L'engouement pour les véhicules électriques n'a jamais été aussi fort. Ainsi, leurs ventes ont augmenté de près de 20 % en un an, boostées par la baisse de tarif de certains modèles et la prime à la converstion.

Problème, les solutions de recharge à domicile sont parfois inexistantes, notamment en copropriété où le coût des travaux peut effrayer certains syndicats de copropriétaires.

Afin d'accélérer cette transition, le gouvernement a décidé de simplifier la règlementation et d'offrir un véritable "droit à la prise" aux propriétaires de véhicules électriques.

C'est l'objectif de l'ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020 et du décret n° 2020-1720 du 24 décembre 2020.

Que contient précisément cette règlementation ? La réponse ci-dessous.

1/ Le principe

Le nouvel article L. 113-16 du code de la construction et de l'habitation dispose que :

" le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic ne peut s'opposer sans motif sérieux et légitime à l'équipement des places de stationnement d'installations dédiées à la recharge électrique pour véhicule électrique ou hybride rechargeable et permettant un comptage individualisé des consommations, par un locataire ou occupant de bonne foi et aux frais de ce dernier".

Ce texte impose deux conditions préalables pour que le droit à la prise puisse être invoqué :

- Le dispositif doit permettre d'individualiser la consommation 

- Les travaux ne doivent pas être à la charge de la copropriété.

En revanche, ce droit concerne aussi bien les propriétaires occupants que les locataires.

2/ La procédure à suivre

L'article R. 111-1 B du code de la construction (devenu R. 113-9 depuis le 1er juillet 2021) précise que lorsqu'un copropriétaire souhaite procéder à ces travaux, il doit notifier au syndic :

- Son intention de mettre en oeuvre son droit à la prise et donc de réaliser des travaux

- Un descriptif détaillé de ces travaux

- Un plan technique d'intervention et d'un schéma de raccordement électrique.

Cette notification doit obligatoirement être réalisée par lettre recommandée avec accusé de réception.

Si la demande émane d'un locataire, la notification doit être adressée au copropriétaire bailleur avec copie au syndic.

L'article L. 113-17 du code de la construction et de l'habitation ajoute qu'avant les travaux, une convention doit obligatoirement être conclue entre le syndic et le prestataire choisi afin de déterminer les conditions d'accès et d'intervention de ce dernier et les conditions d'entretien éventuel du système.

Cette convention doit être conclue dans un délai de deux mois.

Sa signature par le syndic ne nécessite pas de vote en assemblée générale des copropriétaires.

3/ Droit d'opposition du syndic

Qui dit droit à la prise ne dit pas droit illimité.

En effet, le syndic dispose d'un délai de trois mois à compter de la notification du copropriétaire pour s'opposer à ce projet, uniquement s'il justifie d'un motif sérieux et légitime.

La préexistance d'un réseau de recharge dans la copropriété constitue par exemple un motif sérieux et légitime.

Le syndic doit cependant et impérativement, pour faire valoir son droit d'opposition, saisir le président du tribunal judiciaire territorialement compétent selon la procédure accélerée au fond, lequel est seul à même d'apprécier la validité du motif invoqué par le syndic.

Le délai légal de trois mois est expréssement prévu à peine de forclusion c'est à dire que ce délai est insusceptible d'interruption ou de suspension (même par une lettre recommandée du syndic donc...).

En cas de saisine de cette juridiction, le syndic a l'obligation d'en informer le copropriétaire concerné dans un délai de 15 jours.

Il convient donc raisonnablement d'attendre que le délai d'opposition de trois mois (plus 15 jours) soit expiré pour commencer les travaux.

À défaut, le président du tribunal pourrait ordonner la remise en état des lieux voire des dommages et intérêts.

4/ Information du syndicat des copropriétaires

Dès lors que le syndic a connaissance de l'intention d'un copropriétaire de faire valoir son droit à la prise, il a l'obligation d'inscrire à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale cette information.

Cette mention est purement informative et ne peut en aucun cas donner lieu à un vote.

En résumé, le droit à la prise ne nécessite aucun vote en assemblée générale et le syndic ne peut s'y opposer que dans des cas limités et justifés.

Sous réserve de respecter la procédure, ce droit est donc plutôt simple à mettre en oeuvre.

En revanche, il peut s'avérer très couteux si aucun équipement ne préexiste et que les frais d'installation ne sont pas mis à la charge de la copropriété.

En pratique, il conviendra donc au préalable de se renseigner auprès du syndic sur les projets éventuels d'équipement de la copropriété en prises dédiées aux véhicules électriques voire même de sollciter que cette question soit portée à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale.

En effet, une prise en charge collective de ces installations permettrait d'en réduire le coût individuel et d'anticiper d'éventuelles tensions dans la copropriété relatives à leur déploiement.

Par ailleurs, la copropriété peut trouver de nombreux avantages à réaliser un équipement global des lieux de stationnement (réduction des coûts, plus-value, contrôle des travaux...).

C'est également l'occasion de mettre en concurrence les fournisseurs d'énergie.

Je reste à votre disposition pour vous conseiller utilement sur ce sujet.

Maître Arnaud Piard.