Dans son arrêt du 11 avril 2018 (CAA Paris 11 avril 2018 n°1702028, CSA), le juge administratif s’est penchée sur le cas d’un agent qui avait été licencié à l’issue d’une période d’essai qui elle-même était illégale.

 

Dans cette affaire, l’agent avait été recrutée par le conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), en qualité de chargée de mission, par un contrat de six mois. Ce contrat avait été renouvelé pour trois mois.

 

Puis, par un troisième contrat, elle avait été recrutée, toujours comme chargée de mission pour une durée de trois ans.

 

Ce dernier contrat comportait une période d'essai, et c’est à l’issue de celle‐ci que le directeur général du CSA a mis fin au contrat de l’agent.

 

1. Le premier enjeu de l’affaire était de savoir si la période d’essai avait légalement pu être prévue au dernier contrat, alors que l’agent avait déjà démontré ses compétences au cours du premier contrat renouvelé de surcroît.

 

En effet, le décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’Etat prévoit la possibilité d’inclure dans un CDD une période d’essai mais imposer une période d’essai est impossible si, dans le cadre d’un précédent contrat conclu pour occuper les mêmes fonctions avec le même employeur, une période d’essai avait déjà été prévue. En effet, dans un tel cas, l’employeur a déjà pu apprécier au cours de cette période d’essai et du précédent contrat les capacités

professionnelles de l’agent.

 

L’enjeu est important car la décision de mettre fin au contrat à l’issue de la période d’essai n’est entourée que de très faibles garanties pour l’agent alors que le licenciement en cours de contrat doit respecter une procédure très stricte et emporte des conséquences pécuniaires.

 

Sur ce point, par un considérant particulièrement motivé, la Cour a considéré que l’agent se trouvait dans une situation qui s’opposait à ce qu'une période d'essai pût être prévue dans son contrat.

 

Il en a conclu que le licenciement litigieux ne pouvait donc être considéré comme intervenu à l'issue de la période d'essai mais qu’il s’agissait d’un licenciement décidé en cours de contrat avec toutes les garanties et obligations procédurales que cela impliquait et, qui, en l’espèce, n’avaient pas été respectées.

 

Pour conclure en ce sens, la Cour a relevé que les trois contrats s’étaient succédés sans aucune interruption, que les fonctions pour lesquelles l’agent avait été recrutée par le dernier contrat n’étaient pas différentes de celles pour lesquelles elle avait antérieurement été employée  et que ces fonctions s’inscrivaient dans la continuité de celles qu'elle avait exercées sous les mêmes autorités hiérarchiques dans le cadre de ses précédents contrats.

 

2. Le second enjeu était de savoir si ce licenciement, déjà illégal pour des motifs de légalité externe, était justifié sur le fond ou non.

 

La réponse à cette question déterminait la responsabilité du CSA et par conséquent le droit de l’agent à être ou non indemnisée de l’ensemble des préjudices subis du fait de ce licenciement illégal.

 

Sur ce point, la cour considère qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que l’agent était employée par le CSA depuis près d'un an, à la suite de trois contrats successifs, que l'insuffisance professionnelle de l'intéressée aurait été décelée et aurait fait l'objet d'observations.

 

A cet égard, la Cour ne s’est pas laissée abuser par  un courriel que le CSA avait adressé à l’agent deux semaines seulement avant la décision de licenciement faisant soudainement état d’insuffisance professionnelle.

 

La Cour a donc jugé que l’ insuffisance professionnelle de nature à justifier son licenciement n’était pas établie et que la décision de licenciement devait donc être regardée comme entachée d'une erreur d'appréciation ouvrant droit à indemnisation de la requérante.

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Catherine TAURAND

Avocat droit public – droit fiscal

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