Le licenciement pour faute grave du salarié est sans cause réelle et sérieuse dès lors qu’il repose sur des images de vidéosurveillance considérées comme illicites en raison de l'absence d'information du salarié de l'existence du système de surveillance. 

Rappel : L’employeur qui met en place un système de vidéosurveillance est soumis à plusieurs obligations.

Tout d’abord, il doit informer les salariés de l’installation d’un système de vidéosurveillance et de l’usage qui pourrait en être fait à leur encontre. À défaut, toute information collectée par ce biais est considérée comme illicite et ne peut être utilisée à l’appui d’un licenciement.

Sur ce point, la jurisprudence a déjà posé qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à sa connaissance (c. trav. art. L. 1222-4 ; cass. soc. 7 juin 2006, n° 04-43866, BC V n° 206).

Par ailleurs, l’employeur est également tenu de consulter le comité d’entreprise / le comité social et économique d’une entreprise d’au moins 50 salariés, préalablement à la décision de mise en œuvre dans l'entreprise de moyens ou techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés (c. trav. art. L. 2323-32 pour le CE et L. 2312-38 pour le CSE)

En tout état de cause, en application de l’article L 1121-1 du Code du travail, le procédé de contrôle ou de surveillance de l’activité choisi par l’employeur doit être justifié par la nature de la tâche à accomplir et proportionné au but recherché. L’employeur devra donc veiller à ce que la mesure de surveillance mise en place réponde à un besoin précis lié à l’activité de l’entreprise (par exemple la vidéosurveillance dans les banques a pour objet de prévenir les vols, idem dans les supermarchés, les ouvriers routiers se voient soumis à des contrôles d’alcoolémie).

La CNIL a notamment considéré qu’était excessive l’installation de 8 caméras filmant de manière constante 8 salariés (Cnil, décision n°2011,036, 11 décembre 2011 ; Délib. Cnil n°2012-475, 3 janvier 2013)

  • Outre le respect d’un process défini par la loi, l’employeur ne peut pas installer des caméras de surveillances uniquement pour contrôler les salariés. La mesure utilisée doit être adaptée et non excessive.

En l’espèce, une salariée travaillait dans un restaurant où son employeur avait installé 4 caméras de surveillance. Leur présence était signalée aux clients par une affiche à l’entrée du restaurant.

Les caméras avaient filmé la salariée servant des consommations sans les enregistrer à la caisse et mettant l’argent à côté de celle-ci pour ensuite le déposer dans son vestiaire.

L’employeur, se fondant sur ces enregistrements, avait mis la salariée à pied à titre conservatoire, porté plainte et procédé à son licenciement pour faute grave.

Devant les gendarmes, la salariée confrontée aux images de la vidéosurveillance, avait reconnu le vol et fait l’objet d’un rappel à la loi.

Elle avait ensuite contesté son licenciement devant les juges.

Les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, ont considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En effet, l’employeur ne pouvait pas démontrer qu’il avait porté à la connaissance de la salariée l’existence du système de vidéosurveillance. Les témoignages d’autres salariés ne pouvaient suffire dès lors qu’ils n’étaient pas en mesure d’indiquer la date à laquelle ils avaient été informés.

La vidéosurveillance constituait donc un moyen de preuve illicite et la reconnaissance des faits par la salariée devant les gendarmes, basée elle aussi sur les images filmées, ne pouvait pas être retenue comme un mode de preuve.

L’employeur, qui n’avait pas d’autres éléments à l’appui du licenciement, a été condamné à verser à la salariée près de 10 000 € au titre de remboursement de la mise à pied conservatoire, d’indemnités de préavis et de licenciement ainsi qu’à titre de dommages et intérêts.

Recommandation : L’employeur qui entend mettre en place une vidéosurveillance en vue de contrôler l’activité des salariés doit les en informer spécifiquement et conserver la preuve de cette information.

À défaut, le mode de preuve étant considéré comme illicite, il ne pourra pas les utiliser valablement pour contrôler les salariés et les sanctionner à l’appui des images.

Cass. soc. 20 septembre 2018, n° 16-26482 D