Face à des défaillances ou la non -exécution de ses obligations par l’administration, certaines sociétés ayant conclu un contrat avec  une personne publique décident soit de ne pas exécuter leurs propres obligations contractuelles  soit de résilier unilatéralement le contrat.

Selon l’adage selon lequel on ne peut pas se faire justice soi - même, ce comportement est illégal, même face à l’administration, avec laquelle le rapport de force est parfois très déséquilibré.

Cependant, le Conseil d’Etat rappelle que les parties (une société et une personne publique) peuvent prévoir dans un contrat les conditions auxquelles le cocontractant de la personne publique peut résilier le contrat en cas de méconnaissance par cette dernière de ses obligations contractuelles (CE 8 octobre 2014, n° 370644, Société Grenke location au Lebon).

Attention aux deux limites de cette possibilité :

  • Elle est exclue lorsque le contrat a pour objet l'exécution même du service public
  • Lorsqu’elle est prévue, cette clause ne permet pas à la société de procéder à la résiliation sans avoir mis à même, au préalable, la personne publique de s'opposer à la rupture des relations contractuelles pour un motif d'intérêt général, tiré notamment des exigences du service public. Lorsqu'un motif d'intérêt général lui est opposé, le cocontractant doit poursuivre l'exécution du contrat. Un manquement de sa part à cette obligation est de nature à entraîner la résiliation du contrat à ses torts exclusifs. Il reste alors au cocontractant de contester devant le juge le motif d'intérêt général qui lui est opposé afin d'obtenir la résiliation du contrat.

Dans cette affaire, un service du ministère de la culture et de la communication et la société Grenke location avaient conclu un contrat par lequel la société Grenke location s'engageait à acheter auprès d'un fournisseur désigné cinq photocopieurs pour les donner ensuite en location à la personne publique pour une durée de soixante-trois mois moyennant un loyer trimestriel de 5 563 euros.

La personne publique ayant cessé de régler les loyers trimestriels dès le 27 mai 2008, la société Grenke location avait résilié ce contrat, en application de la clause contractuelle prévue à cet effet.

 

La Cour avait écarté l’application de la clause contractuelle prévoyant la résiliation « en raison de leur illégalité (…) au seul motif qu'elles permettaient au cocontractant de l'administration de résilier unilatéralement le contrat en cas de retard de paiement des loyers ».

Le Conseil d’Etat a, à bon droit, censuré ce raisonnement car une telle clause peut être prévue au contrat  et la Cour aurait dû rechercher si ladite clause répondaient aux conditions et limites rappelées ci-dessus avant d’en écarter l’application.

Catherine Taurand
Avocat droit public - droit fiscal

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