CE, 22 juill. 2023, Sociétés NGE Génie civil et autres, n° 494323
Dans une décision du 22 juillet 2025, le Conseil d’Etat rappelle que les dispositions de l’article L. 2192-14 du code de la commande publique interdisent de façon absolue toute renonciation aux intérêts moratoires dus en raison de retards dans le règlement des marchés publics, que cette renonciation intervienne lors de la passation du marché ou postérieurement.
Pour les entreprises titulaires d’un marché public de travaux, les intérêts moratoires dus pour le retard de paiement du solde du marché peuvent représenter un levier de négociation important dans le cadre du règlement financier du marché avec le maître d’ouvrage.
Lorsque l’entreprise n’accepte pas le décompte général notifié par le maître de l’ouvrage, elle peut, en cas de rejet de son mémoire en réclamation, porter ses demandes (paiement des travaux prévus au contrat, rémunération des travaux supplémentaires, indemnité pour les difficultés rencontrées pendant l’exécution du marché, contestation des pénalités appliquées par le maître d’ouvrage, etc.) devant les tribunaux administratifs.
Le délai moyen d’instruction devant les tribunaux administratifs est d’environ 3 années pour les litiges relatifs au décompte général d’un marché public de travaux. Le temps joue donc en faveur de l’entreprise et le montant des intérêts moratoires dus pour le retard de paiement du solde du marché, avec capitalisation lorsqu’ils sont dus pour au moins une année entière, peut rapidement représenter une dépense significative pour la personne publique en cas de condamnation en justice.
Préférant anticiper l’aléa judiciaire inhérent à chaque instance en cas de recours contentieux, il arrive ainsi fréquemment que les maîtres d’ouvrage acceptent, bon gré mal gré, de faire droit à des postes figurant dans le projet de décompte final de l’entreprise ou dans le mémoire en réclamation qu’elle a ensuite présenté sur le décompte général, en contrepartie d’une renonciation par cette dernière à tout ou partie des intérêts moratoires dus au titre du retard de paiement du solde du marché de travaux.
Lorsque l’accord des parties est concrétisé par un contrat de transaction, les parties s’accordent la plupart du temps sur une somme globale valant "solde de tout compte", avec la mention "tous intérêts compris".
Le Conseil d’Etat rappelle que les dispositions de l’article L. 2192-14 du code de la commande publique interdisent de façon absolue toute renonciation aux intérêts moratoires dus en raison de retards dans le règlement des marchés publics, que cette renonciation intervienne lors de la passation du marché ou postérieurement (CE, 22 juill. 2025, Sociétés NGE Génie civil et autres, n° 494323).
La somme que doit verser le maître de l’ouvrage à ses cocontractants, fût-ce au terme d’une transaction, intervient nécessairement en règlement du marché public de travaux, auquel doit s’appliquer, jusqu’à son paiement effectif, les intérêts moratoires dus en raison de retards dans le règlement des marchés publics et sans que la signature de cette transaction puisse y faire obstacle.
Autrement dit, même lorsqu’elles signent une transaction, les parties à un marché public de travaux ne peuvent jamais renoncer aux intérêts moratoires.
Si cette pratique récurrente bien qu’illégale lors de la signature des transactions permet le plus souvent d’arriver à un accord entre les parties, elle a directement pour effet de fragiliser juridiquement le contrat et, donc, l’accord des parties.
Le Cabinet PERRIEZ Avocat assiste les acheteurs publics (Etat, collectivités territoriales, établissemnents publics, etc.) et privés (concessionnaires, entreprises titulaires d'un marché public) dans la passation et l’exécution de leurs marchés publics.
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