En cas de faute grave du professionnel de santé, selon la Cour de cassation, la résiliation du contrat d’exploitation ou d’exercice doit être prononcée avec un effet immédiat excluant la réalisation d’un préavis même de courte durée (Cass. 1ère civ., 14 nov. 2018, n°17-23.135).
La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 14 novembre 2018, a affirmé que la résiliation pour faute grave était incompatible avec la réalisation d’un préavis.
En l’espèce, un établissement de santé avait conclu une convention avec un radiologue, le 21 décembre 2010, pour l’exploitation d’un scanographe à usage médical, chacune des parties pouvant y mettre fin moyennant un préavis de six mois. La rupture du contrat par la clinique entrainait le paiement d’une indemnité au bénéfice du praticien d’un montant équivalent à une année de chiffre d’affaires. Il était prévu, en cas de faute grave de la part du professionnel de santé, la résiliation de la relation contractuelle sans indemnité ni préavis.
Par avenant, l’établissement de santé avait accepté la transmission de ce contrat à la SELAS constituée par le radiologue et agréé deux autres praticiens devant l’intégrer.
En 2014, la clinique a mis fin au contrat, accordant à la société un préavis de six mois, et argué d’un certain nombre de griefs à l’égard du radiologue, signataire de la convention du 21 décembre 2010, pour s’opposer au versement de l’indemnité de résiliation à la société. Celle-ci a, alors, assigné son cocontractant pour obtenir, notamment, le paiement de cette indemnité.
La Cour d’appel de Paris a, par arrêt du 15 juin 2017, écarté l’existence d’une faute grave et condamné la clinique à régler à la société l’indemnité de résiliation.
La Haute Juridiction a considéré que la décision déférée se trouvait légalement justifiée de ce chef et jugé qu’une faute grave, par son importance, rendait impossible le maintien d’un contrat d’exploitation ou d’exercice conclu entre un professionnel de santé ou une société professionnelle et un établissement de santé pendant une durée même limitée. La qualification de faute grave ne pouvait qu’être écartée si la résiliation n’avait pas été prononcée avec un effet immédiat.
On rappellera que dans un arrêt « Clinique les Ormeaux » rendu le 13 octobre 1998, la Cour de cassation avait jugé que « la gravité du comportement d’une partie à un contrat peut justifier que l’autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls, et que cette gravité, dont l’appréciation qui en est donnée par une autorité ordinale ne lie pas les tribunaux, n’est pas nécessairement exclusive d’un délai de préavis […] » (Cass. 1ère civ., 13 oct. 1998, n°96-21.485).
La jurisprudence admettait ainsi que l’établissement de santé puisse rompre le contrat d’exercice libéral du praticien pour faute grave et accorder à ce dernier le bénéfice d’un préavis. La réalisation du préavis n’était donc pas incompatible avec l’existence d’une faute grave.
La Haute Juridiction n’était pas revenue sur sa position, avant l’arrêt du 14 novembre 2018, rejetant peu de temps auparavant le pourvoi d’un professionnel de santé débouté de ses demandes indemnitaires pour rupture abusive de son contrat d’exercice libéral et dont la convention avait été rompue par la clinique pour faute grave à l’issue d’un préavis de six mois (Cass. 1ère civ., 5 avr. 2018, n°17-11.897).
Dans son arrêt du 14 novembre 2018, la première chambre civile de la Cour de cassation a donc retenu une définition de la faute grave similaire à celle donnée par la chambre sociale lorsque les faits reprochés au salarié sont de nature à rendre indispensable son départ immédiat de la société, à savoir une faute rendant impossible le maintien de l’employé au sein de l’entreprise (Cass. soc., 27 sept. 2007, n° 06-43.867).
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