Afin de soutenir l’économie fragilisée par la crise de la Covid-19, le législateur a adopté une troisième loi de finances rectificatives pour 2020 comprenant un certain nombre de mesures incitatives.

Une de ces dispositions intéresse plus particulièrement les dons familiaux : il s’agit de l'instauration d'une nouvelle exonération de droits de mutation à titre gratuit des dons en espèces consentis entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021 lorsqu'ils sont affectés à la souscription au capital d'une petite entreprise, à la rénovation énergétique ou à la construction de la résidence principale (Loi de finances rectificative pour 2020 n°2020-935 du 30 juillet 2020 art. 19, I).

Le législateur a en réalité restauré un ancien dispositif d’exonération temporaire plafonné à 30.000 euros, mis en place en 2005 et qui a pris fin en 2013. Il était conditionné à l’affectation des fonds donnés aux souscriptions au capital de petites et de moyennes entreprises (P.M.E.).

Ce nouveau dispositif d'exonération de droits de donation est plus large par sa portée puisque son plafond est de 100.000 euros. Il ne concerne plus seulement le financement des entreprises mais tend également à soutenir le secteur de la construction et celui de la rénovation énergétique.

Le dispositif se limite toutefois aux petites entreprises. Limiter le bénéfice de l’exonération aux dons familiaux affectés au financement des « petites entreprises » à l’exclusion de celles répondant à la définition des moyennes entreprises permettait ainsi à la France d’être exemptée de l’obligation de notification préalable à la Commission Européenne relative aux aides d’Etat, ce qui aurait irrémédiablement retardé l’adoption de cette mesure.

L'exonération concerne les dons de sommes d'argent réalisés en pleine propriété. Les modalités de versement du don sont diverses : chèque, virement, mandat ou remise d'espèces.

Le dispositif s’applique aux dons constatés par acte notarié ou par acte sous seings privés. L’exonération concerne également les dons réalisés sans acte, à la condition toutefois qu’une déclaration de don manuel (imprimé n°2735) soit réalisée.

Le champ d'application de l'exonération est limité aux dons effectués au profit d'un enfant, d'un petit-enfant, ou d'un arrière-petit-enfant du donataire. Dans l'hypothèse où le donataire n'aurait pas d'enfant, de petit-enfant ou d'arrière-petit-enfant, l'exonération peut alors s'appliquer aux dons consentis au profit de ses neveux ou nièces.

A la différence du dispositif déjà existant d'exonération de dons familiaux de sommes d'argent (CGI, art. 790 G), aucune limite d'âge du donateur n'a été fixée par le législateur.

La condition principale du dispositif d’exonération réside dans l’affectation des sommes données. En effet, l’exonération ne s’applique que sous réserve que les fonds soient utilisés pour financer :

-        Soit la souscription au capital d'une « petite entreprise » au sens de la réglementation européenne ;

-        Soit des dépenses de travaux de rénovation énergétique dans la résidence principale du donataire ;

-        Soit la construction de la résidence principale du bénéficiaire.

Concernant les dépenses de construction de l’habitation principale du bénéficiaire de la donation, le législateur a écarté les dépenses affectées à l’acquisition de la résidence principale excluant ainsi du bénéfice de l’exonération le financement d’un logement déjà existant.

S’agissant des dépenses de travaux de rénovation énergétique, il est renvoyé au dispositif de versement de la prime de transition énergétique (article 15-II de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020). Sont éligibles au dispositif d’exonération les dépenses pouvant également bénéficier de cette prime et à la condition que les travaux concernent la résidence principale du donataire dont il est propriétaire.  

Sur la souscription au capital de petites entreprises, l’article 790 A bis du code général des impôts apporte un certain nombre de précisions qui sont autant de garde-fous destinés à prévenir les risques d’abus. 

Précisons à titre liminaire qu’il peut s’agir d’une souscription en numéraire initiale ou bien d’une souscription réalisée en cours de vie sociale à l’occasion d’une augmentation de capital.

Premièrement, l’entreprise-cible doit revêtir un certain nombre de caractéristiques.

Par « petites entreprises », il faut entendre celles relevant de la qualification de « jeunes pousses » conformément à l’annexe I du règlement européen n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014. Il s’agit donc des entreprises disposant de moins de cinquante salariés et de moins de dix millions d’euros de chiffre d’affaires annuel ou de chiffre total du bilan.

L’activité de l’entreprise doit avoir créée depuis moins de cinq ans et ne pas être issue d’une concentration.

A l’instar de ce qui était prévu pour l’ancien dispositif de réduction d’I.S.F. pour la souscription au capital d’entreprises (réduction « ISF-PME »), l’entreprise doit exercer une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Sont précisément exclues les activités financières, immobilières, (y compris de promotion immobilière), ainsi que les activités procurant des revenus garantis en raison de l'existence d'un tarif réglementé de rachat de la production ou bénéficiant d'un contrat offrant un complément de rémunération défini à l'article L 314-18 du Code de l'énergie.

Deuxièmement, c’est au donataire qu’il revient de remplir un certain nombre de conditions, le donataire doit, pendant au moins trois ans à compter de la souscription au capital, exercer dans la société son activité principale ou, si l’entreprise est soumise à l’impôt sur les sociétés, y exercer l’une des fonctions de direction visées par le dispositif d’exonération d’I.F.I. des actifs affectés à l’activité professionnelle du redevable (CGI, art. 975-III-1-1°).

L’exonération de droits de mutation à titre gratuit instaurée par l’article 790 A bis du CGI s’applique dans la limite de 100.000 euros et peut concerner plusieurs donations consenties par un même donateur. Toutefois, le donataire ne peut bénéficier du dispositif qu’une seule fois par donateur.

A défaut de précision textuelle, il faut comprendre que cette exonération peut se cumuler avec celle déjà prévue pour les dons familiaux en espèces et dont la limite est fixée à 31 865 euros (CGI, art. 790 G). Pour que ce cumul puisse s’appliquer, il faut que le donateur ait moins de quatre-vingts ans et que le bénéficiaire du don soit majeur.

Les droits de mutation à titre gratuit sont liquidés sur l’éventuelle fraction non exonérée de la donation. Si les conditions d’application sont réunies, les abattements personnels s’appliquent dans les conditions de droit commun. Pour rappel, cet abattement est de 100.000 euros sur la part de chacun des enfants du donataire si aucune donation taxable n’est intervenue au cours des quinze dernières années.

Le législateur empêche le cumul de l’exonération avec les autres avantages fiscaux que peut ouvrir droit le versement des sommes données. Sont ainsi visés par cette règle de non-cumul, les dispositifs suivants de réductions ou de crédits d’impôt sur le revenu :

-        le crédit d'impôt au titre de l'emploi d'un salarié au domicile ;

-        le crédit d'impôt au titre des dépenses de transition énergétique ;

-        la réduction d'impôt au titre de la souscription au capital de petites ou moyennes entreprises (P.M.E) (réduction d'impôt « Madelin ») ;

-        la réduction d'impôt sur le revenu au titre des investissements outre-mer ;

-        la réduction d'impôt au titre de la souscription en numéraire au capital d'une société foncière solidaire  ;

-        la réduction d'impôt sur le revenu au titre des intérêts d'emprunts contractés pour la reprise d'une P.M.E.

Les sommes versées ne peuvent pas plus venir en déduction d’un revenu imposable à l’impôt sur le revenu et ne peut accorder au donataire le bénéfice de la nouvelle prime de transition énergétique versée par l’Anah.