J’ai eu l’occasion de plaider une affaire devant le Conseil de prud’homme au sujet d’une rupture conventionnelle remise en cause par l’une des parties.
Un conseiller a cru bon m’interroger en ces termes : « mais pourquoi un employeur signerait-il une rupture conventionnelle ? Quel intérêt pour lui ? » Selon ce conseiller, un employeur qui signe une rupture conventionnelle a forcément quelque chose à se reprocher…
Petit rappel : la #ruptureconventionnelle est un mode de rupture par lequel l’employeur et le salarié, ensemble, décident de rompre le contrat de travail.
Ce mode de rupture a été créé car il était nécessaire : en pratique, il arrive souvent que les deux parties aient intérêt à se séparer. Or, avant 2008, le seul moyen était de faire un « licenciement amiable » (terme d’une langage courant, notion sans existence juridique), c’est-à-dire simuler un motif de licenciement, suivre la procédure puis signer une transaction par laquelle le salarié renonce à toutes poursuites judiciaires et l’employeur accorde en retour une indemnité supplémentaire.
Il était donc temps d’admettre que OUI, un employeur et un salarié peuvent être d’accord sur leur séparation !
L’intérêt principal pour un salarié est d’être éligible aux allocations chômage (s’il en remplit les conditions) là où une démission le priverait de ce privilège.
Autre intérêt : l’indemnité de rupture conventionnelle est au minimum égale à l’indemnité de licenciement mais elle peut faire l’objet d’une négociation et être donc supérieure.
Vous voulez un autre intérêt ? Il n’y a pas de préavis ! La procédure dure environ 1,5 mois là où un préavis de démission dure en général 2 à 3 mois.
Et bien sûr, ce motif est moins infamant qu’un licenciement.
Côté employeur, quel intérêt alors ?
Contrairement à une croyance populaire, certains employeurs apprécient l’idée de se « quitter bons amis » (si,si…) La rupture conventionnelle permet de maîtriser le calendrier et se mettre d’accord sur une date de sortie.
Enfin, d'un point de vue strictement juridique, une rupture conventionnelle (en comparaison à une démission ou à un licenciement) présente un risque prud'homal très limité.
Celle-ci ne peut être remise en cause par le salarié qu'à la condition de démontrer un vice du consentement (ex : avoir signé la rupture conventionnelle après avoir subi des mois de harcèlement moral ou signer une rupture conventionnelle avec son employeur suite à une promesse (non honorée) d'embauche par une autre filiale du groupe) ou dans l'hypothèse d'une irrégularité de procédure.
Fait intéressant n° 1 : La rupture conventionnelle n'est pas un droit, un employeur n'a jamais l'obligation de l'accepter, même s'il a accédé à la demande d'un autre salarié précédemment.
Fait intéressant n° 2 : Le seul fait que le salarié ait été "menacé" d'une procédure de licenciement ne suffit pas à démontrer un vice du consentement et ne suffit donc pas à remettre en cause la validité de la rupture conventionnelle. Un salarié peut donc parfaitement, alors qu'il est convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, tenter de négocier à la place une rupture conventionnelle : moins infamante pour lui, plus sécurisante pour l'employeur !
A bon entendeur... ;)
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