommages-intérêts alloués en réparation des dommages dont est responsable le vendeur qui connaissait les vices de la chose doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour l'acquéreur ni perte ni profit.

6. Pour allouer aux acquéreurs la somme de 32 130 euros en réparation de leur préjudice de jouissance, l'arrêt retient que le trouble subi du fait des désordres doit être réparé à hauteur de 472,50 euros par mois sur une période de 68 mois, arrêtée au mois d'octobre 2022.

7. En statuant ainsi, alors qu'il s'était écoulé moins de 68 mois entre la date d'emménagement des acquéreurs dans la maison en octobre 2017, et la fin de la période indemnisée, soit le mois d'octobre 2022, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. La cassation ne s'étend pas aux chefs de dispositif condamnant les vendeurs à payer aux acquéreurs des sommes à d'autres titres qu'à celui du préjudice de jouissance et rejetant la demande de nullité du rapport d'expertise et de désignation d'un nouvel expert, dès lors que les motifs critiqués par le moyen, pris en sa sixième branche, ne sont pas le soutien de ces dispositions.

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. Dès lors que les désordres préexistaient à la vente du 18 septembre 2017 et n'étaient toujours pas réparés en octobre 2022, les acquéreurs ont subi un préjudice de jouissance depuis leur emménagement dans la maison, en octobre 2017.

12. Les vendeurs seront, par conséquent, condamnés à payer aux acquéreurs en réparation de leur préjudice de jouissance la somme de 28 822, 50 euros ainsi calculée : 472,50 euros x 61 mois.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. et Mme [M] à payer à M. [P] et Mme [I] la somme de 32 130 euros en réparation de leur préjudice de jouissance, l'arrêt rendu le 27 avril 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne M. et Mme [M] à payer à M. [P] et Mme [I] la somme de 28 822,50 euros au titre de leur préjudice de jouissance ;

Dit n'y avoir lieu de modifier les condamnations aux dépens et aux frais irrépétibles prononcées par les juges du fond ;
Condamne M. [P] et Mme [I] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-huit mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2025:C300260

Publié par ALBERT CASTON à 16:26  

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