En réformant la protection juridique des majeurs, le législateur a souhaité garantir à tout citoyen le droit d'être protégé pour le cas où il ne pourrait plus s'occuper seul de ses intérêts.

1. Rappel des droits et libertés garantis aux personnes majeures sous curatelle ou tutelle

La loi du 5 mars 2007 a renforcé la protection de la personne du majeur protégé et de ses biens qui s'exerce désormais en vertu de principes énoncés dans la CHARTE DES DROITS ET LIBERTÉS DE LA PERSONNE MAJEURE PROTÉGÉE parmi lesquels figurent, notamment :

- La liberté des relations personnelles (art. 4).

- Le droit au respect des liens familiaux (art. 5),

- Le droit à l’information (art. 6),

- Le consentement éclairé et la participation de la personne (art. 9),

- Et le droit à une intervention personnalisée : c’est-à-dire que dans le cadre de la mise en œuvre de la mesure de protection (tutelle ou curatelle), la personne bénéficie d'une intervention individualisée de qualité favorisant son autonomie et son insertion.

Sa situation fait l'objet d'une évaluation régulière afin d'adapter le plus possible l'intervention à ses besoins.

Les conséquences affectives et sociales qui peuvent résulter de la mise en œuvre de la mesure de protection sont prises en considération (art. 10).

2. Violation des droits du majeur protégé et perte de la relation de confaince envers le tuteur

Rappelant expressément que les droits fondamentaux garantis au majeur protégé doivent être respectés, le 16 janvier 2018 la Cour d’Appel de TOULOUSE a annulé la décision du Juge des tutelles ayant fixé le lieu de vie du majeur protégé en EHPAD sans recueillir son avis et, déchargé le tuteur de ses fonctions en raison de la perte de la relation de confiance.

Motifs de l'arrêt de la Cour d'appel de TOULOUSE :

  • Sur le lieu de vie, l’article 459-2 du Code civil prescrit que la personne protégée choisit le lieu de sa résidence et que le juge statue en cas de difficultés.

L’article 457-1 précise quant à lui que la personne protégée reçoit toutes les informations sur sa situation personnelle et les mesures à prendre, en ce compris les conséquences d’un refus de sa part.

Enfin, il est de principe général que toute personne doit être entendue par le juge lorsqu’une décision qui la concerne doit être prise, ne serait-ce que pour recueillir son avis puisque la loi prévoit que la décision lui appartient.

Ce n’est qu’en cas d’impossibilité médicale que le juge peut ne pas respecter le principe contradictoire.

En l’espèce, la personne protégée a su interjeter appel, ce qui démontre qu’elle est capable d’émettre un avis sur les décisions qui la concerne.

Or, lorsqu’elle a été entendue par le juge des tutelles, la question de son lieu de vie n’a pas été abordée de manière claire et nette.

La question a été posée par le juge des tutelles à son frère et à ses sœurs, certes en présence de Mme A., mais sans qu’elle ne soit directement interpellée.

Mme A. quant à elle ne s’est exprimée que sur son maintien en maison de convalescence dans lequel elle était alors, sans que la question d’une admission en maison de retraite ne lui ait été clairement posée.

En conséquence, la personne protégée n’a pas été entendue expressément et clairement sur la question de son lieu de vie.

La décision en cause doit donc être annulée.

  • Sur le changement de tuteur

(...) Le fait que la personne protégée ne puisse plus envisager de relations sereines avec sa tutrice, Mme B.  justifie, dans un contexte de remise à plat des relations de chacun, qu’un nouveau mandataire judiciaire à la protection des majeurs soit désigné.


Claudia CANINI

Avocat à la Cour

Droit des majeurs protégés

www.canini-avocat.com

Sources : CA TOULOUSE, Chambre de la Famille, Protection juridique, arrêt n°15, 16 janvier 2018

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