Le Conseil d’Etat vient de rappeler douloureusement les conséquences pour le vendeur d’un bateau du défaut d’accomplissement des formalités au greffe par l’acquéreur (CE 13 septembre 2021, n° 443019 aux Tables).

 

Dans cette affaire, un vendeur avait cédé, par acte sous seing privé, le bateau dont il était propriétaire.

 

Près de deux ans plus tard, Voies navigables de France (VNF) avait émis à l’encontre du vendeur deux titres exécutoires portant avis de paiement au titre de l'occupation irrégulière du domaine public fluvial par ce bateau.

 

Le Conseil d’Etat a donné raison à VNF s’agissant du principal de l’indemnité représentative du montant de la redevance pour un stationnement mais a annulé la partie de la somme correspondant à la majoration de 100 % y associée.

 

En effet, s’agissant du principal, on sait que l'article 1583 du code civil prévoit que la vente est " parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé. ".

 

Cependant, le code des transports oblige le propriétaire de certains bateaux (dont faisait partie le bateau en litige) à l’immatriculer et prévoit expressément que la vente de ces bateaux n’a d’effet à l’égard des tiers qu’à compter de cette immatriculation.

Or, en l’espèce, le bateau dont la vente était intervenue par acte sous seing privé n’avait pas été immatriculé par les acquéreurs. Le Conseil d’Etat en conclut que cette vente n’était donc pas opposable aux tiers (dont VNF) ; La solution pouvait paraître d’autant plus sévère que le Conseil d’Etat a relevé lui-même que le vendeur avait pourtant accompli toutes les démarches, y compris contentieuses, pour contraindre les acquéreurs à accomplir ces formalités.

 

S’agissant de la majoration de 100% en revanche, le Conseil d’Etat a rappelé que VNF ne pouvait établir la majoration de 100 % au nom du vendeur au seul motif que la vente n'était pas opposable aux tiers. En effet, il convenait, conformément aux dispositions légales en la matière, rechercher si ce vendeur pouvait être regardé comme celui ayant commis l'infraction de stationnement sans autorisation, ou comme la personne pour le compte de laquelle cette infraction avait été commise, ou encore comme la personne ayant la garde effective du bateau.

 

Ayant cassé l’arrêt d’appel sur ce point, le Conseil d’Etat a ensuite évoqué l’affaire au fond et logiquement considéré que la majoration ne pouvait être appliquée au vendeur qui, ayant vendu son bateau par acte sous seing privé, ne pouvait être regardé ni comme la personne ayant commis l'infraction résultant du stationnement sans autorisation de ce navire sur le domaine public fluvial, ni comme celle pour le compte de laquelle cette infraction a été commise, ni comme ayant la garde du navire, cause de l'infraction.