Le référé expertise est une procédure très souvent utilisée en cas de litiges nés à l’occasion de la construction d’un ouvrage. Cette procédure permet d’obtenir une expertise technique afin de déterminer la cause des dommages (désordres) rencontrés sur une construction ainsi que les travaux de reprise à envisager pour y remédier. Ce guide synthétique vous permettra de comprendre en quoi consiste le référé expertise, son déroulement, ainsi que son importance dans les litiges nés à l’occasion d’un chantier.
I - Qu’est-ce que la procédure de référé expertise ?
Le référé est la voie privilégiée pour obtenir dans des délais assez courts (en fonction des affaires et des juridictions) une décision appelée « ordonnance », rendue par le Président du tribunal.
Il s’agit d’un référé dit « probatoire » dans la mesure où il permet de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige.
Son fondement juridique se trouve à l’article 145 du Code de procédure civile :
« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».
C’est donc un préalable à une action ultérieure au fond, dont l’objet sera de trancher le litige (responsabilités encourues, indemnisations…).
Il est question d’obtenir la désignation d’un expert neutre et impartial choisi sur une liste officielle établie par les cours d’appel, afin qu’il analyse les éléments techniques du litige.
En matière de construction, le référé expertise est principalement utilisé pour déterminer la cause des défauts de construction, des malfaçons, des inachèvements ou des dommages survenus à l’occasion des travaux afin de mettre en lumière les responsabilités encourues.
Il est également important pour le demandeur de pouvoir déterminer les travaux réparatoires à entreprendre et leur coût.
II - Déroulement du référé expertise en matière de construction.
La procédure de référé expertise commence par une assignation devant le Président du tribunal territorialement compétent, c’est-à-dire celui du lieu où se trouve la construction litigieuse.
Cette assignation doit impérativement exposer de manière précise les motifs légitimes qui justifient la mesure d’expertise.
Sur ce point, il est important de se prémunir d’un procès-verbal de constat établi par un commissaire de Justice et/ou d’un rapport d’expertise privée listant les désordres constatés sur l’ouvrage.
Attention : la mission de l’expert sera limitée à celle définie dans l’ordonnance de référé. Il est donc important de bien détailler les chefs de mission dans l’assignation en fonction du cas d’espèce (exemples : liste précise des désordres, préjudices à évaluer…)
Une fois la demande d’expertise acceptée par le juge des référés, un expert est nommé avec une mission précise, et mènera ses investigations au contradictoire des parties assignées.
L’expert examine alors le chantier, analyse les documents techniques et rencontre les parties pour recueillir leurs observations sous forme d’écrits appelés des « dires à expert ».
Les observations et pièces des participants aux opérations d’expertise doivent être communiquées à l’expert ainsi qu’à tous les autres participants, dans le respect du contradictoire.
Au terme de ses investigations, l’expert rédige un rapport détaillé contenant ses conclusions et recommandations.
C’est sur la base de ce rapport, qui n’est pas une décision de justice, que les parties peuvent envisager une issue amiable ou un procès.
III - L’intérêt du référé expertise dans les litiges de construction.
Le référé expertise revêt un grand intérêt dans les litiges de construction, notamment pour les raisons suivantes :
- Il permet d’obtenir une évaluation impartiale des problèmes techniques rencontrés sur la construction.
- L’analyse technique de l’expert doit permettre aux parties de prendre des décisions éclairées quant aux chances de succès des procédures à initier et au montant des indemnités susceptibles d’être réclamées.
Le rapport d’expertise peut ainsi servir de base à la conclusion d’un protocole d’accord transactionnel ou à l’introduction d’une action en justice. - D’un point de vue procédural, l’assignation en référé expertise permet d’interrompre les délais de prescription et de forclusion.
Ainsi, à titre d’exemple en matière de responsabilité civile décennale (garantie décennale) : l’assignation en référé expertise délivrée à un constructeur dans le délai de dix à compter de la réception de l’ouvrage permet d’interrompre le délai pour agir et d’en faire courir un nouveau de même durée à compter de l’ordonnance de référé [1].
IV - Récapitulatif des principales étapes.
1. Demande en référé par voie d’assignation.
2. Désignation d’un expert en matière de construction par ordonnance de référé.
3. Opérations d’expertise : réunions, échanges de dires, analyses techniques, pré-rapport, etc.
4. Rapport d’expertise définitif.
5. Choix du demandeur : transiger, agir en justice.
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