Mutuelle obligatoire,  ruptures conventionnelles,  plafonds d’indemnités prud’homales…

 

Déconnectez !  Intéressons-nous à une délibération de la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés).

 

La CNIL a actualisé les règles fixées en 2006.

 

Rappelons que l’employeur qui souhaite installer un dispositif de géolocalisation dans les véhicules mis à disposition de ses salariés doit, outre ses obligations d’information-consultation, le déclarer à la CNIL au moyen d’une déclaration simplifiée de conformité.

 

Discrètement, la CNIL vient de modifier cette norme par une délibération n°2015-165 du 4 juin 2015.

 

Les entreprises ayant déjà effectué la déclaration en référence à la précédente norme et qui ne respectent pas les conditions fixées par la nouvelle norme ont jusqu’au 17 juin 2016 pour se mettre en conformité.

 

La CNIL rappelle les finalités de la géolocalisation : comme par exemple, la sûreté ou la sécurité du salarié lui-même ou des marchandises ou véhicules dont il a la charge, en particulier la lutte contre le vol du véhicule, ou la justification d’une prestation auprès d’un client ou d’un donneur d’ordre….

 

Par contre, la CNIL se refuse à ce que la géolocalisation soit utilisée par l’employeur pour surveiller les salariés.

 

 

Plusieurs garde-fous sont posés.

 

Par exemple, les outils de géolocalisation permettent de constater les dépassements de limitations de vitesses, qui constituent des infractions au Code de la route. Le nouvel article 3 rappelle qu’il est interdit de traiter des données relatives à la vitesse maximale. Seul le  traitement de la vitesse moyenne peut être traité. Un employeur ne pourra donc pas utiliser des données relatives aux dépassements de vitesse pour prendre des sanctions disciplinaires contre un salarié.

 

Cependant, chaque interdiction comporte des failles ; on pourrait imaginer de se servir des données relatives à la vitesse moyenne pour démontrer que le salarié a forcément dépassé les limitations de vitesse entre deux endroits donnés.

 

De même, la CNIL insiste sur le fait que le dispositif ne peut être utilisé pour contrôler le temps de travail des salariés que lorsque ce suivi ne peut être réalisé par un autre moyen.

 

La chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 3 novembre 2011 avait déjà jugé que ces données n’avaient pas pour finalité de contrôler le suivi du temps de travail.

 

La nouvelle norme de la CNIL pose aussi une autre interdiction très forte. L’employeur ne peut plus recueillir des données de géolocalisation sur les trajets domicile/travail ou pendant le temps de pause de ses salariés. L’ancienne norme de 2006 ne comportait pas cette interdiction et donnait seulement le droit pour les employés de désactiver la fonction de géolocalisation de leur véhicule à l’issue de leur temps de travail.

 

L’article 6 précise désormais que « les employés doivent avoir la possibilité de désactiver la fonction de géolocalisation des véhicules, en particulier à l’issue de leur temps de travail ou pendant leur temps de pause ».

 

Le droit à la désactivation reconnu au salarié est donc renforcé.

 

En contrepartie, l’employeur est autorisé à garder un droit de regard sur les désactivations du dispositif de géolocalisation par les salariés. L’article 3 stipule que l’employeur peut désormais collecter et traiter « la date et l’heure d’une activation et d’une désactivation du dispositif de géolocalisation pendant le temps de travail ». Ce droit de l’employeur n’était pas prévu par l’ancienne norme.

 

On peut en déduire que si elles sont trop fréquentes ou trop longues, l’employeur pourrait demander des explications au salarié et éventuellement prendre des mesures disciplinaires.

 

Il faudra cependant être prudent dans l’usage du contrôle de la désactivation dans la mesure où en théorie le dispositif de géolocalisation ne doit pas avoir comme finalité  le contrôle du temps de travail.

 

On peut penser que les tribunaux ne suivront l’employeur que lorsque des abus véritablement importants seront constatés.

 

 

Cette notion de droit à la déconnexion se retrouve dans le rapport qui vient d’être rendu le 15 septembre 2015 par M. METTLING, directeur général adjoint d’Orange, chargé des ressources humaines.

 

Selon M. METTLING, le numérique est certes « une opportunité pour penser différemment le fonctionnement de l’entreprise au quotidien, mais il peut aussi être porteur de risques pour la santé des salariés » ; l’utilisation des micro-ordinateurs, des tablettes et smartphones conduit parfois à « une surcharge informationnelle et communicationnelle »  avec le risque d’engendrer de l’inefficacité, voire du stress et de développer des risques psychosociaux. Il propose d’instaurer un droit à la déconnexion professionnelle par négociation d’entreprise. Cela pourrait  passer par l’interdiction d’envoyer des mails le week-end, en soirée…

 

Le droit à la déconnexion s’invite donc dans notre droit du travail.

 

Alors, on déconnecte  et on prend le temps de consulter un avocat !