Le Conseil d’Etat vient de préciser les modalités de calcul de l’indemnisation du manque à gagner d’un candidat illégalement évincé d’un marché public dans le cas où celui-ci est annuel et reconductible (CE 2 décembre 2019, n°423936 aux Tables).
Dans cette affaire, l’objet du marché était la fourniture de tous éléments bruts ou cuisinés et produits consommables et l'exécution d'une mission d'assistance technique aux opérations de restauration, pour un nombre de repas annuel prévisionnel de 390 000 et pour une durée de douze mois renouvelable deux fois.
Le marché avait été attribué à la société Sogeres et la société Valeurs Culinaires ainsi évincée a saisi le tribunal administratif d'Orléans en vue d’obtenir l’annulation du marché et l’indemnisation de son manque à gagner sur trois ans.
Le tribunal a rejeté sa demande mais la cour administrative d'appel de Nantes a annulé ce jugement et condamné le pouvoir adjudicateur à verser à la société Valeurs Culinaires une somme de 200 000 euros.
Celui-ci s’est pourvu en cassation et, par une décision du 29 mars 2019, le Conseil d'Etat n'a accepté d’examiner que les conclusions de la Cour concernant l’indemnisation du manque à gagner de la société Valeurs Culinaires pour une durée supérieure à douze mois.
Par son arrêt du 2 décembre dernier, le Conseil d’Etat a rappelé que lorsqu’un candidat à l'attribution d'un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce contrat et qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute résultant de l'irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à cause de son éviction, il appartient au juge de vérifier si le candidat était ou non dépourvu de toute chance de remporter le contrat.
De deux choses l’une :
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Soit le candidat évincé n’avait aucune chance et, il n'a droit à aucune indemnité.
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Soit il est estimé que le candidat évincé avait une chance de remporter le marché et il a droit en seulement au remboursement des frais qu'il a engagés pour présenter son offre mais aussi à l’indemnisation de son manque à gagner.
C’est à ce stade que le Conseil d’Etat précise que, contrairement à ce qu’avaient considéré les juges d’appel, dans le cas où le marché est susceptible de faire l'objet d'une ou de plusieurs reconductions, le manque à gagner ne revêt un caractère certain « qu'en tant qu'il porte sur la période d'exécution initiale du contrat, et non sur les périodes ultérieures qui ne peuvent résulter que d'éventuelles reconductions ».
Au cas particulier, la période initiale du marché portant sur douze mois, le Conseil d’Etat a considéré que le manque à gagner susceptible de donner lieu à l'indemnisation de la société Valeurs Culinaires ne pouvait aller au-delà de cette période, nonobstant les possibilités de renouvellements deux fois qu’il prévoyait.
Catherine TAURAND
Avocat droit public droit fiscal
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