D’une part, aux termes de l’article L 267 du LPF, lorsqu'un dirigeant d'une société est responsable des manœuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, ce dirigeant peut être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal judiciaire.

Un dirigeant de société peut donc être tenu solidairement responsable des dettes fiscales de la société.

D’autre part, aux termes de l’article R* 196-1 du LPF, pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de  la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement.

La réclamation préalable, encore appelée recours administratif contentieux, est donc accompagnée de l’avis d’imposition ou de mise en recouvrement.

Le Conseil d’Etat considère que la signification du jugement au dirigeant déclaré responsable des manquements de la société ouvre à celui-ci, le délai de réclamation, sans qu’il ait à attendre que l’administration fiscale lui adresse un avis de recouvrement ou un premier acte de poursuites.

Ainsi, la réclamation présentée par le dirigeant d’une société déclaré solidairement responsable des impôt dus par la société, après que le jugement assorti de l’exécution provisoire lui a été signifié, ne peut être considérée comme prématurée, alors même qu’à la date à laquelle le directeur des services fiscaux a statué l’intéressé n’avait pas encore été personnellement mis en demeure d’acquitter les impositions en cause.

Au cas particulier, par un jugement en date du 15 janvier 2018, assorti de l'exécution provisoire, qui lui avait été signifié, un dirigeant de société avait été déclaré solidairement responsable du paiement des droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à la société.

L’intéressé a alors déposé une réclamation préalable, sans avoir encore reçu les avis de mise en recouvrement. Cette réclamation a été rejetée par l’administration fiscale, comme ayant été déposée prématurément, car l’intéressé n’avait pas encore été personnellement mis en demeure par l'administration fiscale d'acquitter les impositions en cause.

Le tribunal administratif de Marseille ayant été saisi, le président de la 7ème chambre, par une ordonnance du 16 mars 2020, a rejeté comme manifestement irrecevable parce que prématurée la demande du dirigeant à la décharge en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la société.

En appel, le président de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille, par une ordonnance du 17 juin 2020,  a rejeté la requête d'appel comme étant manifestement dépourvue de fondement.

Le dirigeant se pourvoit en cassation devant le Conseil d’Etat contre l'ordonnance du président de la 3ème chambre.

Le Conseil d’Etat lui donne raison en annulant l’ordonnance du président de la 3ème chambre, estimant qu’en jugeant que la réclamation préalable présentée par l’intéressé était irrecevable au motif qu'au 15 mars 2019, date à laquelle le directeur des services fiscaux a rejeté celle-ci, l’intéressé n'avait pas encore été personnellement mis en demeure par l'administration fiscale d'acquitter les impositions en cause, alors qu'il est constant que, par un jugement en date du 15 janvier 2018, assorti de l'exécution provisoire, qui lui avait été signifié, il avait été déclaré solidairement responsable du paiement des droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à la société, le président de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit.

CE 30-12-2021 n° 442804

Arnaud Soton

Avocat fiscaliste